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Burty, Philippe: Silhouettes d'artistes contemporains, [2], J. de Nittis
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0037
SILHOUETTES D'ARTISTES CONTEMPORAINS
J. DE NITTIS
(suite et fin)
n même temps, de Nittis étudiait, paraît-il, les mathé-
matiques avec un goût passionné. On eût pu affirmer
le fait, d'instinct, avant que M. Claretie nous l'eût
révélé. Dans celle de ses études où le pastel a couru le
plus vite, on rencontrera toujours quelque détail presque
géométrique : des toits de maison, un piédestal de statue,
une grille en fer, un parapet de quai, dont la rigueur
de mise en place, la précision d'emmanchement, la
rectitude de jet, trahissent non pas seulement l'adresse
des doigts, mais la justesse de « l'opération » ; en un moment
le cerveau a additionné, soustrait, divisé les distances, les
raccourcis, les fuites, avec la prodigieuse rapidité d'un Henri Mondeux,
résolvant un problème.
C'était tout ce que Nittis avait à demander à cette science. Nulle
addition à faire pour les choses de la vie. Une rave suffisait pour le
déjeuner; un piment doux pour le dîner. Il s'était mis mal avec ses
professeurs en se refusant à copier la peinture des maîtres. Sur ce
point nous lui donnons grandement raison ; la méthode actuelle qui tend
à forcer l'élève à s'assimiler non pas l'esprit supérieur des maîtres,
mais leurs procédés, est tout à fait sénile et blâmable.
Il quitta l'école. Deux ans après, il envoyait à l'exposition
annuelle de Naples une Vue des environs de Barletta, que la Munici-
palité acquit et qui fut donnée à l'hôtel de ville. L'année suivante, un
Paysage dans les environs de Naples fut acquis encore et appartient
au Musée national des peintures modernes. J'ai vu dans son atelier des
études datant de cette époque. Elles sont traitées largement. Peut-être
le petit tableau qui a pris place dans cette exhibition-ci2, la fine Mer dans
les environs de Pompéi, par un temps gris, est-il aussi de ce moment.
Modèle de pendule
composé et gravé par piranesi. En 1867, il exposait pour la troisième fois, et son tableau, Vue de la
traversée des Apennins, prenait place encore dans le musée de Naples.
Si nos peintres ont pris l'habitude d'aller en Italie, les artistes italiens meurent d'envie de venir
à Paris. M. Claretie a raconté avec humour l'odyssée de Nittis quittant son pays pour venir
chez nous, et bien dit les premiers ravissements de Peppino. — Peppino c'est le Nittis de l'intimité,
l'hôte cordial et spirituel de l'avenue du Bois de Boulogne. — En effet ses Études de Parisiennes
étaient bien plus sérieuses et hérissées de difficultés que ne se l'imaginent ces peintres graves
1. Voir l'Art, 6e année, tome II, page 17. ,
2. Comme nous avons été forcé de couper en deux parties l'article de M. Burty sur J. de Nittis, nous devons rappeler que l'exhibition dont
il s'agit ici est celle où sont exposées les œuvres de J. de Nittis, dans les galeries de l'Art, j), avenue de l'Opéra.
Tome XXI. 4
J. DE NITTIS
(suite et fin)
n même temps, de Nittis étudiait, paraît-il, les mathé-
matiques avec un goût passionné. On eût pu affirmer
le fait, d'instinct, avant que M. Claretie nous l'eût
révélé. Dans celle de ses études où le pastel a couru le
plus vite, on rencontrera toujours quelque détail presque
géométrique : des toits de maison, un piédestal de statue,
une grille en fer, un parapet de quai, dont la rigueur
de mise en place, la précision d'emmanchement, la
rectitude de jet, trahissent non pas seulement l'adresse
des doigts, mais la justesse de « l'opération » ; en un moment
le cerveau a additionné, soustrait, divisé les distances, les
raccourcis, les fuites, avec la prodigieuse rapidité d'un Henri Mondeux,
résolvant un problème.
C'était tout ce que Nittis avait à demander à cette science. Nulle
addition à faire pour les choses de la vie. Une rave suffisait pour le
déjeuner; un piment doux pour le dîner. Il s'était mis mal avec ses
professeurs en se refusant à copier la peinture des maîtres. Sur ce
point nous lui donnons grandement raison ; la méthode actuelle qui tend
à forcer l'élève à s'assimiler non pas l'esprit supérieur des maîtres,
mais leurs procédés, est tout à fait sénile et blâmable.
Il quitta l'école. Deux ans après, il envoyait à l'exposition
annuelle de Naples une Vue des environs de Barletta, que la Munici-
palité acquit et qui fut donnée à l'hôtel de ville. L'année suivante, un
Paysage dans les environs de Naples fut acquis encore et appartient
au Musée national des peintures modernes. J'ai vu dans son atelier des
études datant de cette époque. Elles sont traitées largement. Peut-être
le petit tableau qui a pris place dans cette exhibition-ci2, la fine Mer dans
les environs de Pompéi, par un temps gris, est-il aussi de ce moment.
Modèle de pendule
composé et gravé par piranesi. En 1867, il exposait pour la troisième fois, et son tableau, Vue de la
traversée des Apennins, prenait place encore dans le musée de Naples.
Si nos peintres ont pris l'habitude d'aller en Italie, les artistes italiens meurent d'envie de venir
à Paris. M. Claretie a raconté avec humour l'odyssée de Nittis quittant son pays pour venir
chez nous, et bien dit les premiers ravissements de Peppino. — Peppino c'est le Nittis de l'intimité,
l'hôte cordial et spirituel de l'avenue du Bois de Boulogne. — En effet ses Études de Parisiennes
étaient bien plus sérieuses et hérissées de difficultés que ne se l'imaginent ces peintres graves
1. Voir l'Art, 6e année, tome II, page 17. ,
2. Comme nous avons été forcé de couper en deux parties l'article de M. Burty sur J. de Nittis, nous devons rappeler que l'exhibition dont
il s'agit ici est celle où sont exposées les œuvres de J. de Nittis, dans les galeries de l'Art, j), avenue de l'Opéra.
Tome XXI. 4