DOI Heft:
Chronique française
DOI Heft:Nécrologie
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L'ART.
et de sculptures qui est ouverte de une heure à onze heures
du soir, depuis le 20 octobre; la clôture est fixée au
8 novembre.
Le Cercle artistique de la Seine paraît être constitué
dans des conditions qui réunissent tous les éléments d'un
sérieux succès.
— André Gill, de son vrai nom Gosset de Guines, vient
d'être frappé de folie pendant un voyage à Bruxelles. On a
espéré un moment que le mal serait passager, mais un second
accès qui vient de l'atteindre après son retour à Paris ne laisse
aucun espoir.
Ce qui paraît avoir déterminé la crise à laquelle la raison
d'André Gill vient de succomber, c'est une grande déception
qu'il avait éprouvée.
Au commencement de cette année il entra en pourparlers
pour la confection à Bruxelles d'un panorama sur les recettes
duquel il devait avoir un tant pour cent. Un moment il crut
l'affaire sûre et se vit enfin à la tête d'une aisance certaine.
Puis les pourparlers furent rompus et son esprit en resta for-
tement frappé.
11 s'était mis à peindre depuis quelques années et il avait
encore envoyé deux tableaux au dernier Salon.
Il avait publié l'année dernière, sans nom d'auteur et en
collaboration avec M. Gramont, un volume de vers : La Muse
à Bibi.
Un second volume de vers de lui est en ce moment sous
presse chez Charpentier.
Voici un sonnet écrit par Gill quelques instants avant
le moment où la folie l'a atteint :
WATERLOO
Ce n'est plus aujourd'hui qu'une très morne plaine,
Où le rare passant, d'histoire halluciné,
Trouvant la terre grasse et gluante, étonné,
S'imagine enfoncer dans de la chair humaine.
Des corbeaux, des champs ras. Un guide suranné,
Qui vous parle de Thiers et de Hugo, qui trtlne
Un bâton, de cent sous pour l'Anglais, mais donné
Pour dix à nous, Français, qui n'eûmes pas de veine.
Un lion béte. Au loin, une icrme où picore
Une poule. Du vent, des pas; peut-être encore
Le musée où l'on voit, sous un casque fendu,
Rire les dents d'un mort broyé dans la tourmente.
Par trois fois, j'ai crié, d'une voix éclatante :
Napoléon! L'écho ne m'a pas répondu.
André Gill.
— Sur les instances de la Société académique indo-chi-
noise, le ministre de l'instruction publique vient de charger
d'une nouvelle mission en Indo-Chine M. le lieutenant de
vaisseau, Louis Delaporte, le compagnon de M. de Lagrée
dans l'exploration du Mekhong, et le chef de cette exploration
des ruines du Cambodge qui a rapporté les éléments de ce
curieux musée Khmer installé au Trocadéro.
M. Delaporte est assuré du concours du ministre de la
marine et du gouverneur de la Cochinchine. Il est accompagné
de M. Faraut, ingénieur, qui l'a déjà suivi dans sa précédente
exploration, et d'un certain nombre de dessinateurs, d'ingé-
nieurs, de photographes et de mouleurs.
Il se propose de pénétrer, aussi profondément que possible,
dans les forêts de l'ancien Cambodge, qui recèlent les ruines
Khmers, de visiter les monuments inexplorés, de dresser des
plans, d'organiser des fouilles, d'étudier les matériaux employés,
leur appareillage, le mode de construction des murs et des
voûtes, les procédés décoratifs, de reproduire les bas-reliefs,
de dessiner et de photographier les plus remarquables mor-
ceaux d'architecture, de relever les inscriptions et de réunir
les éléments d'un grand travail d'ensemble.
Les membres de la mission se sont embarqués à Toulon
sur le dernier transport en partance pour Saigon, et M. Dela-
porte vient de quitter Marseille par le dernier paquebot.
