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Quatremère de Quincy, Antoine Chrysostôme
Le Jupiter olympien ou l'art de la sculpture antique — Paris, 1815 [Cicognara, 285; 2499]

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https://doi.org/10.11588/diglit.6109#0040

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xxiv AYANT-PROPOS.

quelle provient aussi de ce qu'on a confondu entre elles certaines pratiques
de la sculpture polychrome, dont quelques-unes rappelèrent ou perpétuèrent
en Grèce les premières habitudes de l'art encore enfant. Car il y aurait une
autre prévention à vouloir tout justifier en Grèce, sous le rapport du goût,
parce que tout peut y être excusé ou expliqué sous le point de vue de la
religion, qui eut sans doute quelques intérêts séparés de ceux de l'art.

Mais on doit dire que les modernes se sont trop habitués à juger les arts,
abstraction faite de leurs emplois et de leurs servitudes , c'est-à-dire, sans
rapport avec les besoins de la société pour laquelle ils sont faits. De ce que
ces besoins ont pu quelquefois, et dans plus d'un pays, arrêter leurs progrès
et contrarier leur développement, on en a conclu très-faussement que s'ils
étaient libres de toute sujétion , ou autrement si l'artiste n'avait d'autre obli-
gation que celle de plaire en vertu des règles de la théorie, on verrait les
chefs-d'œuvre se multiplier, et l'imitation atteindre toute sa perfection. Vaine
spéculation. Ce n'est pas la théorie des rhéteurs qui a produit l'éloquence,
et la poésie ne serait jamais née du seul désir de flatter le goût des hommes
instruits. Réduire les arts à être les ministres des plaisirs que les gens éclairés

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trouvent dans leurs productions, c'est méconnaître et la nature des causes
qui les ont fait naître, et la nature de l'action qui peut les élever. Il faut à
l'artiste une bien plus haute perspective, il faut à ses ouvrages de bien plus
fécondes applications. Il leur faut une destination nécessaire et imposante
qui se fonde sur les besoins les plus impérieux de la société. Or, le simple
amusement, et je parle même de celui de l'esprit, ne saurait se mettre au
nombre des besoins dont je parle.

Il est vrai cpie quelquefois l'art trouve des obstacles dans ces besoins ; mais
son mérite alors est de savoir les vaincre, et de transformer en beauté ce qui
semblerait avoir dû être le principe d'une imperfection.

En un mot, l'art ne doit être ni esclave ni indépendant des besoins de la
société. Trop de servitude comprime, trop de liberté relâche son ressort. Il
ne lui faut pas un joug à porter, mais des devoirs à remplir ; et ce juste milieu
ne se trouve ni dans les pratiques de certaines opinions qui réduisent l'imi-
tation à* la fonction de l'écriture, ni dans celte autre manière de voir qui,
dénuant les arts de toute fonction utile, ne prétend les rattacher qu'au plaisir
des yeux ou de l'esprit.

Ce point milieu exista en Grèce, où les besoins avaient créé les plaisirs de
l'art, et où dès-lors chaque plaisir se trouvait fondé sur un besoin. Il ne faut
donc point y juger l'art sous chacun de ces rapports isolés, s'il est vrai que,par
une vertu particulière, ces deux rapports y furent toujours réunis. Notre
manière d'apprécier des objets dont nous n'avons réellement aucun besoin,
puisqu'ils ne se mêlent qu'à un petit nombre de nos plaisirs (en y comprenant
 
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