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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

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Courajod, Louis: Observations sur deux dessins attribués à Raphaël et conservés à l'Académie des Beaux-Arts de Venise
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Lettres inédites de Eugène Delacroix
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https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0203

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LETTRES INÉDITES DE EUGÈNE DELACROIX.

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l'existence d'un fait indiscutable et dont il faudra tenir compte
quand l'heure du jugement définitif aura sonné.

J'ai publié récemment dans ce journal1 un dessin d'Antonio
del Pollajuolo reproduit ici une fois encore. Ce dessin fait partie
des collections du Louvre, et, depuis longtemps, est donné à ce
maître2. Il porte sur l'angle gauche l'inscription suivante tracée
par une main contemporaine de l'œuvre : Antonij Jacobi excel-
lentisshnj ac eximij florentin] pictoris scultorisque (sic) prestan-
tissimj hoc opus est. Et plus bas : ... [Qumque hominum imagi-
nent fecit ...\y]ide quant mirum in membra redegit.

Quand j'ai rapproché ce dessin de la copie d'un autre dessin
du même maître que j'avais rencontrée à Munich, la double
attribution qui en était faite a été acceptée par les savants aux-
quels je l'ai soumise et dont j'avais provoqué les observations.

On peut donc regarder désormais le dessin du Louvre comme
étant l'expression sincère d'un travail de Pollajuolo. Or, deux
des dessins de Venise sont exactement la répétition de deux des
figures dessinées sur la feuille du Musée du Louvre, comme
il est facile d'en juger par les deux fac-similés photographiques
ci-joints. Conclusion : les deux dessins de Venise, reproduits
ci-dessus, sont des copies du dessin de Pollajuolo ou d'une
œuvre qui aurait eu le même point de départ3. J'ajouterai que
ces deux dessins me paraissent assez faibles pour ne pas devoir
être attribués à Raphaël, même comme copies.

Cuique suum. Tout le monde, y compris Raphaël, gagnera à
l'acte de justice que je réclame de l'opinion publique mieux
informée.

Louis CouRAjon.

LETTRES INEDITES DE EUGENE DELACROIX

Nous avons rendu compte, il y a quelques mois, d'un vo-
lume de lettres de Delacroix, publié par notre collaborateur
M. Ph. Burty, chez A. Quantin. Il annonçait dès lors qu'il
espérait compléter ce travail par la publication d'autres lettres
de Delacroix. Une seconde édition en deux volumes, contenant
quatre-vingts lettres et billets en plus, avec des notes biogra-
phiques et critiques par son élève Lassalle-Bordes et une table
analytique, va paraître dans quelques jours chez l'éditeur
G. Charpentier. Nous sommes heureux de pouvoir donner à
nos lecteurs la primeur d'une lettre inédite qui aura un vif in-
térêt pour ceux qui, derrière le peintre, aiment à étudier
l'homme.

A M. VARCOLL1ER.

Champrosay, 7 juillet 1852.

... J'ai des voisins que je vois le soir, ou bien à cette heure-là
je fais des promenades où je trouve de la fraîcheur. Le matin
je travaille aussi régulièrement qu'à Paris, et bien que mes cou-
leurs soient sèches avant la fin de la séance, je tiens bon ! Je
tiens l'ennui en échec et n'ai pas le temps d'avoir des idées
noires. Voilà la vie que je mène et que je voudrais beaucoup pou-
voir prolonger, dans le moment surtout; la perspective du tra-
vail dans mon atelier de Paris est un grave épouvantail, et
cependant il n'y a pas à reculer. Dimicandum, c'est une belle
devise que j'arbore par force et un peu par tempérament. J'y
joins celle-ci : renovare anintos. Passer du grave au doux, de la

ville à la campagne, du monde à la solitude, jusqu'à ce que l'on
passe de quelque chose au rien! Mais alors, quoi qu'en pense
Hamlet, les songes dans ce repos profond ne viendront pas
nous apporter les images du mouvement, et c'est un bienfait de
l'incomparable Nature que cette autre rénovation des êtres dans
ce grand concert où elle nous jette, tètes, bras, ventre, esprit,
sentiment, basses natures, nobles esprits, pour en tirer de nou-
veau et éternellement d'autres apparences animées, et rajeunir le
grand et éternel spectacle. Mourons, mais après avoir vécu.
Beaucoup s'inquiètent s'ils revivront après la mort, et ils ne rê-
vent pas. Dès à présent, combien d'hommes rêvent à votre gré
sans parler du sommeil, des maladies ! Combien se passe-t-il de
notre vie dans des emplois abrutissants pour l'esprit, combien à
fumer, combien à des spectacles insipides qui tiennent de la
place dans la vie sans l'occuper d'une manière digne de l'homme !
Beaucoup d'hommes qui n'ont pas essayé de vivre disent qu'ils
n'ont plus le temps, et ils retombent sur l'oreiller où ils se
bercent sans plaisir. Il faudrait veiller sans cesse sur soi, car
la paresse est un entraînement de tous les moments; donc il
faut combattre ou crever honteusement.

Adieu, mon cher ami, en voici beaucoup par le temps qu'il
fait. J'ai eu là un mouvement qui promettait beaucoup, et j'ai
tourné court... par paresse probablement. Dieu vous préserve de
cette rouille. Mais votre esprit n'est pas de ceux qui s'endorment,
et même dans les souffrances qui le tiennent éveillé et tout en
enrageant, vous êtes comme le brahmine de Voltaire qui ne
voudrait pas être une bête.

t. Voir l'Art, 5» année, lome IV (XIX" de la collection), p. 165.
2- Cf. F. Reiset, Une visite à la National Gallery en 1876. p. 31.

; • Bien que je ne puisse pas en administrer la preuve matérielle, j'en dirai autant du n« 36 du catalogue de la collection de Venise, dressé dans le tome )I
p. 410, de Raphaël d'Urbin et son père Giovanni Santi. Ce dessin a été photographié et publié par F. Ongania, sous le n« 93, et ainsi décrit par Passavant : « Un
homme nu, debout, les bras croisés. Légère esquisse; revers de la feuille n« 3 » Il suffit de le voir pour comprendre que c'est également la copie d'un dessin original
de Pollajuolo.
 
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