DOI Artikel:
Leroi, Paul: Pro Patria
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0339
Cartouche de Du Cerceau.
A Philip Gilbert Hamerton, Esq.,
Rédacteur en chef du Portfolio de Londres.
Mon cher maître, lorsqu'en novembre dernier Londres, Oxford, Cambridge, Manchester,
Liverpool, l'Angleterre tout entière retentirent de protestations indignées contre le projet de soi-
disant restauration de Saint-Marc, vous avez été des premiers à jeter le cri d'alarme et j'ai
lu votre nom au bas d'une des plus éloquentes dénonciations adressées au gouvernement italien
contre le crime artistique dont Venise était menacée.
Toute atteinte portée au patrimoine le plus sacré de l'humanité, à celui que lui ont créé, de
siècle en siècle, le génie des maîtres souverains, vous a pour ennemi-né et redoutable. Votre voix
autorisée ne trouve pas moins d'écho aux États-Unis que dans les Trois Royaumes; des deux
côtés de l'Atlantique on se dispute votre plume. C'est à cette légitime influence conquise par
n L'accord d'un beau talent et d'un beau caractère ».
que je viens faire appel. Lorsque je vous en aurai expliqué le motif, je crois trop bien vous
connaître pour douter un seul instant de votre puissant concours.
A côté de la terre natale pour laquelle tout homme de cœur — sans avoir besoin d'être
soldat — est prêt à donner sa vie à l'heure où la patrie est en danger, il est pour toute âme
qui n'est pas vulgaire, une seconde patrie d'élection qui exerce une fascination irrésistible et
inspire, elle aussi, un attachement filial, une passion que le temps développe chaque jour plus
profonde.
Artiste et lettré, c'est la France qui vous a conquis et vous tient pour l'Anglais le plus
français qui soit en ce monde. L'Italie a remporté force victoires de ce genre; n'a-t-elle pas à
l'infini des cités aux attraits les plus divers? Mais si richement dotées que soient chacune d'elles
et par la nature et par l'art, il n'en est point qui puisse entrer en lutte avec sa capitale
intellectuelle, l'Athénienne Florence, l'idéale initiatrice de cette immortelle Renaissance, mère de
tout le monde moderne.
C'est pour Florence, cette chère seconde patrie, que je m'adresse à vous, c'est pour elle que
A Philip Gilbert Hamerton, Esq.,
Rédacteur en chef du Portfolio de Londres.
Mon cher maître, lorsqu'en novembre dernier Londres, Oxford, Cambridge, Manchester,
Liverpool, l'Angleterre tout entière retentirent de protestations indignées contre le projet de soi-
disant restauration de Saint-Marc, vous avez été des premiers à jeter le cri d'alarme et j'ai
lu votre nom au bas d'une des plus éloquentes dénonciations adressées au gouvernement italien
contre le crime artistique dont Venise était menacée.
Toute atteinte portée au patrimoine le plus sacré de l'humanité, à celui que lui ont créé, de
siècle en siècle, le génie des maîtres souverains, vous a pour ennemi-né et redoutable. Votre voix
autorisée ne trouve pas moins d'écho aux États-Unis que dans les Trois Royaumes; des deux
côtés de l'Atlantique on se dispute votre plume. C'est à cette légitime influence conquise par
n L'accord d'un beau talent et d'un beau caractère ».
que je viens faire appel. Lorsque je vous en aurai expliqué le motif, je crois trop bien vous
connaître pour douter un seul instant de votre puissant concours.
A côté de la terre natale pour laquelle tout homme de cœur — sans avoir besoin d'être
soldat — est prêt à donner sa vie à l'heure où la patrie est en danger, il est pour toute âme
qui n'est pas vulgaire, une seconde patrie d'élection qui exerce une fascination irrésistible et
inspire, elle aussi, un attachement filial, une passion que le temps développe chaque jour plus
profonde.
Artiste et lettré, c'est la France qui vous a conquis et vous tient pour l'Anglais le plus
français qui soit en ce monde. L'Italie a remporté force victoires de ce genre; n'a-t-elle pas à
l'infini des cités aux attraits les plus divers? Mais si richement dotées que soient chacune d'elles
et par la nature et par l'art, il n'en est point qui puisse entrer en lutte avec sa capitale
intellectuelle, l'Athénienne Florence, l'idéale initiatrice de cette immortelle Renaissance, mère de
tout le monde moderne.
C'est pour Florence, cette chère seconde patrie, que je m'adresse à vous, c'est pour elle que