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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

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Le Blanc du Vernet, ...: L' art japonais, [2]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0312

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2f2 L'ART.

depuis les doctrines spiritualistes de Lao-Tseu et les préceptes rationalistes de Confucius, jusqu'aux
niaiseries niveleuses du socialisme et du nihilisme.

L'art chinois, jadis si florissant, est tombé dans la torpeur. Les spécimens artistiques des
époques glorieuses de ce pays deviennent rares et ont droit à une admiration sans bornes.

La céramique chinoise était déjà appréciée par les Romains, car il paraît que les vases
« murrhins » étaient en porcelaine de Chine, dont les oxydes colorants ont tant de magie, et
Pline rapporte que Néron paya un de ces vases la somme énorme de trois cents talents, qui
équivaudrait à près de deux millions de notre monnaie.

Les habitants de la Fleur du Milieu prétendent que c'est sous le règne de Hien-Youang,
. surnommé Hoang-Ti, — l'Empereur jaune, — près de trois mille ans avant notre ère, que fut
découvert chez eux le secret de la fabrication de la porcelaine ou jade factice, qui devint
ultérieurement un art, qu'on a considéré longtemps comme le produit d'un travail occulte et
mystique. Quoi qu'il en soit, il est certain que leur céramique est hors de prix. Le « ting-khi »,
ou porcelaine blanche par excellence, imite le jade oriental, d'un blanc velouté comme les
pétales du magnolia; le « céladon » vert pâle, rappelant les feuilles du saule et du pêcher,
imite le jade vert.

Les Célestes ont excellé dans les travaux lapidifiques. Ils n'ont pas d'émules dans la taille
des cristaux de roche, du lapis-lazuli, des sardoines, des onyx, des calcédoines, des améthystes,
dont j'ai possédé un vase inouï imitant une énorme fleur de lotus, et nul lapidaire n'a taillé comme
eux le jade, qui est leur pierre de prédilection.

Toutes ces pierres précieuses, généralement talismaniques pour les Orientaux, ont leurs
séductions, mais comme elles relèvent plutôt de l'industrie que de l'art, les raffinés n'y attachent
pas plus d'importance qu'aux céramiques, qui se trouvent dans le même cas.

Les Chinois ont enseigné l'art de laquer aux Japonais, qui ont dépassé leurs maîtres dans
cet art ésotérique. 11 existe cependant d'anciens laques de Chine d'une splendeur insensée, dont
les spécimens sont presque introuvables. Je ne fais pas ici allusion aux vulgaires laques rouges
de Pékin, mais à une qualité spéciale dont j'ai sous les yeux un échantillon incomparable et
probablement unique en Europe, au dire des connaisseurs. C'est une grande boîte de provenance
impériale, qui doit remonter à une antiquité très reculée, à laquelle il ne m'est pas possible
d'assigner une date précise. Le décor de cette boîte a l'aspect d'un cuir de Cordoue. Sur un fond
mordoré, étoilé de perles fines, se déroulent, avec l'éclat amorti et caressant de vieux joyaux, des
rinceaux, des fleurs, des « fong-hoangs » en burgau, aux ailes éployées, et des armoiries d'or,
dans lesquelles figure le pingouin héraldique. On sait que le « fong-hoang », l'oiseau sacré,
antique emblème des empereurs de la Chine, est devenu celui des impératrices, depuis que les
empereurs ont adopté officiellement le dragon à cinq griffes, qui symbolise l'esprit de l'air et des
montagnes, d'où est sortie la première souche de la race jaune.

Les cloisonnés chinois ont une supériorité marquée sur tous les cloisonnés connus. J'en
possède un intéressant spécimen de l'époque des Mings. C'est un brûle-parfums dont la forme
rappelle celle des ciboires byzantins. Sur un fond bleu turquoise courent des ornements rouges,
jaunes, vert clair, vert sombre, bleu foncé, ainsi que des chauves-souris, d'une envergure
paraclétyque, le tout d'un émail plus somptueux que les plus riches brocarts. La chauve-souris,
si usitée dans l'ornementation orientale, est un des signes de la longévité, comme les « king-yu »
ou poissons enlacés symbolisent la fidélité.

Les Célestes n'ont pas de rivaux pour les incrustations d'argent sur bois de fer. Les grecques
et les arabesques qu'ils ont jadis niellées avec une précision féerique, sur ce bois réfractaire,
sont d'un goût exquis, mais ils ont depuis longtemps perdu le secret de ces travaux et les
modernes ne peuvent même pas restaurer habilement les œuvres avariées de leurs ancêtres.

J'ai signalé ailleurs1 deux « kakémonos » représentant le Paradis et l'Enfer bouddhiques. Ce
sont des miniatures sur soie, exécutées en 1260, par le bonze Kon-Fa-Ta-Cheu, à la requête de

1. Le Japon artistique et littéraire. A. Lemerre, éditeur.
 
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