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Quatremère de Quincy, Antoine Chrysostôme
Le Jupiter olympien ou l'art de la sculpture antique — Paris, 1815 [Cicognara, 285; 2499]

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https://doi.org/10.11588/diglit.6109#0043

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i LE JUPITER OLYMPIEN.

doute appris par toute la terre aux hommes à conserver par des signes le souvenir des
objets. Par suite encore du même besoin, et sans autre impulsion que celle d'un senti-
ment presque machinal, l'homme a dû par-tout emprunter de sa propre configuration
le type de plusieurs des caractères dont se composa son écriture primitive.

Dans cet état d'imperfection morale, qui est véritablement au corps social ce qu'est à
l'individu formé l'état de l'enfance, il ne faut guère présumer que des êtres ignorants aient
eu, en fait d'imitation, des sensations supérieures à celles dont nous apercevons journel-
lement la trace dans les enfants. Le sens débile de ceux-ci correspond parfaitement au
sens grossier de ceux-là. Le sauvage et l'enfant sont affectés par l'Imitation, de la même
manière, dans la même mesure, et sous les mêmes rapports. On observe, par exemple,
que la figure palpable et matérielle, quelque informe qu'elle soit, saisit bien plus activement
le goût d'un enfant, que ne le font les linéaments les plus habilement tracés sur une super-
ficie plane, où son œil et sur-tout sa main n'ont point de prise. Ainsi la grossière ébauche
en relief qu'a façonnée un artifice ignorant, a plus d'action sur l'instinct de l'homme
inculte, qu'un dessin n'en pourrait produire par les traits et les contours les plus savants.

Ceci ne rendrait-il pas en partie raison d'une observation faite il y a déjà long-temps?
Plus d'un écrivain (0 a remarqué que la sculpture paraît avoir toujours et par-tout pré-
cédé la peinture. Cela provient, a-t-on dit, de ce qu'il est plus facile d'imiter les corps
par le relief de la forme matérielle que par la configuration linéaire : chose pour le moins
fort douteuse. Il est, à mon avis, plus vraisemblable que ce qui a pu porter l'homme à
cette sorte de prédilection pour les figures palpables, c'est que le toucher est le sens dont
on reçoit les impressions en premier, est celui qui donne les premières idées des objets,
les premières leçons sur leur manière d'être. J'ajoute que ce sens est aussi celui par le
moyen duquel se développe le sentiment de la propriété. Les cailloux, les morceaux de
bois, les coquillages, furent des signes et des idoles, avant qu'on sût tracer des traits ou
les colorier. Et le fétiche, ce premier-né de la superstition, dut amener la sculpture à
sa suite, ainsi que le goût du relief dans les premiers signes à .figure humaine.

La sculpture aurait dû ainsi la priorité à la nature des choses, qui a voulu que la
première impression des corps fût celle de leur solidité. La délinéation, qui ne donne
que l'apparence corporelle, n'a au fond, dans l'art de l'Imitation, rien de plus difficile
en soi. Cependant, si l'on consulte la marche de l'instinct et le développement naturel
des facultés imitatrices, il paraîtra que ce procédé ne sera venu qu'après, comme repo-
sant sur un moyen d'imiter moins direct et plus conventionnel.

Ce que je dis ici s'applique à la peinture, en tant qu'on la considère sous le seul
rapport du dessin ou de la délinéation des objets. Pour ce qui est de la représentation
de la couleur des corps, je pense que cette autre partie de l'art du peintre naquit plus
naturellement qu'on ne le croit, avec la sculpture. Nous réunissons aujourd'hui dans une
seule et même idée, et sous un même mot, le procédé de tracer des figures et celui de
les colorer. Ils sont toutefois très-divisibles par l'analyse, et ils furent aussi très-divisés
dans l'enfance de l'Imitation.

A cette époque, et dès que l'on sentit le besoin d'indiquer, dans les premiers signes dont
on a parlé, les qualités des objets, la couleur obtint le second rang après la forme, et

(i) Winck. Stor. delT arte, pag. 2G0 et 2G2 , Edit. de C. Fea. — De l'usage des statues, page 129.
 
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