— La réouverture de l'Ecole spéciale d'architecture, bou-
levard du Montparnasse, 136, aura lieu le 10 novembre
prochain. Cette école est spécialement organisée pour la
préparation aux carrières qui se rattachent à la profession
d'architecte. Son programme s'approprie notamment aux
conditions et aux examens ou concours qui donnent accès
aux positions d'architecte de municipalité, d'arrondissement
ou de département.
NÉCROLOGIE
— On annonce la mort, à l'âge de soixante-douze
ans, d'un disciple de M. Ingres, M. Romain Cazes, qui
avait obtenu une médaille de 3e classe au Salon de i85<j,
et été nommé chevalier de la Légion d'honneur en 1870,
une de ces nominations qui se font à l'ancienneté.
M. Cazes, homme fort honorable, était un peintre mé-
diocre, comme tous les élèves de M. Ingres, Hippolyte
Flandrin excepté.
— Le 27 septembre est mort, à Londres, à l'âge de
vingt-neuf ans, M. Arthur Hkrbkrt Jackson, musicien
distingué, qui était professeur d'harmonie et de compo-
sition à la Royal Academy 0/ Music.
— Le sculpteur italien Rafaki.o Monti vient de mourir
à Londres à l'âge de soixante-trois ans. Il était né à
Milan en 1818, et était élève de son père Gaetano Monti,
de Ravenne, à l'Académie impériale de Milan, où il obtint
une médaille d'or pour un groupe représentant Alexandre
domptant Bucéphale. Appelé en 1838 à Vienne, il fut très
protégé par la cour impériale et exécuta un grand nombre
d'œuvres dont quelques-unes furent placées dans sa ville
natale. Il joua un instant un rôle politique à Milan, au
moment du soulèvement de 1848, devint un des chefs de
la garde nationale milanaise et fut chargé d'une mission
auprès de Charles-Albert. Après le triomphe de l'Autriche,
il se réfugia en Angleterre, où son talent original lui valut
une grande popularité. Parmi les œuvres qu'il exécuta à
Londres, on cite une Vestale voilée et une Eve après le
péché. Plusieurs statues sculptées par lui ornent le Palais
de Cristal.
Le Directeur-Gérant : EUGÈNE VÉRON.
L'ART.
et de sculptures qui est ouverte de une heure à onze heures
du soir, depuis le 20 octobre; la clôture est fixée au
8 novembre.
Le Cercle artistique de la Seine paraît être constitué
dans des conditions qui réunissent tous les éléments d'un
sérieux succès.
— André Gill, de son vrai nom Gosset de Guines, vient
d'être frappé de folie pendant un voyage à Bruxelles. On a
espéré un moment que le mal serait passager, mais un second
accès qui vient de l'atteindre après son retour à Paris ne laisse
aucun espoir.
Ce qui paraît avoir déterminé la crise à laquelle la raison
d'André Gill vient de succomber, c'est une grande déception
qu'il avait éprouvée.
Au commencement de cette année il entra en pourparlers
pour la confection à Bruxelles d'un panorama sur les recettes
duquel il devait avoir un tant pour cent. Un moment il crut
l'affaire sûre et se vit enfin à la tête d'une aisance certaine.
Puis les pourparlers furent rompus et son esprit en resta for-
tement frappé.
11 s'était mis à peindre depuis quelques années et il avait
encore envoyé deux tableaux au dernier Salon.
Il avait publié l'année dernière, sans nom d'auteur et en
collaboration avec M. Gramont, un volume de vers : La Muse
à Bibi.
Un second volume de vers de lui est en ce moment sous
presse chez Charpentier.
Voici un sonnet écrit par Gill quelques instants avant
le moment où la folie l'a atteint :
WATERLOO
Ce n'est plus aujourd'hui qu'une très morne plaine,
Où le rare passant, d'histoire halluciné,
Trouvant la terre grasse et gluante, étonné,
S'imagine enfoncer dans de la chair humaine.
Des corbeaux, des champs ras. Un guide suranné,
Qui vous parle de Thiers et de Hugo, qui trtlne
Un bâton, de cent sous pour l'Anglais, mais donné
Pour dix à nous, Français, qui n'eûmes pas de veine.
