Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 4)

DOI Artikel:
Tardieu, Charles: Notes sur le Salon de Bruxelles, [1]
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.18880#0031

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
22 L'A

Il avait aussi un morceau très réussi, une étude d'architecture
que l'Art a reproduite d'après un dessin de l'artiste, la Cour
du Palais Vieux, à Florence 4, perspective très juste et peinture
savoureuse dans la gamme des gris et des bruns. Depuis ce
premier succès, je ne me rappelle guère de M. Mellery que des
aquarelles à l'anglaise, des études d'enfants, de petites filles le
plus souvent, bien observées dans leur naïveté, — il en a
une encore à l'exposition de cette année, — et des dessins
à la mine de plomb, notes et croquis d'un piquant effet. Pour-
tant l'année dernière, à la fête du Cercle artistique, on avait
remarqué son Abolition des octrois, pour la vigueur réaliste de
la conception et une singulière bravoure dans l'affirmation des
tons clairs.

Voilà le passé; voyons le présent. M. Mellery se présente
au Salon avec un triptyque de paysages de Spa, le Pays de
Francorchamps, pays étrange où l'air semble faire absolument
défaut, où sol, bâtisses, hommes et bêtes affectent l'aspect
d'une tapisserie à gros grains. La toile qui lui a valu la médaille
est Une Vente à l'encan au xvic siècle. Pourquoi au xvic siècle?
Certainement le « genre historique » est aussi bon qu'un autre
à la condition de n'être pas ennuyeux, mais encore faut-il,
entre l'époque et l'épisode, une relation assez étroite pour
faire du costume un motif logique et non pas une simple fan-
taisie. Je ne vois pas, je l'avoue, de lien nécessaire entre un
siècle aussi caractéristique que le xvic et l'épisode banal
d'une vente à l'encan. Le xvi° siècle n'est ici qu'un prétexte.
On passerait condamnation si les physionomies étaient plus
typiques et l'exécution moins charbonneuse. Les personnages
sont d'ailleurs bien dessinés et adroitement groupés. C'est évi-
demment à ses qualités de dessin et de composition que
M. Mellery doit sa médaille, d'ailleurs généralement approuvée.
Il lui reste, passez-moi le mot, à ramoner sa palette, ce qui
ne lui sera pas difficile, car, après l'Abolition des octrois, cette
vente a l'air d'un paradoxe. Du reste, cet artiste distingué ne
paraît pas encore avoir trouvé sa voie. Il cherche, et dans des
directions différentes, ce point où l'on s'installe en maître,
dominant son art et la nature elle-même. Il trouvera.

La Mort d'un puisatier de M. Emile Sacré est l'une des
sensations du Salon. Encore un chercheur! L'année dernière,
à l'Exposition historique de l'art belge, on avait revu ses trois
Juges, qui, du fond de leur cadre oblong, semblaient écouter
une plaidoirie du spectateur, et se préparer à l'en punir sans
pitié. Cela frisait bien un peu la charge, mais la charge épique
à la Daumier. Et puis c'était peint large et gras, d'une main
aisée et assez puissante. La Mort d'un puisatier n'a pas les
mêmes mérites d'exécution. Facture laborieuse, revue et cor-
rigée, où les repentirs ont laissé des traces; il y a des creux
dans la pâte et la coloration générale est d'un aspect vitreux
qui déconcerte le regard. Mais l'effet n'en est pas moins saisis-
sant. L'agencement de cette scène populaire, humble et poi-
gnante, atteste une sincérité d'émotion qui entraîne la sympa-
thie, en même temps que la composition de cette vaste toile
aux nombreux personnages, grandeur nature, témoigne d'une
énergie d'effort qui impose le respect. Il n'est pas démontré
que le tableau eût perdu à se resserrer dans des proportions
moins héroïques, mais, pour entreprendre de le réaliser dans
le format de la vie elle-même, il fallait un coup de volonté,
une ardeur d'ambition dont il est juste de tenir compte, d'au-
tant que l'artiste a fort intelligemment évité les plus fâcheux
écueils de son programme. Ce drame du travail n'a rien de
théâtral, et tout en se garant de l'affectation déclamatoire qu'im-
pliquent parfois les tentatives du réalisme démocratique et
social, M. Sacré en a évité les trivialités. Est-ce avec intention
que le jury de placement a casé dans la même salle le Vieux
Carrier de M. Roll? Peut-être aura-t-il voulu montrer à

RT.

