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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

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Yriarte, Charles: Les restaurations de Saint-Marc de Venise, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0144

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n6

L'ART.

composition, les Magistrats de Venise adorant le corps de saint
Marc. Les arcs de l'étage supérieur n'ont pas été plus respectés
et, nulle part, il n'est venu à l'idée des procurateurs de Saint-
Marc d'exiger la reproduction exacte des mosaïques primitives
ou leur simple restauration ; car les quatre compositions de
l'étage supérieur, dues à Maffeo Verona, datent encore du
xvne siècle. Il faut ajouter que la première à droite des chevaux,
la Résurrection, malgré sa date relativement récente, n'existe
presque plus qu'à l'état de rêve, tandis que celle de Ricci, par
exemple, qui date du même temps, mais qui est abritée par la
saillie du Portone, produit pour ainsi dire une vive détonation.
Disons en passant que, depuis les premiers temps chrétiens, les
mosaïstes du xie et du xn° siècle sont les plus habiles, et ceux
dont les œuvres ont le mieux triomphé du temps.

Voilà donc le fait historique; les générations se succèdent

se produisaient les altérations, nous l'ont léguée à peu près
intacte. Je dis à peu près, et je vais spécifier.

On sait que cinq travées de deux arcs superposés, séparés
et butés par le système de colonnes portant les pinacoli, compo-
sent cet ensemble ; la première travée est sérieusement menacée
à son angle méridional; le premier ordre de colonnes, hors
d'aplomb désormais, manque par la base et il entraîne dans sa
chute l'ordre supérieur. Le revêtement de marbre, détaché du
mur, laisse voir la brique qui s'effrite et tombe en morceaux ; on
a dû soutenir avec des charpentes cette partie de l'édifice.
A l'étage supérieur, l'arc correspondant a perdu cette belle
ornementation de feuillages d'où sortent à mi-corps les statues
des saints. La statue qui trônait à son sommet n'existe plus, et la
belle frise richement colorée de rinceaux mosaïques qui recou-
vrait l'épaisseur de l'arc a dû tomber sur le sol de la galerie.

et chacune a l'instinct et le désir de Ajoutons que les fragments de sculp-
laisser sa trace. Aux mosaïstes naïfs, , R ture (qu'on a peut-être déposés lors
élèves des Grecs, succèdent les pein- A A de la restauration de la façade sur la
très touchants du Quattro Cento, puis J | /M\ Piazzetta) sont conservés comme la
viennent les artistes nobles et hardis Iwm Égji statue, et que c'est probablement pour
du xvi° siècle ; à leur tour les peintres Ot?' prévenir leur destruction qu'on les a
galants de la décadence ne se font %wft relégués dans les magasins,
point un scrupule d'imprimer leur ^ |||| t [ J?|k Lepinacolo qui sépare ce premier
cachet sur un monument d'un carac- ""^Vt"Tt^^^ ^ PïïP^ arc supérieur du second, abritant un
tère byzantin, et Lattanzio Querena ^Stfi^^^^^j\>t ' ffi . des évangélistes sous un dais de pierre
lui-même, homme de bonne volonté, \\ W f g Ktâx<>™ r^ii r-^Vi " M5SMI sculptée comme une dentelle, est
sur lequel le sec classicisme de l'em- i I I ^jgN I très sérieusement menacé, et la pré-
pire a laissé son empreinte et qui ^ , Wj ; [_ fecture de Venise a dû, par force
ignorait qu'un carton dessiné pour la IMjjïïiPMïliH1111 ^1 ^^^îffljjffl majeure, poser des étais on jambages
mosaïque est une œuvre qui exige ^W^^B^^^^ ^stincs à retenir les colonnes chan-
des conditions spéciales pour faire ^1= ' ' ' •'"•''ip'- celantes, afin d'éviter un désastre,
corps avec l'architecture, veut passer ^^/^^IHVVfl^ * ~~ (((il' I La grande verrière au centre,
à son tour â la postérité. j r , ; . ferj1 qui porte la lumière dans le vaisseau
C'est un fait ignoré hors de l|i , Il ' I %H 11 î de Saint-Marc, a été remplacée il y a
Venise que le gouvernement autri- ,Jj|^wl|_ill,ll_U-Li Wh, ^ quelques années, et il ne semble pas
chien, se plaçant au même point de ^'WT^lfiSÉw P/'f' '^TT^' ImN^ *lue 'cs autres arcs nécessitent de ré-
vue, avait commandé à M. Blaas, '/il !i il I il il ' parations ; mais à l'angle opposé du
peintre de l'arsenal de Vienne, des 'iï'M ' i ■ |liillI! J \ . .•;.-[ ■-= • monument, vers l'horloge, l'avant-
cartons de mosaïques destinés à rem- T_ij_^j^j_^3DaCTr3^xo^Ul4 iDfeSIgfolpf^' corps destiné à porter la galerie qui

