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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 4.1878 (Teil 1)

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Véron, Eugène: Eugène-Emmanuel Viollet-le-Duc, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.16908#0320

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EUGÈNE-EMMANUEL VIOLLET-LE-DUC

ugène-Emmanuel Viollet-le-Duc est né à Paris le 27 janvier 1814.
Il porte allègrement ses soixante-quatre ans, qui n'ôtent rien ni
à la vigueur de son corps, ni à l'activité de son esprit. Aujour-
d'hui, comme pendant tout le reste de son existence, il consacre
au travail ses journées entières, et quand il est fatigué de travail
intellectuel, il se repose en faisant travailler son corps.

Son père était un lettré, auteur de plusieurs ouvrages estimés.
Il a écrit, entre autres choses, des Commentaires sur Régnier et
Boileau, un Nouvel Art poétique, un Catalogue raisonné de sa
bibliothèque, composée en grande partie d'anciens auteurs français.
Lettre composée par ch. Rossigneux. Il avait aussi un oncle, peintre et critique d'art, ancien élève

de David, qui pendant de longues années collabora au Journal des
Débats. C'est assez dire que l'enfance de E. E. Viollet-le-Duc se passa dans un milieu littéraire
et artiste. Chaque semaine son père réunissait chez lui un certain nombre d'hommes de lettres,
parmi lesquels on peut citer : Mignet, Ampère, Beyle, Mérimée, Fiévée, Saint-Marc Girardin,
Sainte-Beuve, qui parle à plusieurs reprises de ces réunions dans ses Lundis, et d'autres qu'il
serait trop long de citer.

Eugène Viollet-le-Duc commença ses études à l'institution Marin, à Fontenay-aux-Roses.
Il en sortit en 1829, pour les continuer à Paris, et entra en 1830 dans l'atelier de M. Achille
Leclerc. Mais, dès 1832, l'enseignement de l'atelier ne lui paraissant pas de nature à le diriger
dans la voie qu'il entrevoyait, il se mit à voyager en France et à visiter et étudier les édifices de
l'antiquité et du moyen âge.

Dans le deuxième volume de ses Entretiens sur l'architecture (page 23,), Viollet-le-Duc a
raconté lui-même comment est née l'idée de cette série de voyages qui lui ont permis d'étudier
l'architecture ailleurs que dans les cahiers de l'Académie.

« A dix-sept ans, X... était élève dans l'atelier d'un architecte, membre de l'Institut, excel-
lent homme s'il en fut et qu'il vénérait, comme il méritait de l'être, à cause de la droiture de
son caractère. Ce maître faisait copier à son élève et laver beaucoup de fragments tirés d'édifices
romains ; et, sur la marge de ses dessins, le jeune homme s'amusait à faire des ensembles présu-
més des monuments dont une portion seule lui était confiée. Bien entendu, ces ensembles ne pou-
vaient avoir aucun rapport avec la réalité. Il bâtissait cela â l'aide de réminiscences de toute
provenance; et Dieu sait quelles singulières compositions donnaient ces mélanges. Les éclectiques
en eussent tressailli d'aise ! Une porte du temple de Cora se trouvait plantée sur quelque façade
de maison entrevue à Rouen ou à Dreux ; un ordre du théâtre de Marcellus était surmonté d'un
attique couvert de bas-reliefs et portait sur un soubassement emprunté à quelque palais de
Florence. Les premières fois, le maître parut ne faire aucune attention à ces restaurations fantas-
tiques. Voyant que ces velléités se renouvelaient, il dit : « Qu'est cela? » En balbutiant l'élève
cherchait à expliquer ses motifs. On lui tourna le dos.

« Cependant, voyant que le mal était chronique, un beau matin l'élève fut appelé dans le
cabinet du patron, qui lui tint à peu près ce langage : « Mon ami, vous perdez votre temps ; si
« vous avez de quoi faire un petit voyage, voici l'été, allez-vous-en sur les bords de la Loire ou
« en Normandie, copiez les édifices que vous verrez, et montrez-moi vos dessins au retour. »
Croyez que le rapin ne se fit pas répéter l'avis. Au retour, en effet, il n'eut rien de plus pressé

Tome XII. 35
 
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