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Burty, Philippe: Le Salon de 1880, [6], les étrangers
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.18608#0367
LE SALON DE 1880. 307
M. Kroyer est venu de Danemark pour peindre une Sardinière à Concarneau. Il n'y a donc
point de sardinières dans son pays? C'est là qu'il nous intéresserait bien plus !—M. Hagborg aussi
pousse sur nos côtes, et peint, non sans mérite, la Plage d'Agon, dans la Manche. Hélas ! les
plages foisonnent cette année, à commencer par celle d'Emile Vernier, laquelle est la meilleure
de toutes. Les peintres, fins commerçants, ont trouvé moyen de combiner les nécessités du
pot-au-feu avec les plaisirs de la villégiature.
— Combien est plus typique le Soir, à Vile
de Waderon, en Suède, par M. Wahlberg! Et
la Station des bateaux à vapeur, en Norwège,
aux fonds de roches glacées de neige étince-
lante, par M. Smith-Hald ! Et les Côtes de
Scanie, au coucher du 'soleil, par M. Cari
Skanberg ! Aujourd'hui que tout le monde
sait proprement son métier d'artiste, que
chacun s'éprenne donc jalousement des
beautés de sa patrie ! L'art vrai sombrerait
dans le cosmopolitisme comme il a failli
sombrer dans l'académisme. Il faut s'en-
tendre entre ateliers pour tracer des cordons
sanitaires.
La Hollande, outre M. Mesdag dont la
réputation de peintre de marine est faite et
qui a, cette année, VHiver à la plage, et les
Jours de novembre, à Scheveningue, la Hol-
lande nous envoie de bons peintres d'inté-
rieurs. M. Bisschopp abuse des oppositions
de tons et des scènes sentimentales ; mais
M. Artz, dans son Orphelinat de KaUvyck,
se montre très fin observateur des natures
humbles.
Nous ne savons dans les marais de quel
pays M. Willem Roelofs a vu s'abattre son
J Portrait de M110 M...
Vol de Spatules et de Cormorans ; mais C'est Dessin de Marias Moreno, d'après son tableau. (Salon de 1880.)
brillant et tumultueux.
M. Kaemmerer, qui avait pris rang parmi les élèves plus ou moins directs de Fortuny par
une plage de Trouville très ensoleillée et très mondaine, semble s'être beaucoup assagi dans
son Ascension en l'an VIII. Il ne suffit peut-être pas d'avoir des armoires bien garnies de
costumes plus ou moins authentiques; il faut aussi restituer le mouvement des foules, leur
geste, qui varie profondément de règnes en règnes. Cela ne se trouve point au bout du
pinceau.
Ph. Burty.
(La suite prochainement.)
M. Kroyer est venu de Danemark pour peindre une Sardinière à Concarneau. Il n'y a donc
point de sardinières dans son pays? C'est là qu'il nous intéresserait bien plus !—M. Hagborg aussi
pousse sur nos côtes, et peint, non sans mérite, la Plage d'Agon, dans la Manche. Hélas ! les
plages foisonnent cette année, à commencer par celle d'Emile Vernier, laquelle est la meilleure
de toutes. Les peintres, fins commerçants, ont trouvé moyen de combiner les nécessités du
pot-au-feu avec les plaisirs de la villégiature.
— Combien est plus typique le Soir, à Vile
de Waderon, en Suède, par M. Wahlberg! Et
la Station des bateaux à vapeur, en Norwège,
aux fonds de roches glacées de neige étince-
lante, par M. Smith-Hald ! Et les Côtes de
Scanie, au coucher du 'soleil, par M. Cari
Skanberg ! Aujourd'hui que tout le monde
sait proprement son métier d'artiste, que
chacun s'éprenne donc jalousement des
beautés de sa patrie ! L'art vrai sombrerait
dans le cosmopolitisme comme il a failli
sombrer dans l'académisme. Il faut s'en-
tendre entre ateliers pour tracer des cordons
sanitaires.
La Hollande, outre M. Mesdag dont la
réputation de peintre de marine est faite et
qui a, cette année, VHiver à la plage, et les
Jours de novembre, à Scheveningue, la Hol-
lande nous envoie de bons peintres d'inté-
rieurs. M. Bisschopp abuse des oppositions
de tons et des scènes sentimentales ; mais
M. Artz, dans son Orphelinat de KaUvyck,
se montre très fin observateur des natures
humbles.
Nous ne savons dans les marais de quel
pays M. Willem Roelofs a vu s'abattre son
J Portrait de M110 M...
Vol de Spatules et de Cormorans ; mais C'est Dessin de Marias Moreno, d'après son tableau. (Salon de 1880.)
brillant et tumultueux.
M. Kaemmerer, qui avait pris rang parmi les élèves plus ou moins directs de Fortuny par
une plage de Trouville très ensoleillée et très mondaine, semble s'être beaucoup assagi dans
son Ascension en l'an VIII. Il ne suffit peut-être pas d'avoir des armoires bien garnies de
costumes plus ou moins authentiques; il faut aussi restituer le mouvement des foules, leur
geste, qui varie profondément de règnes en règnes. Cela ne se trouve point au bout du
pinceau.
Ph. Burty.
(La suite prochainement.)