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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

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Goncourt, Edmond de: La maison d'un artiste au XIXe siècle, [4]: les portraits gravés de femmes du XVIIIe siècle
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https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0326

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266

L'ART.

les répertoires doivent exister quelque part1; ferait la lumière en ces anonymes, comme la
petite femme de Boucher qui lit les lettres d'Héloïse et d'Abeilard, la femme de Carmontelle qui
brode au tambour, et cette autre du même qui est enfoncée dans les aphorismes d'Hippocrate,
comme la femme de Cochin qui fait un médiateur; retrouverait enfin, avec la connaissance de
toutes les pièces de vers du temps, dédiées au « Beau Sexe », le nom de telle ou telle femme,
ainsi que pour tel portrait de Houel et de tant d'autres.

Complétons cette étude des portraits des femmes du temps, par un travail sur les portraits
d'actrices, et commençons par l'Opéra en faisant suivre le Chant par la Danse.

Sophie Arnould, actrice de l'Académie royale de Musique, dans le rôle de Zyrphé du ballet
de Zélindor. Peinte par La Tour, gravée par la Richardière. La spirituelle chanteuse est
représentée avec l'éclair de ses beaux yeux implorants dirigés vers le ciel et avec cette bouche
entr'ouverte et douloureuse sur laquelle meurt une dernière prière.

Hte Aide Beaumenil, de l'Acad10 R'e de Musique, pensionnaire du Roi. Dessinée ad vivum par
Pujos, gravée par Vidal, en manière noire. Elle a de jolis yeux étonnés, un petit nez pointu, une
bouche aux coins relevés, une physionomie futée où rit une gaieté maligne, sous une haute
coiffure aux coques crespelées et couronnée d'une guirlande de roses. Et M"e Beaumesnil se voit
ainsi dans un médaillon entouré du serpentement de brindilles de lierre, avec au bas de son
portrait la partition ouverte de l'opéra de « Tibulle et Délie », et ces vers :

Est-ce une Muse, est-ce une Grâce,
Qui tient la lyre d'Apollon ?

C'est toutes deux. Tibulle en instruit le Parnasse
Et Beaumenil leur a prêté son nom.

Rosalie Duplant, de l'Académie royale de musique, reçue en 1762. Dessinée par Leclerc,
gravée par Elluin. Un long cou, un long nez busqué, une longue figure qui a quelque chose
d'une tête de cheval, telle apparaît, malgré sa réputation de beauté, le premier sujet à baguette
de l'Opéra, dans l'estampe qui la montre sous le costume qu'elle portait dans « Pyrame et
Thisbé », vêtue d'un vestinquin bordé de fourrure, en un médaillon au bas duquel un masque
tragique est posé sur une torche enflammée.

«La D"° Lemaure2. Problème d'Opéra, 1740.» C'est une rare estampe satirique inspirée par
les accès de religiosité de la libertine chanteuse. Elle est dessinée à moitié vêtue en reine d'opéra,
à moitié vêtue en religieuse, et d'un côté un homme d'église la déshabille de sa robe de théâtre,
et de l'autre Thuret, le directeur de l'Académie lyrique et un galant, sa bourse à la main, la
déshabillent de sa robe de nonne. Et dans l'appartement sont mêlés et confondus les opéras de
Pancrace Pèlerin et les Hymnes de l'abbé Bizot, et en dépit d'un grand tableau qui montre
un diable perçant de sa fourche la Luxure terrassée, sur la toilette dont le tapis est relevé par
un bidet, sont étalées les « Poésies gaillardes » de l'abbé de Lagarde. A cette imagerie est
jointe une lettre « écrite à MUo Lemaure, par un abbé de ses amis », qui, lue, pliée en deux, au
moyen de la dernière syllabe de la demi-page et de la première syllabe de la ligne suivante,
prend le sens le plus obscène.

Mllc Rosalie Levasseur , de l'Académie royale de musique , pensionnaire du Roi, née à
Valenciennes. Dessinée et gravée par Pruneau, d'après le buste de Dumont, de Valenciennes. Un
front extraordinairement bombé, un œil impudent, un rictus dédaigneux de la bouche, un ensemble
de traits populaciers à l'image de sa voix, ainsi caractérisée par la méchante langue de Sophie

1. Me trouvant aux Riceys, j'ai essayé, mais inutilement, de retrouver chez un descendant de Quenedey le répertoire du portraitiste au
physionotrace. M. Richard, l'ancien conservateur de la Bibliothèque et le gendre de Quenedey, possédait, disait-on, une copie de ce répertoire,
mais il n'a pas été publié, et je ne sais ce qu'il est devenu après sa mort.

2. « Teint noir, grosses lèvres, dents blanches », dit de la Lemaure un logogriphe de 1744.
 
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