placer celles qu'on allait enlever dans J' -'"^ se retourne sur San Basso, malgré

, ti r ii i Travée d'angle sur la Piazzetta. , , a . . .

la restauration de 1864. Il lallut la -. „„,„„i____„. , . . • les chaînes de 1er aioutees à une

~ btat actuel montrant la restauration nécessaire. ' tJ a u11^

persistante opposition de l'ingénieur Dessin de P. Avril. époque éloignée, est hors d'aplomb

Zaccardo pour empêcher cette in- par suite de tassements inégaux du

croyable substitution. Les cartons ont été exécutés, ils existent
encore dans les magasins de la fabrique.

II

Mais si ces changements successifs des siècles passés n'ont
pas très sensiblement altéré l'édifice, combien l'impression serait
plus grande encore, si les procurateurs de Saint-Marc avaient
enjoint aux artistes d'alors de conserver et de restaurer respec-
tueusement les anciennes mosaïques dont nous connaissons
encore et la forme et le ton, par le précieux tableau de Bellini?
Chaque siècle apporte son progrès, ce sera désormais une loi
pour nos neveux de respecter dans les monuments les disposi-
tions adoptées par les ancêtres, et de ne jamais déchirer un
seul feuillet de ces livres de pierre où l'on apprend l'histoire des
temps passés.

Si nos devanciers ont changé l'aspect au point de vue déco-
ratif, il faut reconnaître qu'ils n'ont point altéré la forme archi-
tecturale ; et, comme cette façade ouest est dans un état de
conservation relatif, il faut en conclure que des travaux de
consolidation exécutés judicieusement au fur et à mesure que

sol et, naturellement, entraîne la galerie et l'angle supérieur.
Sur ce point le dommage est sérieux, imminent, et le spectateur
attentif ne reste pas sans inquiétude sur l'avenir de cette partie
de l'édifice.

Je néglige à dessein la question des tassements de la façade,
ce sont là des questions techniques qui sont du ressort d'une
revue spéciale; cependant je constaterai que l'architecte chargé
de la réparation de la face méridionale, en reprenant les fonda-
tions de cette partie de l'édifice, a pris naturellement pour niveau
celui de la Piazzetta, et a été amené à relever à peu près de
douze à quinze centimètres les bases des premières colonnes, et
par conséquent d'autant la corniche du couronnement qui est
le sol même de la galerie ; d'où il résulte que l'angle méridional
ne règne plus avec le reste de l'édifice. C'est ce dernier niveau
qui devait devenir le niveau définitif du monument entièrement
repris dans le nouveau projet, si une décision ministérielle n'eût
éloigné pour longtemps et, nous l'espérons, pour toujours, la
pensée d'une restauration totale. Sur ce point le mal est fait et
cette différence, si notable pour les hommes spéciaux, échappe
d'ailleurs aux gens du monde qui jouissent du coup d'œil général
de l'édifice et ne s'arrêtent point au détail.

{Lafin prochainement.) Charles Yriarte.
 
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