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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

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Robaut, Alfred: Peintures décoratives d'Eugène Delacroix au Salon du Roi ou Salle des Fleuves (Palais de la chambre des député)
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https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0140

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I 12

L'ART.

L'exécution : rien de plus intelligent et de plus spirituel. La facilité est prodigieuse, tout
semble fait avec allégresse, toujours au premier coup, sans la moindre peine. Cette exécution, on
ne la remarque à la vérité que dans les parties à portée du regard, c'est-à-dire dans les figures
peintes en grisaille, où l'artiste a figuré, sous des aspects si variés, les fleurs et les mers. Par
le caractère du dessin un peu contourné, il semble qu'il ait voulu exprimer les sinuosités
incessantes, les capricieuses irrégularités de leur parcours et rendre vivants, autant que possible,
les signes conventionnels adoptés par les géographes pour les représenter. On retrouve là ces
belles hachures courtes et rompues ou bien ce martelage gras et souple, qui accuse l'effet
pittoresque des os et des muscles, en laissant jouer constamment la préparation des dessous. On
en garde la sensation d'un travail de sculpteur où l'outil aurait marqué son empreinte. Théophile
Gautier l'a dit en d'autres termes : « Les personnages de Delacroix ont sur leur contour un
flamboiement perpétuel, comme un tremblement lumineux d'atmosphère; une ligne inflexible ne
les attache pas à leurs fonds; ils sont peints aussi de l'autre côté, et pourraient se retourner, s'ils
le voulaient ». Il nous souvient à ce propos qu'après sa mort, plusieurs statuaires ses contemporains
qui eux-mêmes ne sont plus, hélas! Barye, Préault, Carpeaux, disaient en voyant ses dessins
reproduits en fac-similé 1 : « Mais nous ne connaissions pas Delacroix ! il était encore plus
sculpteur que peintre ! »

Qu'on examine en effet un morceau quelconque de ces figures colossales, une main, un pied
par exemple, et l'on sera forcé d'avouer que Michel-Ange lui-même n'aurait pas autrement taillé
dans le marbre.

Michel-Ange, lui aussi,, fut une des grandes admirations, un des maîtres de Delacroix, qui
écrivit une étude spéciale sur le grand artiste florentin [Revue de Paris, t. XV, 1830). Le maître
français terminait cette étude par ces lignes qu'il faut répéter chaque fois qu'on a parlé de celui
qui les traça : « Ébloui de l'éclat d'un si grand génie et regrettant d'en avoir donné une si faible
idée, c'est bien à lui que nous devons appliquer ce qu'il disait lui-même du Dante clans ces vers :

Quanto dirne si dee non si puo dire !

Et c'est parce que la France peut être fière de posséder de tels chefs-d'œuvre qu'elle devrait
les montrer à tous, et principalement à ceux de nos artistes qui n'ont pas le bonheur de pouvoir
aller aux sources réputées uniques de la grande peinture italienne, afin qu'ils puissent contempler
ces pages sublimes, s'en instruire et s'en inspirer. Ce serait du moins pour eux une fortifiante
compensation.

Alfred Robaut.

1. Soixante-dix fac-similés de dessins et croquis originaux d'Eugène Delacroix. Chez l'auteur, rue Lafayette, 115. — Les peintures du
Salon du Roi, reproduites en lithographie, feront partie du Salon de 1880. On sait comment M. Robaut sait rendre avec le crayon lithogra-
phique l'eftet des peintures de Delacroix. Nous ne pouvons mieux faire que de renvoyer à ce que disait notre collaborateur Paul Leroi, à
propos de l'exposition de M. Robaut au Salon de 1879. (Voir VArt, 5e année, tome III, p. 116.)

Têtes de Marocains.
Croquis de Delacroix, pris à Tanger en 18j2, et placé par lui dans le panneau de la Justice.
 
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