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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

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Soldi, Émile: L' art persan, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0053

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L'ART PERSAN

Pendant que l'État présentait à l'étude, au Palais de l'Indus-
trie, la collection des carreaux émaillés rapportée par M. de
Ùjfalvy, le musée de Cluny, par une heureuse coïncidence,
réinstallait dans la nouvelle salle sa merveilleuse série de faïences
de Rhodes ; le musée de Sèvres, les faïences et les plaques de revê-
tement provenant de la Perse, de Damas et de Brousse; et l'Expo-
sition universelle, les magnifiques collections de MM. Bayle,
Chlebouski, Carepanos, Delort, Dieterle, Dreyfus, Duhousset,
Gérôme, Goupil, de Liesville, Robinson, Gustave de Rothschild,
Scheffer.

Nous sommes étonné que, en présence de ces nouvelles
richesses et d'aussi importants documents, les savants n'aient pas
essayé de se mettre d'accord sur les questions, — très complexes,
il est vrai, — relatives à l'art persan, ses caractères particuliers,
et les écoles qu'il a formées. Amené par les circonstances à
émettre une opinion personnelle sur ces questions, nous désirons
vivement que la réfutation de nos erreurs par un érudit
ramène la discussion sur cette période si importante de l'histoire
de l'art, période sur laquelle les difficultés de contrôle, les diver-
gences de vues sont telles — môme sur les principes les plus
simples en apparence —■ qu'elle a été retirée de l'étude, au
profit d'époques ou de questions beaucoup moins importantes.

Tout le monde sait que l'émail, glaçure, vernis ou couverte,
est un enduit vitreux généralement opaque et coloré, formé par
divers oxydes métalliques : plomb, étain, cuivre, avec additions
de borates, de phosphates, etc., mélangés suivant les couleurs
que l'on veut obtenir, pilé, délayé, déposé sur la surface de la
pièce à émailler, et vitrifié au feu.

L'émail est plombifère, forme un vernis ou une couverte
translucide quand il est composé seulement d'oxyde de plomb.

L'émail opaque est stannifère quand il est composé d'étain
et d'oxyde de plomb.

L'oxyde d'étain forme l'émail blanc; l'oxyde de plomb et
l'antimoine ou l'argent, l'émail jaune; l'oxyde de cobalt, l'émail
bleu ; l'oxyde de cuivre, l'émail vert.

Toute poterie ou terre cuite recouverte d'émail est appelée :
faïence.

La mosaïque n'est qu'une variété de l'art de l'émailleur, car
la plus grande partie des cubes dont se sont servis les mosaïstes
anciens, depuis les Babyloniens, ont la surface émaillée.

Les carreaux, tuiles, briques ou plaques émaillés, qui revê-
tent les murailles des édifices persans ou musulmans, ont des
dimensions très variables; les plus grands mesurent parfois
jusqu'à trois mètres de superficie, les plus petits dix centimètres
et alors ils sont le plus souvent taillés en forme de croix ou en
étoiles. Généralement, des étoiles d'une couleur et des croix
d'une autre se juxtaposent et forment ainsi une véritable
mosaïque. Le musée de Kensington présente une très belle
collection de sujets les plus variés en ce genre -. On y voit des
croix avec des figures humaines, des animaux fantastiques, des
dragons, des éléphants, des oiseaux ; la composition en est sou-
vent des plus élégantes. Parfois les fleurs qui remplissent le
fond ou le champ de cette étoile sont dessinées avec la netteté
de feuillage des couronnes d'or découpées à Temporte-pièce

ayant presque la même forme que ceux des diadèmes trouvés à
Troie par M. Schliemann, et exposés dans le même musée.

