Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 1)

DOI Artikel:
Burty, Philippe: Silhouettes d'artistes contemporains, [3], le peintre et graveur Félix Bracquemond
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.16908#0341

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
298 L'ART.

renseignement utile, précieux, dont leur talent de dessinateur leur permet de s'emparer facilement
et avec grand profit. Mais ce qui n'est que renseignement pour l'artiste est modèle pour l'artisan,,
pour le potier, le ciseleur, l'émailleur, etc. C'est par l'étude et par l'imitation de ces objets qu'ils
atteindront le résultat auquel on doit tendre et qui n'est rien moins qu'une heureuse révolution
dans la forme des objets usuels. Alors, pour s'approprier ces modèles, la vue ne leur suffit pas ;
il leur faut le maniement, l'habitude, la possession. Il leur faut une longue connaissance, une
familiarité de tous les jours pour arriver à la compréhension complète de ces formes et pour
pouvoir les reproduire, non pas avec le crayon, instrument imparfait dans leurs mains, mais avec
leur crayon à eux : I'outil.

« Une simple modification dans votre projet suffira à résoudre la difficulté : au lieu d'aller
convier les ouvriers à venir chercher l'enseignement au Louvre par des moyens qui ne leur sont
pas familiers, que l'enseignement aille les chercher eux-mêmes !

« Et pour cela le moyen est tout trouvé, et il est essentiellement pratique : c'est le moulage;
le moulage qui s'applique également et facilement à tous les genres de collections : céramique,
bronze, orfèvrerie, et même à la joaillerie et à la bijouterie; il ne s'agirait donc plus que d'établir
un atelier de moulage fonctionnant comme la Chalcographie, et débitant des exemplaires des prin-
cipaux objets des différentes collections.

« Ces moulages, que l'État pourrait vendre à bas prix, iraient répandre non-seulement à
Paris, mais dans la France tout entière; non-seulement dans les écoles de dessin et dans les
musées locaux, mais dans les ateliers des diverses industries, les notions les plus pures et des
modèles qui professeraient d'eux-mêmes. Grâce à la modicité du prix, le plus pauvre ouvrier des
faubourgs et l'apprenti même puiseraient dans la fréquentation de ces modèles vénérables un
enseignement que les Académies ne peuvent et ne pourront jamais leur donner, ce dont les
Académies d'ailleurs ne se soucient guère... 1 »

Si l'on réunit ces traits épars, on sentira combien cet artiste est bien dans la donnée
moderne, combien de force il a gagnée à suivre son génie sans se laisser dévoyer par les ambi-
tions malencontreuses. Toutes les pages ne sont pas également bien venues dans cet œuvre
déjà considérable. Il n'en est pas une seule banale, ni lâchée, ni tracée en vue de ces honneurs
qui diminuent.

Il a eu, dès ses débuts, une action très-directe sur tout ce qui, dans l'école des aquafortistes,
est dans le mouvement. Il a, dans tous les camps, des camarades qui l'estiment. Il a donné à
tous les peintres qui voulaient l'écouter, à Corot, à Rousseau, l'idée d'essayer des eaux-fortes.
Sinon toujours directement, au moins par influence, il a été le maître d'une infinité de jeunes
graveurs qui, par inadvertance, disent les uns, parce qu'il n'est point membre du jury, assurent
les autres, oublient régulièrement de se déclarer son élève sur le livret officiel ; de sorte qu'on
pourrait, dans cinquante ans, feuilleter la série de ces livrets sans se douter de l'action qu'il a
exercée. Mais pourquoi dis-je cela qu'il ignore sans doute? Il l'apprendra par ces lignes, si elles
lui tombent sous les yeux, et probablement m'en saura mauvais gré, car il n'est ni fielleux, ni
vaniteux. C'est un homme tout simple, qui croit certainement beaucoup en lui — et qui a raison.
Son œuvre parlera toujours pour lui. C'est dans les pièces qui composent cet œuvre, énergiques,
personnelles, bien françaises — j'entends ingénument savantes et libres sans exagération — que
les amateurs puisent les éléments de leur estime. Le public d'aujourd'hui se met au-dessus
des misérables luttes non pas d'école mais de chapelle, au-dessus des dénigrantes jalousies de
métier. Il s'attache aux artistes de race et Félix Bracquemond est de ceux-là.

Ph. Burty.

1. l'administration de la Maison de l'empereur ne prit point en considération cette requête, si juste, dont les résultats seraient si féconds,
dont la mise en œuVre serait si praticable. l'administration actuelle — qui du reste est la même — sera-t-elle prise un jour d'un beau regret ?
Que ce soit elle ou une autre administration qui s'y prête, cela s'exécutera certainement. Et ce jour-là, pour compléter le projet de M. Brac-
quemond, on joindra à l'atelier de moulage un atelier de photographie qui fournira, à prix réduit, les profils et faces de tous les objets
conservés dans les vitrines. Ajoutons, comme note, qu'au British Muséum on obtient, pour un shilling, une épreuve en métal de toutes les
pièces antiques que l'on désigne dans les médaillers aux conservateurs.
 
Annotationen