M. Sacré de quelle touche on peint les gens du peuple, d'au-
tant que la Grève des mineurs du jeune maître français pour-
rait bien avoir impressionné le peintre de la Mort d'un puisa-
tier. Quoi qu'il en soit, M. Sacré a fait un grand pas en avant,
et il y a lieu d'espérer qu'il ne s'arrêtera pas en route.

M. Henri Van Seben : médaille à l'ancienneté. Spécialité
d'hivers et d'effets de neige, en Hollande pour la plupart. Les
premiers ayant eu du succès, il n'y avait pas de raison pour
essayer d'autre chose. L'article est d'ailleurs d'un placement
courant, à des prix modérés mais assez fermement soutenus,
comme on dit en style de mercuriales.

La peinture de M. Jacques Rosseels manque de consis-
tance mais non de physionomie. C'est un paysagiste blond qui
n'est pas sans avoir sa petite individualité. Sa facture un peu
molle a néanmoins du charme et ses défauts mêmes lui font une
signature.

M. Henri Van der Hecht est d'une autre famille. Il a plus
de vigueur, plus de sang dans les veines. Sans le connaître, on
se le figure plus musclé, d'une santé robuste, doué d'instincts
puissants qui, bien réglés, peuvent produire des œuvres non
pas seulement fortes, mais grandes. Un certain air de grandeur
caractérisait en effet son Polder de Kinderdijk, près Dordrecht,
qui a été remarqué à Paris à l'Exposition universelle de 1878
et dont l'artiste a donné un dessin dans l'Art-. Son tableau
du Salon de Bruxelles est d'un tout autre aspect. Il représente
tout simplement Un Verger, au printemps. Le polder de 1878
était un hiver gris et triste, dont l'effet, indépendamment de
la justesse des tonalités, dégagées de toutes les conventions
des hivers de commerce, tenait à l'heureuse combinaison des
lignes des premiers plans avec celles de l'horizon. Un prin-
temps ne saurait ressembler à un hiver, et il faut quelque sou-
plesse dans la force pour se mesurer avec deux thèmes aussi
différents. Ici naturellement le peintre a cherché la fraîcheur;
il s'est complu dans l'analyse des taches vertes et il a fait de
son verger le poème des premiers sourires du soleil, de la
gaieté et de la fécondité naissantes.

Vous rappelez-vous, à l'Exposition universelle de 1878,
dans la section belge, salle des Wauters, quatre petits pan-
neaux de M. Piet Verhaert, d'Anvers? C'était fin d'observa-
tion, d'une touche spirituelle et grasse, intéressant pour les
gens du métier, amusant pour le public. Depuis ce premier
succès, le jeune artiste a voulu développer son talent. Il s'est
essayé dans le portrait, et avec beaucoup d'énergie sinon beau-
coup de distinction.

Cette année il expose une Cour de ferme en Flandre,
tableau plus important, plus étudié, mais d'un effet moins
piquant, malgré tout son mérite, que les bagatelles qui, au
Champ de Mars, avaient attiré sur son nom l'attention des
amateurs. Sa médaille n'en est pas moins légitimement gagnée.
Il y a là quelques-uns des dons qui font les personnalités.

La médaille de M. Jules Lefebvre n'a rien qui vous étonne,
sans doute, et des deux tableaux qui la lui ont conquise, l'un,
sa Fiammetta, vous est connu depuis le Salon de Paris de cette
année. L'autre est sa Madeleine, appartenant à M. Alexandre
Dumas fils, charmante figure, joliment dessinée, et dont le nu
éburnéen est d'une séduction irrésistible. Cette Madeleine-là,
quelle que soit l'intensité de ses pénitences, ne s'est pas désac-
coutumée au désert des eaux de toilette dont s'ablutionnait la
courtisane au temps de ses coupables splendeurs.

L'Élection acharnée, de M. Bokelmann, de Dusseldorf, est
bien du même peintre qui avait à Paris en 1878, dans la sec-
tion allemande, un tableau de mœurs berlinoises, une scène
de Krach financier, comme on en a vu beaucoup tant en Alle-
magne qu'en Autriche après les triomphales illusions de 1871.
Qualités et défauts d'exécution sont identiques, et il n'est pas

1. Voir l'Art, ["année, tome III, page 129.

2. Voir l'Art, 4e année, tome IV, page 277.
 
Annotationen