Parmi les monuments de l'Asie centrale, M. de Ujfalvy a
distingué trois systèmes de décoration par les briques émaillées 3.

i° « Des briques à la surface unie, couvertes d'une couche
d'émail d'une ou de plusieurs couleurs (comme qui dirait
l'émail à champlevé); 2° de petits morceaux de briques couverts
d'une couche d'émail s'agençant les uns dans les autres, disposés
en mosaïque ; y> des briques travaillées à jour, fouillées à la sur-
face et recouvertes d'une couche d'émail unicolore. Les deux
premiers genres se rencontrent sur tous les anciens édifices de
l'Asie centrale ; les murs extérieurs et intérieurs du Hazret, à
Turkestan, et de toutes les mosquées de Samarkand sont revêtus
de ces briques. Seul, le Schah-Sindeh possède des briques tra-
vaillées à jour. On en trouve aussi parmi les débris qui jon-
chent l'emplacement de Sjankond (sur les bords du Syr-Daria). »

Quand les carreaux de revêtement arrivent à fleur d'un
mur, comme dans l'embrasure d'une porte, l'épaisseur du
carreau est taillée en biseau et ornée d'une petite bordure. Cette
bordure, comme les moulures de l'architecture, est émaillée
monochrome, mais le plus souvent sculptée avec finesse i. On a
souvent prétendu que les plus anciennes faïences émaillées
n'étaient que des glaçures silico-alcalines et que les autres
glaçures plombifères, stannifères, etc., sont relativement mo-
dernes ; pour nous il est certain que dans les glaçures les plus
anciennes de l'Égypte ou de la Perse les émaflleurs se sont
servis d'oxvdes métalliques, tels que les oxydes de cuivre pour
leurs belles colorations vertes ou bleues, et ont produit aussi
parfois un très beau rouge tiré du fer, procédé perdu pendant
plusieurs siècles. M. Layard à Khorsabad a trouvé des fragments
d'anciennes poteries recouvertes d'un émail blanc stannifère et
enrichies de dessins à reflets métalliques semblables à ceux des
faïences hispano-moresques, des fragments de figures de lions et
de chimères sous vernis vert (cuivre et plomb) ; et le musée de
Sèvres possède des fragments de poteries arabes couvertes d'une
glaçure plombo-stannifère. Ces fragments sont attribués aux
ix° siècle par M. Lenormand 5.

Quant au violet de manganèse, il est relativement moderne.

L'art de l'émail devait du reste facilement naître et se
développer dans l'Asie centrale et l'Asie Mineure, ces contrées
offrant toutes les ressources naturelles qui lui étaient néces-
saires ; Koom, Ecbatane, Nain, etc., ont une grande variété
d'argiles plus ou moins poreuses; Quachan, des mines de cuivre
et de cobalt. Le borax est abondant dans les lacs de Perse, —
le mot borax vient du mot arabe : ban-rach; — le mot alcali
vient du terme arabe : al kali.

Dans l'antiquité, les briques émaillées babyloniennes étaient
réunies à l'aide de bitume, parfois aussi fixées avec des tiges de
cuivre 6 ; celles de l'Asie centrale au moyen âge l'étaient le plus
souvent avec du mortier. Actuellement on se sert simplement
de plâtre.

Contrairement à ce qui se trouve chez les Assyro-Babylo-
niens, la végétation, les fleurs, composent la généralité des
sujets des faïences émaillées iraniennes, sur les plats comme

1. « Posons d'abord en principe, dit Jacquemard (page 195), que la céramique persane n'a jamais été étudiée, et que le peu qu'en ont écrit certains voyageurs
est un tissu d'absurdités et de propositions contradictoires.»

2. Certaines tuiles bleues ornées de (leurs d'or rappellent les émaux de Limoges. Celles à fond jaune sont le plus souvent du xvu« siècle. Mentionnons aussi
les petits mirabs, de 60 cent, environ ; généralement ces plaques sont d'une seule pièce, sculptées profondément et recouvertes d'une glaçure vert-turquoise.

3. Expédition scientifique française en Russie, en Sibérie, au Turkestan. — Vol. II. Le Syr Daria, le Gérafchâne, les Sept Rivières et la Sibérie occidentale
avec des appendices. Paris, E. Leroux, 1879, p. 87.

4. M. Schetïer possède dans sa collection un fragment de moulure sculptée et couverte d'un émail vert de la plus grande beauté,
ç. Davillier, Histoire des faïences hispano-moresques à reflets métalliques. Paris, 1861.

6. Herod., 1. I, ch. cr.xxvm; Ctcs., De rcb. Assyr., apud Diod., Il, vu, D.
 
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