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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 1)

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Ménard, Louis: Introduction à l'étude de l'art
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https://doi.org/10.11588/diglit.16908#0131

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INTRODUCTION A L'ÉTUDE DE L'ART. 99

qui a rayonné sur le monde rentre tout à coup dans la nuit, et sans qu'on sache pourquoi
l'étoile se rallume ailleurs.

C'est donc principalement sur le terrain de l'art que le problème de l'influence du milieu est
complexe et difficile. Il n'en est que plus intéressant à étudier.

On doit écarter tout d'abord lés théories exclusives qui tenteraient d'attribuer le développe-
ment des arts à une cause unique. Si par exemple les conditions de territoire ou le tempérament
particulier d'un peuple suffisaient pour expliquer la naissance des chefs-d'œuvre à certaines
époques, on ne comprendrait pas la décadence et la stérilité du même peuple à d'autres époques,
sans qu'aucun changement se soit produit dans la géographie ni dans la race. La Grèce par
exemple était la même au siècle de Périclès et au Bas-Empire ; aucune invasion avant celles des
Turcs n'avait transformé sa population. Comment a-t-elle pu descendre d'une civilisation si bril-
lante à un si profond abaissement ?

Le passage d'une religion à une autre peut-il rendre raison de cette différence ? Si l'art grec
est sorti du polythéisme, pourquoi les Romains, dont la religion différait peu de celle des Grecs
dans ses principes fondamentaux, n'ont-ils pas eu d'art national? Si le christianisme est incompa-
tible avec l'art, comment expliquer l'éclosion d'un art chrétien dans la seconde moitié du moyen
, âge ? On ne saurait d'autre part regarder l'art chrétien comme un fruit spontané de la foi religieuse,
puisque les premiers siècles du moyen âge, qui sont l'époque de la plus grande ferveur chré-
tienne, sont en même temps les plus stériles et les plus ténébreux dans l'histoire de la civilisa-
tion. L'influence de la religion sur l'art a été tantôt favorable, tantôt funeste. L'hellénisme a
élevé la sculpture à une hauteur qui n'a jamais été dépassée, mais la religion des Juifs, celle des
Perses, celle des Musulmans ont proscrit les représentations plastiques. Le christianisme lui-même
a cédé plus d'une fois à des tendances iconoclastes, et sa morale spiritualiste a longtemps entravé
l'étude de la forme humaine.

La politique pas plus que la religion ne suffit pour expliquer le développement des arts.
Il a été de mode pendant longtemps d'attribuer la naissance des chefs-d'œuvre à la protection
des princes. On commence à reconnaître que les princes ne font que détourner à leur profit un
mouvement artistique commencé avant eux. Auguste et les Médicis ont accaparé une gloire due
aux époques qui les avaient précédés. L'art s'amoindrit et s'abaisse lorsqu'il est obligé de se plier
aux caprices d'un goût individuel : en France, il est devenu emphatique avec Louis XIV, libertin
avec Louis XV. Les protections princières ont quelquefois hâté les décadences et n'ont jamais pu
les retarder. Tous les efforts des rois d'Espagne n'ont pas arrêté la chute de l'école espagnole, à
la même époque où l'école hollandaise grandissait à l'ombre de la liberté. L'exemple de la Grèce
montre assez que la liberté vaut mieux pour les arts qu'une tutelle aussi onéreuse qu'humiliante.
Dans les temps modernes, les trois plus grandes écoles de peinture ont fleuri sous des républi-
ques : à Florence, à Venise, dans les Pays-Bas. Malheureusement, nous voyons par la Suisse et
les États-Unis que les meilleures constitutions politiques ne suffisent pas pour donner à un peuple
le sentiment de l'art.

L'action de la science et de la philosophie sur l'art, quoiqu'elle soit toute différente de celle
de la religion et de la politique, ne doit pas être négligée. La géométrie, la perspective, l'ana-
tomie, apportent leur concours à tous les arts du dessin. En même temps, par les progrès qu'elle
fait faire à l'industrie, la science contribue indirectement au développement de l'art. Le caractère
des monuments de l'architecture dépend en grande partie du choix des matériaux de construction
et de la manière dont on sait les travailler. Le travail de la pierre ou du bois, la fonte des
métaux n'a pas moins d'importance pour la sculpture. La peinture, par les couleurs qu'elle
emploie, est tributaire de la chimie. La musique demande à la science industrielle de lui fournir
des instruments sonores. Enfin, la poésie et la littérature, qui semblent, au premier abord, plus
dégagées de la matière que tous les autres arts, n'en ont pas moins été transformées par l'usage
du papyrus, du parchemin et du papier, et surtout par la découverte de l'imprimerie.

Cependant, la science et l'industrie ne sont pour Fart que des auxiliaires ; elles ne peuvent ni le
faire naître, ni le remplacer. Il semble même qu'un développement excessif de la science pure ou
 
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