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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 4)

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Conti, Cosimo: Découverte de deux fresques de Sandro Botticelli
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https://doi.org/10.11588/diglit.18880#0102

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DÉCOUVERTE DE DEUX FRESQUES DE SANDRO BOTTICELLI.

87

dans leur parti après le mariage de Piero, fils de Cosme le
vieux, avec Lucrezia, fille de Francisco Tornabuoni, et depuis
mère de Laurent le Magnifique. La proximité de Caregai fait
supposer que les deux familles recherchaient leur voisinage
réciproque pour goûter les plaisirs de la campagne, et le fait
que Pierre de Médicis servit d'intermédiaire dans l'acquisition
de cette villa en est une preuve manifeste. Ce fut aux
Tornabuoni que la villa dut les embellissements considérables
où l'on reconnaît en beaucoup d'endroits la main de Miche-
lozzi, auteur de leur palais de Florence, et architecte auquel
les Médicis eurent sans cesse recours pour leurs colossales
entreprises.

La villa se compose de deux corps de bâtiments réunis
par un vaste Corlile. A droite, une loggia à trois arcades, avec
colonnes et chapiteaux d'un style sévère, signale cette partie
comme la plus ancienne de l'édifice.

Après avoir rapidement émis ces remarques générales dont
l'occasion se présentait naturellement, nous allons parler des
peintures et de leur auteur.

Elles se trouvent au premier étage, en face de la loggia ;
on y arrive par un large escalier d'une construction de beau-
coup postérieure et qui ne remonte guère qu'à la fin du
xvii° siècle ; il a peut-être remplacé un escalier primitif conçu
dans des proportions plus modestes.

La salle qui contient les peintures est de médiocres
dimensions et, bien qu'elle soit aujourd'hui absolument sous
1j toit, on y reconnaît pourtant les traces évidentes d'un
plancher qui devait permettre l'établissement d'une soupente
ou galetas destiné à mieux protéger les peintures et la déco-
ration de la salle.

Nous voici donc en présence des fresques.

L'une à côté de l'autre, sur le même mur extérieur de
l'édifice et séparées seulement par une petite fenêtre, qui fut
construite dès l'origine, apparaissent les deux peintures qu'on
vient de découvrir. Toute la salle était probablement décorée
de peintures ; mais on n'a pu retrouver sur' l'autre mur que
les débris d'une troisième fresque, dont nous nous occuperons
aussi ; pour le reste, tous les soins, toutes les tentatives n'ont
amené aucune autre découverte.

On pourrait poser ici un grand nombre de questions :
demander, par exemple, comment il a pu arriver que des
peintures d'une telle importance aient été badigeonnées ; à
quelle époque ce fait a dû se produire ; enfin, par quelle
heureuse fortune ces œuvres si intéressantes ont reparu au
grand jour.

La meilleure réponse à ces questions se trouve dans ce
que nous avons dit en commençant du peu de cas qu'on a fait
jusqu'à nos jours des travaux des artistes du xv° siècle. Le mau-
vais état de la soupente en rendit peut-être la démolition
nécessaire, et ce badigeonnage barbare aurait été dès lors
inspiré par le désir de donner aux murs de la salle une teinte
uniforme et, ce qui montre bien que cet acte de vandalisme
n'est pas fort ancien, c'est la ténuité de la couche de blanc qui
recouvre les parties peintes.

Dans quelles circonstances a eu lieu cette découverte 1 ?

