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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

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Véron, Eugène: Th. Ribot, [2]: Exposition générale de ses oeuvres dans les galeries de l'Art
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Courajod, Louis: Observations sur deux dessins attribués à Raphaël et conservés à l'Académie des Beaux-Arts de Venise
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https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0201

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TH. RIBOT. 161

regardent le spectateur. Par leurs yeux il pénètre dans leur âme. Mais les yeux, toujours
admirablement enchâssés, ne suffisent pas. Ribot attache aux mains une importance presque égale;
et vraiment il n'a pas tort. Le geste ne constitue-t-il pas une des plus grosses parts de Faction
oratoire? Quiconque a l'habitude des assemblées délibérantes sait combien ont de puissance les
mouvements des mains. Il n'y a guère de figures de Ribot dont on ne voie les mains, ce qui a le
double effet d'en rendre l'expression plus saisissante, et de permettre au spectateur d'admirer
avec quelle vérité de dessin et de couleur, avec quelle puissance de vie et de caractère ces mains
sont rendues.

Ribot est de la race des grands peintres hollandais et flamands qui n'ont jamais imité que
la vie réelle et qui n'ont jamais fait que des portraits, n'admettant pas que le peintre ait le
droit de créer à son usage personnel des figures qu'il n'a jamais vues et qui n'existent pas dans
la nature; ne croyant pas, comme certains critiques académiques, que la beauté des vierges de
Raphaël consiste précisément en ce qu'elles seraient incapables de vivre et de se mouvoir. Il est
convaincu, tout au contraire, que le premier devoir de l'artiste est de chercher la vie, et
comme il n'en connaît pas d'autre que celle qu'il voit dans la réalité, il s'interdit rigoureusement
ces prétendues idéalisations, qui ne sont, à vrai dire, que des mutilations.

Nous n'avons pas eu la prétention de faire une étude complète du talent, non plus que de
la vie de Ribot. Nous avons dû nous contenter de toucher en passant les traits principaux.
En résumé, les caractères saillants de l'œuvre de Ribot sont la force et la sincérité. L'excès
même de ces deux qualités ne lui fait pas peur. C'est pour cela qu'il a eu tant de peine à
triompher des étonnements et des résistances du public, habitué à la peinture lavée et veule des
artistes à la mode; mais c'est justement pour la même raison que peu à peu tous les connaisseurs
se sont déclarés pour lui, et qu'il est désormais reconnu comme un des plus grands peintres de
l'École française.

Eugène Véron.

OBSERVATIONS SUR DEUX DESSINS ATTRIBUÉS A RAPHAËL

ET CONSERVÉS A L'ACADÉMIE DES BEAUX-ARTS DE VENISE

Quand, spontanément ou sur la foi de la tradition, on
admire une œuvre d'art quelconque, il arrive souvent qu'on se
désintéresse trop facilement de toutes les questions d'histoire
que cette œuvre soulève; et, dans une contemplation exclusi-
vement esthétique, on oublie trop vite que tout travail d'artiste
contient de nombreux éléments d'information dont l'examen
est aussi curieux pour la biographie de son auteur et la connais-
sance du temps dont il émane que nécessaire au contrôle de son
authenticité. L'enthousiasme plus ou moins légitime une fois
satisfait, il convient de regarder froidement le monument
étudié et de lui demander, comme à un document ordinaire, de
nous déclarer sans réticence, loin du flamboiement de l'étiquette
et de l'apothéose de la cimaise, la signification rigoureuse qu'il
prétend avoir auprès des gens sérieux. C'est faute d'avoir
appliqué ce principe que l'histoire de l'art est si manifestement
en retard sur l'histoire politique, bien que l'étude de la première
soit plus attrayante que celle de la seconde et bien que les
musées aient plus de visiteurs que les archives. C'est pour n'avoir

pas agi avec critique et procédé par la méthode scientifique que
les dilettantes improvisés et les fabricants d'esthétique sont
victimes depuis si longtemps de colossales mystifications. Il
importe donc de noter, au fur et à mesure qu'elles se présentent,
les observations qu'on est étonné d'avoir encore à faire sur
certaines pièces célèbres, connues de toute l'Europe et que,
cependant, on peut dire historiquement inédites après trente
ou quarante ans d'exposition publique.

Il est d'usage d'admirer à Venise certains dessins attribués
universellement à Raphaël; et c'est justice, car l'Académie des
beaux-arts de cette ville possède quelques œuvres dessinées par
ce maître qui sont indiscutablement d'une fort grande beauté.
Toutes les générations de pèlerins que l'art attire dans les
lagunes de l'Adriatique se sont donc, depuis 1846', religieu-
sement conformées à cette traditionnelle prescription. La con-
signe a même été si bien observée qu'on a prodigué en bloc et
sans discernement des hommages qui auraient dû être réservés
aux seules pièces d'élite. Je demande la permission d'éveiller la

1. Achetés en 1822, les dessins de l'Académie de Venise ont été exposés dès 1846. (P. Selvatico, Catalogo délie opère d'arte conlenute nella sala délie sedute
dell' Accademia di Vene\ia, p. 9 et 13.)

Tome XXI. 2 ;
 
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