Un lion béte. Au loin, une icrme où picore
Une poule. Du vent, des pas; peut-être encore
Le musée où l'on voit, sous un casque fendu,
Rire les dents d'un mort broyé dans la tourmente.
Par trois fois, j'ai crié, d'une voix éclatante :
Napoléon! L'écho ne m'a pas répondu.
André Gill.
— Sur les instances de la Société académique indo-chi-
noise, le ministre de l'instruction publique vient de charger
d'une nouvelle mission en Indo-Chine M. le lieutenant de
vaisseau, Louis Delaporte, le compagnon de M. de Lagrée
dans l'exploration du Mekhong, et le chef de cette exploration
des ruines du Cambodge qui a rapporté les éléments de ce
curieux musée Khmer installé au Trocadéro.
M. Delaporte est assuré du concours du ministre de la
marine et du gouverneur de la Cochinchine. Il est accompagné
de M. Faraut, ingénieur, qui l'a déjà suivi dans sa précédente
exploration, et d'un certain nombre de dessinateurs, d'ingé-
nieurs, de photographes et de mouleurs.
Il se propose de pénétrer, aussi profondément que possible,
dans les forêts de l'ancien Cambodge, qui recèlent les ruines
Khmers, de visiter les monuments inexplorés, de dresser des
plans, d'organiser des fouilles, d'étudier les matériaux employés,
leur appareillage, le mode de construction des murs et des
voûtes, les procédés décoratifs, de reproduire les bas-reliefs,
de dessiner et de photographier les plus remarquables mor-
ceaux d'architecture, de relever les inscriptions et de réunir
les éléments d'un grand travail d'ensemble.
Les membres de la mission se sont embarqués à Toulon
sur le dernier transport en partance pour Saigon, et M. Dela-
porte vient de quitter Marseille par le dernier paquebot.
— La réouverture de l'Ecole spéciale d'architecture, bou-
levard du Montparnasse, 136, aura lieu le 10 novembre
prochain. Cette école est spécialement organisée pour la
préparation aux carrières qui se rattachent à la profession
d'architecte. Son programme s'approprie notamment aux
conditions et aux examens ou concours qui donnent accès
aux positions d'architecte de municipalité, d'arrondissement
ou de département.
NÉCROLOGIE
— On annonce la mort, à l'âge de soixante-douze
ans, d'un disciple de M. Ingres, M. Romain Cazes, qui
avait obtenu une médaille de 3e classe au Salon de i85<j,
et été nommé chevalier de la Légion d'honneur en 1870,
une de ces nominations qui se font à l'ancienneté.
M. Cazes, homme fort honorable, était un peintre mé-
diocre, comme tous les élèves de M. Ingres, Hippolyte
Flandrin excepté.
— Le 27 septembre est mort, à Londres, à l'âge de
vingt-neuf ans, M. Arthur Hkrbkrt Jackson, musicien
distingué, qui était professeur d'harmonie et de compo-
sition à la Royal Academy 0/ Music.
— Le sculpteur italien Rafaki.o Monti vient de mourir
à Londres à l'âge de soixante-trois ans. Il était né à
Milan en 1818, et était élève de son père Gaetano Monti,
de Ravenne, à l'Académie impériale de Milan, où il obtint
une médaille d'or pour un groupe représentant Alexandre
domptant Bucéphale. Appelé en 1838 à Vienne, il fut très
protégé par la cour impériale et exécuta un grand nombre
d'œuvres dont quelques-unes furent placées dans sa ville
natale. Il joua un instant un rôle politique à Milan, au
moment du soulèvement de 1848, devint un des chefs de
la garde nationale milanaise et fut chargé d'une mission
auprès de Charles-Albert. Après le triomphe de l'Autriche,
il se réfugia en Angleterre, où son talent original lui valut
une grande popularité. Parmi les œuvres qu'il exécuta à
Londres, on cite une Vestale voilée et une Eve après le
péché. Plusieurs statues sculptées par lui ornent le Palais
de Cristal.
Le Directeur-Gérant : EUGÈNE VÉRON.