C'est par le pur effet du hasard. Quelques crevasses, remar-
quées çà et là sur les murs, ayant donné l'éveil, ont fait naître
l'idée de les racler avec l'ongle ; dès qu'on vit apparaître les
traces de diverses couleurs, on procéda avec soin au nettoyage
et l'on finit par découvrir d'abord les habits et enfin la tête d'une
jeune fille groupée avec une autre figure auprès d'une fontaine.
C'est celle qu'on voit au côté gauche de la première fresque

1. Cette découverte eut lieu au mois de septembre 1S73.

que l'on rencontre en entrant. Dès qu'on eut constaté qu'il
existait des peintures, les recherches s'étendirent sur le reste
de ce mur et sur tous les autres avec une attention plus suivie
et une dextérité de main accrue par l'expérience. Malgré tout
cela, malheureusement, on ne put empêcher que le résultat
ne fût pour la seconde fresque sensiblement inférieur à ce
qu'il avait été pour la première. Il faut, du reste, l'attribuer à
des causes purement matérielles, et non pas à la négligence
ou à la maladresse des opérateurs. Et l'on doit ajouter, à notre
avis, qu'il y avait probablement dans cette seconde fresque
une plus grande quantité de retouches faites en détrempe, qui
suivaient la couche de blanc à mesure qu'on la détachait.

Peut-il y avoir un doute sur l'auteur de ces fresques i
Nous pensons qu'il serait aussi facile de prendre le soleil pour
la lune ou de l'hébreu pour du latin que de demeurer dans
l'incertitude en présence d'une peinture de Botticelli. Tout
connaisseur, même médiocre, de l'école florentine de 1400,
n'aurait besoin, pour le reconnaître, que d'en voir une tête et
même un pied ou une main. Le peintre a fait constamment
usage d'un type de figure qui n'appartient qu'à lui et, par
l'arrangement des plis comme par le caractère particulier des
coiffures, par le dessin des mains, toujours nobles et effilées,
et des pieds légèrement posés sur le sol, on peut le distinguer
entre mille.

Aussi le docteur Lemmi eut-il à peine montré à deux pro-
fesseurs, M. le commandeur Antonio Cisero et M. le chevalier
Gaetano Bianchî, ce morceau de peinture qu'il venait d'exhu-
mer de la couche de blanc qui la couvrait, que ces messieurs
furent d'accord pour y reconnaître la main de Botticelli et,
parmi tant d'artistes et de connaisseurs italiens ou étrangers,
personne n'a osé élever un doute à rencontre de cette paternité.
Ce fut alors que, d'après les conseils des artistes ci-dessus
mentionnés, M. Lemmi poursuivit sa tâche et amena le
nettoyage au point où il est aujourd'hui.

Pour donner plus de valeur au jugement qui vient d'être
porté, il sera bon de faire connaître :

iu Qui a commandé ces peintures à Botticelli ;

•2» Quels sont les sujets qu'elles représentent.

Les renseignements rassemblés par le docteur Lemmi
sont, en ce qui concerne le premier point, basés sur des
documents incontestables. Nous ne pouvons donc mieux faire
que de les reproduire.

Les dates chronologiques qui doivent servir de point
d'appui sont les suivantes: Botticelli vécut de 1447 à 1 5 10, et
la villa appartint aux Tornabuoni depuis 1460 jusqu'en 1541.
C'est donc à eux qu'il faut attribuer la gloire d'avoir fait la
commande des peintures. De plus, l'histoire nous apprend que
Lorenzo, fils de Giovanni Tornabuoni, épousa, en i486, Gio-
vanna, fille de Maso de Licca de la famille des Albizzi, et que ce
mariage eut lieu par l'entremise de Laurent le Magnifique. L'Am-
mirato raconte que les noces furent célébrées par des fêtes
privées et publiques d'une magnificence extraordinaire ; il est
dès lors aisé d'en conclure que les fresques furent faites à l'occa-
sion de cette heureuse alliance.Telle du moins l'espérait-on alors,
quoique les suites aient bien trompé cet espoir, car Giovanna
mourut en couches après avoir mis trois fils au monde, et
Lorenzo, ayant pris part à une conjuration dont le but était
de rétablir dans Florence le pouvoir des Médicis, alors exilés,
fut décapité à trente-deux ans, dans la nuit du 21 août 1497.
Ces renseignements ne pouvaient être négligés si l'on veut
bien connaître la matière que nous traitons.

(La fin prochainement.) COSIMO CoNTl.
 
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