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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

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Hédou, Jules: Jean Le Prince (1734-1781)
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https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0239

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JEAN LE PRINCE1

1734-1781

armi les peintres du xvine siècle, il en est un qui occupe une
place à part comme homme et comme artiste. Son œuvre
peint et gravé, au moins au premier coup d'œil, possède une
allure particulière. L'homme est un original qui, tout jeune
encore, va carrément trouver le gouverneur de sa province, lui
demande sa protection et l'obtient ; puis, à peine adolescent,
épouse une femme presque vieille, rompt peu de temps après
avec elle, s'enfuit à l'étranger, est pris par des corsaires qu'il
charme avec son violon, explore la Russie d'un bout à l'autre,
est présenté au Czar et choyé à Saint-Pétersbourg, revient
en France, est nommé académicien, séduit Diderot, invente un

l eitre du xvic siècle. Collection Bomiaffé. , ,

procède de gravure dont il tire des effets ravissants et qu il ne
trouve pas à vendre, gagne beaucoup d'argent, dépense sans compter, achète une maison de
campagne dans laquelle il doit bientôt mourir, en léguant pour tout héritage, à une jeune nièce
qui l'a soigné, une assez jolie collection de créanciers.

Tel est, à grands traits, le portrait de l'artiste que nous demandons au lecteur la permission
de lui présenter. Comme on le voit, Jean Le Prince n'est pas le premier venu ; s'il n'est pas
un grand peintre, c'est au moins un peintre original, et on ajoute même que c'était un homme
d'esprit, ayant tous les vices et aussi toutes les qualités du siècle au milieu duquel il vivait.

Brillant viveur, libertin spirituel, peintre facile, graveur plein de brio, il dépensait avec
autant d'aisance sa santé que son argent, et ne comptait pas plus avec l'une qu'avec l'autre.
Aussi mourut-il jeune et malheureux, après avoir mené une existence assez accidentée; peut-être
aussi, descendant d'une famille d'artistes normands, aVait-il été habitué à mener, dès sa jeunesse,
ce que nous appelons la vie de Bohême. Cela est possible.

Pendant plusieurs siècles, la famille Le Prince avait fourni à Rouen toute une génération de
maîtres sculpteurs-doreurs. Jean-Baptiste Le Prince, père de notre artiste, fut le premier qui alla
chercher fortune au dehors. Il s'établit à Metz, où il contracta deux mariages successifs, le
premier avec Marie Plante, le second avec Anne Gautier.

De cette dernière union naquit, le 17 septembre 1734, le peintre dont nous avons à nous
occuper. 11 fut baptisé le surlendemain, en l'église Saint-Victor, de Metz, et reçut le prénom de
Jean, auquel il ajouta presque toujours celui de Baptiste.

On peut facilement se faire une idée de ce que furent les commencements du futur
académicien. Son père, trouvant qu'il y avait assez d'enfants à la maison (ils étaient au moins
cinq), confia Jean à un peintre de Metz, qui devait lui apprendre son art.

Voilà donc notre artiste maniant le crayon ou la sanguine, et tripotant la couleur
dans l'atelier de son maître. 11 est présumable que, doué de grandes dispositions, il arriva
promptement à apprendre ce que pouvait lui enseigner son professeur; car l'envie de quitter
Metz, de voir Paris et d'étudier sous un maître sérieux, le prit d'une façon si violente, qu'il
adopta sans hésiter une résolution bien hardie pour un enfant. Il ne pouvait songer à demander
à son père l'argent nécessaire pour aller vivre et se perfectionner à Paris. C'eût été peine perdue.

i. Jean Le Prince et son Œuvre. Suivi de nombreux documents inédits, par M. Jules Hédou. Portrait à l'eau-forte par Gilbert. Paris,
Baur et Rapilly, 1879. 1 vo'- in-8°.

Tome XXI. 2
 
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