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Quatremère de Quincy, Antoine Chrysostôme
Le Jupiter olympien ou l'art de la sculpture antique — Paris, 1815 [Cicognara, 285; 2499]

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https://doi.org/10.11588/diglit.6109#0219

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I7o LE JUPITER OLYMPIEN.

des choses et dès personnes sur leur signification nominale, révoquent en doute tout
personnage antique dont le nom présente l'idée ou l'image de tout autre objet; système
vraiment abusif, puisque le plus grand nombre des noms provient de sobriquets, c'est-
à-dire dapplications qu'on fait aux personnes de leurs qualités physiques ou morales.
Ainsi le mot AatèoXoç,,inventif, ingénieux, peut être devenu le nom propre d'un artiste; et
de ce qu'il a pu se donner à plusieurs, ce ne saurait être une raison de rejeter dans le
règne des êtres allégoriques l'existence d'un homme qui, au temps de Thésée, paraît avoir
découvert et pratiqué plusieurs inventions relatives à l'art de la sculpture et de l'archi-
tecture.

Loin donc de penser que ce Dédale ait été un personnage chimérique, je suis persuadé
non - seulement qu'il exista, mais que beaucoup d'autres depuis lui, dans ce long cours
de siècles qui précéda les temps historiques, ont porté le même nom, et qu'une tradition
confuse a fini par accumuler sur un seul les ouvrages et les notions de tous.

Même dans les temps postérieurs nous trouvons deux autres Dédales, l'un surnommé
de Sicfone, dont j'aurai occasion de reparler; l'autre deBithynie, dont le principal ouvrage
fut à Nicomédie le Jupiter Stratius (0. Comment se refuser à la supposition que, dans le
temps où les hommes ne recevaient d'autre nom que celui de leur profession ou de leur
talent, le nom de Daidalos se sera multiplié de la même façon que celui de Faber, avec
ses modifications chez les peuples modernes.

Voilà, ce me semble, ce que la saine critique autorise à penser; et Pausanias, comme
on l'a vu, en soupçonnant que Dédale prit son nom des statues ainsi appelées, parce
qu'elles étaient de bois, nous induit à croire que plus d'un statuaire en bois, pendant
six siècles, dut recevoir la même dénomination.

Rien alors ne serait plus propre à nous expliquer comment, sous le règne d'Adrien, on
montrait encore un assez grand nombre de statues de bois qu'on attribuait à Dédale, fils
d'Eupalamus. Au dire de Pausanias 0), Thèbes avait conservé un Hercule de sa main. A
Lébade, on voyait de lui un Trophonius. Les Olynthiens et les Gnossiens en Crète don-
naient , comme son ouvrage, les uns une statue de Britomartis, les autres une Minerve.
Chez les Déliens on faisait remarquer, de l'ancien Dédale, une petite Vénus se terminant
en terme, et dont une main avait été détruite par le temps. Le même voyageur jugea être
de lui O&metv U |«>0 un Hercule, dans un lieu limitrophe des Messéniens et des Mégalopo-
litains; et au dire des Corinthiens (3) (Aatàalou âuxà <paslv aïvai -rifcw), l'Hercule nu en bois, qu'on
voyait près du théâtre, était de Dédale (4).

Quelle que fut alors la foi due à de telles traditions, on peut croire que ces simulacres
en bois, étant du style le plus ancien et d'un goût qui marquait l'enfonce de l'art,

ils avaient pu avoir pour auteur quelqu'un de ces artistes qui, dans ces siècles très-reculés,
s'étaient trouvés confondus sous la dénomination commune à tous, de sculpteur en bois,
dont il paraît que le mot Aatèc&oç était devenu synonyme. Sans doute Pausanias, en recueil-
lant ces traditions, n'a été que l'écho fidèle de l'opinion reçue, mais û faut avouer qu'il
n'avait presque pas plus de moyens que nous n'en avons aujourdhui, de porter le moindre
discernement dans le jugement d'ouvrages qui devaient se ressembler tous. Seulement il

(i) Eustathius ad Dionysii, «3 wsptTipfrou, vers. 796. — (2) Pausan., lib. IX, cap. [{0. __ (3) lUd, lib. VIII,
cap. 35. — (4) Ibid., lib. II, cap. 4.
 
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