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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 6.1880 (Teil 2)

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Goncourt, Edmond de: La maison d'un artiste au XIXe siècle, [5]: les portraits gravés de femmes du XVIIIe siècle
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https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0354

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294 L'ART.

« Par ses talents, sa grâce naturelle.» (Portrait de Mmo Favart.) Dessinée par Garaud, gravée
par Chenu. La maîtresse du maréchal de Saxe, la grande actrice de la Comédie-Italienne, et qui
osa jouer dans Bastien et Bastienne, avec l'habit de serge, la croix d'or au cou, la coiffure
villageoise et les sabots, a son portrait à la plume ainsi tracé dans les deux lettres de cachet contre
la demoiselle Chantilly : « petite, mal faite, sèche, les cheveux bruns, le nez écrasé, les yeux
vifs, la peau assez blanche. » Et c'est la figure qu'on retrouve clans les portraits de Garaud et
de Cochin, avec un rien dans les yeux du clignotement d'une myope.

Mme Gavaudan dans Joconde. Peinte par Jacques, gravée par A. de Saint-Aubin. Un sourire
charmeur, la physionomie de méridionale la plus séduisante qui se puisse voir au milieu des
frisons qui l'encadrent, et même sous le ridicule bonnet de linge terminé par un béret, la coiffure
couleur locale du temps1.

Mme Julien, reçue à la Comédie-Italienne en 1781. Gravée en couleur chez Mandhare et Jean.
On voit madame Julien dans la Veuve de Cancale, sous un bonnet blanc liseré de noir, jeté sur le
haut de la tête, une croix sur sa poitrine débraillée, et dont les deux boutons de seins traversent
de leur rose le tulle de son fichu ; et au milieu du noir de sa robe, du blanc de sa guimpe, et
avec son teint allumé, elle ressemble à une nonne en goguette.

Mlle Lescot, reçue à la Comédie-Italienne en 1780. A Paris, chez Esnauts et Rapilly.
M"e Lescot, une transfuge du théâtre de Rouen, une chanteuse à la voix joliment articulée,
montre dans son portrait un profil tout droit, et où le front, comme dans une tête antique, passe
au nez sans rentrant, sans inflexion, une belle tète sur laquelle sont épandues les ondes de ses
cheveux, où court une guirlande de fleurs.

Marie-Thérèse Villette, F. La Ruette, de la Comédie-Italienne, reçue en 1761. Dessinée par
Le Clerc, gravée par Elluin. La chanteuse aimée du public, et dont la rentrée dans la Servante-
Maîtresse et le Tableau parlant fut accueillie par des transports d'enthousiasme, est un des
plus remarquables laiderons qui aient été jamais portraiturés, avec ces petits traits malingres et
chafouins.

« Du jeu de Sylvia la naïve éloquence. » Portrait de M"° Sylvia. Peinte par La Tour, gravée
par Surugue fils. Jeanne Benozzi, la comédienne tout à fait supérieure par l'art naturel de son
jeu, est représentée dans le beau portrait de La Tour, en coiffure basse au haut de laquelle se
recroqueville une petite plume blanche, un noeud de ruban au cou, un parfait contentement au
corsage, et elle est habillée d'une de ces somptueuses robes, aimées par Marie Leckzinska, toute
couverte, toute filigranée, toute passementée de cannetille et de ce qu'on appelait alors des
sourcils de hannetons. La comédienne a un front lumineux, des yeux pénétrants, un grand et fin
nez renarré, une bouche à la Voltaire : une physionomie de vieux diplomate.

Edmond de Goncourt.

1. Eugénie d'Hannetaire, dans « les Sultanes, acte 2e. » Peinte par Legendre, gravée par Chevillet. On voit la descendante de Servandoni
vêtue d'un de ces costumes sillonnés de fourrures mis à la mode par les tableaux russes de Le Prince, pincer de la guitare, avec de grands yeux
caressants. Cette actrice, qui n'a jamais fait partie de la Comédie-Italienne de Paris, était sans doute la fille de Servandoni d'Hannetaire, qui
fut directeur du théâtre de Bruxelles de 1702 à 1780.
 
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