Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

DOI Artikel:
Soldi, Émile: L' art persan, [2]
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0112

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
L'ART PERSAN'

.(suite et fin)

LES MIGRATIONS DE I.'ART PERSAN

On ne saurait croire combien les discussions des savants et
des arabisants, cantonnés chacun dans des études spéciales, ont
contribué à rendre difficile la question des migrations de
l'art dans les différentes civilisations de l'Asie depuis l'antiquité.
Les points de vue où se placent les auteurs qui, depuis un siècle,
ont parlé de l'Orient, sont aussi peu d'accord que les légendes
anciennes dites historiques, laissées par les Orientaux sur les
origines de leurs royaumes et sur les dynasties sans nombre qui
les ont gouvernés.

« L'historien céramiste, dit Jacquemart2, est dans cette
situation singulière de ne pouvoir assigner aucune date aux pre-
mières œuvres de la Perse, et de ne savoir si les traditions de
cette contrée remontent à l'antiquité ou au moyen âge, provien-
nent de l'extrême Orient, de l'Asie Mineure ou de l'Arabie. »

Ce savant, qui est loin d'être le seul qui ait douté de l'anti-
quité des traditions de la Perse, a essayé pourtant de donner
quelques classifications. Mais il est évident pour tout le monde
aujourd'hui que les distinctions de la céramique persane en por-
celaine blanche à décor bleu sous couverte, en porcelaine à
dessins polychromes, en famille verte, famille rose, porcelaine
trempée en couleur, seront toujours difficiles à déterminer, tant
l'Asie a été sillonnée de fabriques différentes, tant la poterie a
subi, suivant le voisinage, les procédés et les influences de la
Chine, de l'Inde ou de l'Europe. Nous pensons que quand on
possédera une collection de spécimens des briques émaillées qui
recouvrent les monuments de la Perse, on pourra, grâce à la
date généralement connue de leur construction, donner plus
facilement une histoire de l'art perso-arabe que l'on ne peut le
faire avec les quantités de poteries et de vaisselle que nous pos-
sédons, car celles-ci ne portent jamais la date et le lieu de leur
fabrication. Les inscriptions religieuses ou poétiques ne nous
apprennent rien et c'est à peine si on peut nettement diviser en
deux périodes la poterie apportée de la Perse: l'une où figurent
le cyprès symbolique, l'autel et tous les attributs du culte des
mages, et qui remonterait par conséquent à une date anté-isla-
mique; et celle dont les sujets marquent une date postérieure, tels
que la plaque de terre qui représente la mosquée de la Mecque.

Si l'on veut chercher à s'assurer de la priorité de l'Asie cen-
trale pour l'invention et l'emploi de la faïence émaillée dans
l'architecture, on ne peut pas s'appuyer sur les textes des voya-
geurs anciens dont les termes et la compétence peuvent toujours
donner lieu à des discussions ; mais en étudiant la liste des mo-
numents émaillés dont les collections présentent de nombreux
spécimens, on retrouvera les anneaux d'une chaîne brisée, il est
vrai, mais que nous possédons du commencement à la fin, en
nombre suffisant pour essayer de la reconstituer.

Avant tout, il est deux points incontestables qu'il est néces-
saire de rappeler : le premier explique certains éléments de
ressemblance dans les œuvres de l'art des civilisations différentes
qui se partagent l'Europe et l'Asie.

i° Primitivement, les Aryas étaient rassemblés dans les
vallées de la Bactriane, bordées par l'Hindou Kousch.

Les différentes familles qui composent cette race se séparent.
Les unes se dirigent vers la vallée du Gange, ce sont les Hindous;
d'autres vers la Médie et la Perse, ce sont les Iraniens. Enfin,

les derniers émigrants, les Pélasges, les Celtes, les Germains et
les Slaves se répandent de l'Asie Mineure jusqu'à l'Occident et
la Méditerranée. Tous ces peuples emportèrent de la souche
commune les premiers rudiments de la civilisation dont les germes
sont encore visibles dans certaines similitudes, non seulement
de leur langue, mais encore, nous l'avons dit, de leurs tendances
artistiques3.

2° De simples exigences techniques suffisent pour expliquer
pourquoi le constructeur babylonien, — surtout primitivement,
— dans les plaines arrosées par l'Euphrate et le Tigre, contrées
privées de marbres et de pierres, a dû adopter une architecture
massive, formée d'épaisses murailles de briques cuites, ou seule-
ment séchées au soleil, murailles qui ne pouvaient guère être
mieux solidifiées et en même temps décorées que par des revê-
tements de faïence émaillée.

En plaçant la formation de l'art de la Perse entre ces deux
traditions d'origines et de causes différentes, on comprendra bien
mieux le goût décoratif et le côté pratique qui le distinguent
entre tous.

Certainement, la céramique émaillée se montre dès la plus
haute antiquité dans l'industrie égyptienne.

Dès les premières dynasties elle nous présente des vases, des
statuettes, des amulettes de toutes formes en faïences vernissées
d'un lustre silico-alcalin magnifique, des inscriptions, des mo-
saïques variées. Mais est-ce par eux que les Chaldéens connurent
ces procédés ? Il est difficile jusqu'ici de l'affirmer. En tout cas,
l'emploi de la faïence pour les revêtements des édifices de la
Babylonie a un caractère local, particulier, dû en grande partie
aux raisons techniques que nous avons données plus haut.

Les plus anciens temples de ces contrées étaient recouverts
d'émail. C'est ainsi que celui qui était consacré au dieu Marduk,
à Bit-Saggatu, a laissé au milieu de ses ruines des quantités de
briques émaillées. Dans une longue inscription, gravée sur du
basalte, conservée au British Muséum, le destructeur de Jéru-
salem, Nabu-Kudur-Usur, dit en parlant de ce fameux temple:
«J'ai amassé dans Bab-Ilu de l'argent, de l'or, des métaux
précieux,- de l'émail (e-ra-a)..., etc. » M. Ménant, qui donne
cette traduction, dit que l'on peut rapprocher e-ra-a du mot
chaldéen qui signifie littéralement recouvrir d'une matière
gluante.

« Les briques vernissées ou émaillées, que l'on trouve dans
les ruines, sont enduites d'une couche épaisse de o,o2m de ma-
tières appliquées à froid à l'aide d'un pinceau et ensuite soumises
à la cuisson, etc. 4. »

Une fois admis le principe de l'invention ou de la priorité
babyloniennes des revêtements des murs par la brique émaillée,
il était naturel que cet usage s'étendît dans les pays voisins,
grâce à l'influence que cette nation a toujours possédée dans
l'antiquité sur les pays limitrophes.

C'est ainsi qu'à Ecbatane, la capitale de la Médie, chaque
mur, dit Hérodote, était peint — c'est-à-dire émaillé, à l'exemple
de ceux de Ninive, — d'une couleur différente.

On sait que non seulement les invasions politiques, mais en
temps de paix les besoins du commerce, la conformité du lan-
gage, avaient appelé dès la plus haute antiquité dans les plaines
extraordinairement fertiles de la Chaldée, sur les bords du Tigre
et de l'Euphrate, non-seulement tous les habitants de l'Asie

1. Voir l'Art, 6" année, tome II, page 39.

2. Jacquemart, les Merveilles de la céramique, page 193.

3. V. Cliampollion-Figeac, Histoire de la Perse.

4. A. Menant, Babylone et la Chaldée. De Limas, Les,Origines de l'orfèvrerie cloisonnée, page 59.
 
Annotationen