L' art: revue hebdomadaire illustrée (7.1881 (Teil 4))

280

L'ART.

grands progrès; l'importante décoration à laquelle il travaille
pour l'Hôtel de Ville de Dieppe est un effort considérable et
s'annonce de manière à devoir faire honneur au jeune artiste.

XXIII

La tribune que l'on avait organisée à l'étage et qui était
la légitime glorification des maîtres décédés de l'école fran-
çaise moderne, a pris de notables développements pendant
la durée de l'Exposition et a fait entrer au Musée Wicar
quelques-uns des meilleurs dessins de Raffet et de Henri Re-
gnault.

Millet, ce maître enfin si apprécié, Millet dont M. Gustave
Greux vient de graver en fac-similé, pour l'Art, le superbe
dessin de la Rentrée du troupeau, Millet avait à Lille trois
morceaux hors de pair : une aquarelle, la Gardeuse de mou-
tons, un dessin rehaussé de pastel, Mon enfant, et un pastel,
Baigneuses, morceau rustique d'un caractère extraordinaire
et que le Musée Wicar s'est hâté de conquérir. Un des jeunes
artistes que Millet a évidemment le plus et le mieux impres-
sionnés, en ce sens qu'il a appris de lui l'art de dessiner en
donnant du caractère au moindre croquis, et un caractère bien
personnel, ce qui est le meilleur hommage à rendre à Millet,
M. Norbert Goeneutte a terminé pour notre Revue des dessins
où l'étude des populations maritimes se traduit en quelques
traits pleins de tournure, comme chez M. Ulysse Butin; Au
Tréport en est un premier exemple.

Dans les derniers jours, un paysage de Courbet, bien supé-
rieur à tout ce qui vient d'être vendu de lui à l'Hôtel Drouot,

1 avait été reçu au Palais Rameau, et comptait au nombre des
meilleures œuvres de la tribune.

XXIV

Un des membres de la commission, M. H. Faure, qui, bien
que s'intitulant simple amateur, grave lui-même avec un très
réel talent, M. Faure avait organisé con amore la section
réservée à la gravure représentée par la quantité et la qualité.
Puisque j'y ai retrouvé M. Lucien Gautier avec sa planche de
début : le Petit-Bras de la Seine, le 3 janvier i88r, je ne
saurais laisser échapper l'occasion de lui dire qu'il se repose
trop sur cet éclatant succès. Ses deux dernières planches : la
Place Maubert et le Quai Jemmapes, ont incontestablement
beaucoup de puissance, mais aussi quelque peu d'uniformité;
je le renvoie à son Petit-Bras de la Seine, il y retrouvera une
lumière dont il fera sagement de garder fidèle souvenir.

XXV

Mes compliments à la Municipalité lilloise. On ne lui
reprochera pas de se reposer sur les lauriers de son Expo-
sition des Beaux-Arts. Celle-ci vient à peine de se fermer que
le maire fait publier le programme d'une Exposition des arts
industriels 1 qui s'ouvrira au Palais Rameau en 18S2. Lille
mérite une fois de plus d'être cité comme exemple. Je lui
souhaite de très nombreux imitateurs.

Paul Leroi.

UN PORTRAIT DE FERDINAND GAILLARD

Il s'agit d'une des œuvres les plus remarquables de ce temps, d'un de ces portraits tels que les étudiait, que les fouillait, que
les faisait vivre Holbein, morceau absolument hors de pair et dont la famille n'a cependant plus voulu après le décès du modèle,
sous prétexte que M. Gaillard ne l'avait pas suffisamment embelli. L'éminent peintre-graveur s'inquiète fort peu de faire pleasing,
mais beaucoup d'être absolument vrai, en artiste qui a par-dessus tout le respect de son art; aussi a-t-il très philosophiquement
repris le Portrait de Monseigneur de Se'gur, pour en orner son atelier. Un de ses élèves, M. E. Burney, a reproduit au bu'in cette
magistrale peinture et l'Art a acquis cette belle planche pour ses abonnés.

t. Ce n'est pas seulement une exposition locale ou régionale qu'organise la Municipalité lilloise, c'est une Exposition internationale d'art industriel,
ce qui vaut infiniment mieux. L'ouverture aura lieu le i5 mars 1882 au Palais Rameau. Je ne saurais trop engager les organisateurs à faire large place à l'art
décoratif et à l'annoncer immédiatement.

Le Directeur-Gérant .-EUGÈNE VÉRON.