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L'ART.
de l'église entre les deux portes d'entrée, et le termina dans les premiers jours de l'année
suivante, comme en fait foi l'inscription de l'encadrement : Ad laudem gloriosissimi athleti
SANCTI SEBASTIANI HOC OPUS CONSTRUCTUM FUIT DIE XVII JANUARII MCCCCLXV. BenOTIUS FlORENTINUS
pinxit. L'espace était-il trop étroit pour une scène aussi animée, aussi remplie? Les mouvements
violents des tireurs d'arc convenaient-ils moins à cette main discrète, modérée, bien assise? Nous
ne saurions le dire ; mais ce martyre de Sébastien nous plaît moins que son apothéose. La
convention et la nature se heurtent sans que nulle transition leur soit ménagée. Entre le saint,
véritablement lardé de flèches, modelé par une main d'orfèvre, dressé sans appui sur un piédestal
exigu, d'une figure plus molle et plus
doucement expressive que dans le
tableau précédent, et les rudes archers
en chausses et en pourpoint collant
qui se pressent à ses pieds, le contraste
est un peu brusque. 11 est vrai que
ces types de condottieri vivent sous
leurs casques en colimaçon et leurs
cuirasses damasquinées, et tel Slave
en bottes molles, à la crinière tressée,
ferait envie à Carpaccio. Dans la partie
supérieure le Christ et la Vierge, dans
une gloire, sont réunis cette fois pour
bénir et protéger. Pendant qu'ils s'in-
clinent vers le martyr avec une bien-
veillance moins éloquemment exprimée
par leurs visages que par leurs bustes
penchés et leurs mains ouvertes, deux
anges volant en plein ciel, simples et
arrondis comme les figures aériennes
de Luini, soutiennent au-dessus de sa
tête, prêts à l'y déposer, la couronne
promise. Derrière cette scène s'étend
un merveilleux paysage, comme les
aime Gozzoli, délicieux mélange de
vraisemblance et de fantaisie, non point
développé en hauteur comme ceux du
palais Riccardi, mais fuyant à l'horizon
sous un ombrage d'arbres étranges,
qui rendent toute la fresque riche,
profonde, épaisse. — La peinture est
en mauvais état, et il faudrait prendre d'efficaces mesures de préservation alors qu'il en est
temps encore.
M. Milanesi, dans les notes ajoutées à la vie de Benozzo, d'accord avec les comptes
manuscrits de San Gimignano, reconnaît sa main dans les prophètes et le patriarche Abraham
qui ornent les lunettes des arcs de la nef gauche. Les peintures sont bien hautes pour qu'on
leur donne une attribution certaine, et si la manifattura e dipintura des pilastres autour de la
chapelle de Saint-Sébastien ont été payées, le 10 février, 20 livres 10 sous à Gozzoli, ne
peuvent-elles être attribuées aux élèves qu'il avait amenés avec lui ? Ne venait-il pas de recevoir
une tâche d'une tout autre importance, et ne devait-il pas avoir hâte de l'entreprendre ?
Il s'agissait de la décoration du chœur de Sant' Agostino. Un augustin gimignanais, Domenico
Strambi, qui avait enseigné l'éloquence sacrée à Paris et à Oxford, en y acquérant de la
Fresque de Benozzo Gozzoli, a San Gimignano.
Augustin professe dans une école de Rome la rhétorique et la philosophie.
(Fragment de gauche.) — Dessin de David-Riquier.
L'ART.
de l'église entre les deux portes d'entrée, et le termina dans les premiers jours de l'année
suivante, comme en fait foi l'inscription de l'encadrement : Ad laudem gloriosissimi athleti
SANCTI SEBASTIANI HOC OPUS CONSTRUCTUM FUIT DIE XVII JANUARII MCCCCLXV. BenOTIUS FlORENTINUS
pinxit. L'espace était-il trop étroit pour une scène aussi animée, aussi remplie? Les mouvements
violents des tireurs d'arc convenaient-ils moins à cette main discrète, modérée, bien assise? Nous
ne saurions le dire ; mais ce martyre de Sébastien nous plaît moins que son apothéose. La
convention et la nature se heurtent sans que nulle transition leur soit ménagée. Entre le saint,
véritablement lardé de flèches, modelé par une main d'orfèvre, dressé sans appui sur un piédestal
exigu, d'une figure plus molle et plus
doucement expressive que dans le
tableau précédent, et les rudes archers
en chausses et en pourpoint collant
qui se pressent à ses pieds, le contraste
est un peu brusque. 11 est vrai que
ces types de condottieri vivent sous
leurs casques en colimaçon et leurs
cuirasses damasquinées, et tel Slave
en bottes molles, à la crinière tressée,
ferait envie à Carpaccio. Dans la partie
supérieure le Christ et la Vierge, dans
une gloire, sont réunis cette fois pour
bénir et protéger. Pendant qu'ils s'in-
clinent vers le martyr avec une bien-
veillance moins éloquemment exprimée
par leurs visages que par leurs bustes
penchés et leurs mains ouvertes, deux
anges volant en plein ciel, simples et
arrondis comme les figures aériennes
de Luini, soutiennent au-dessus de sa
tête, prêts à l'y déposer, la couronne
promise. Derrière cette scène s'étend
un merveilleux paysage, comme les
aime Gozzoli, délicieux mélange de
vraisemblance et de fantaisie, non point
développé en hauteur comme ceux du
palais Riccardi, mais fuyant à l'horizon
sous un ombrage d'arbres étranges,
qui rendent toute la fresque riche,
profonde, épaisse. — La peinture est
en mauvais état, et il faudrait prendre d'efficaces mesures de préservation alors qu'il en est
temps encore.
M. Milanesi, dans les notes ajoutées à la vie de Benozzo, d'accord avec les comptes
manuscrits de San Gimignano, reconnaît sa main dans les prophètes et le patriarche Abraham
qui ornent les lunettes des arcs de la nef gauche. Les peintures sont bien hautes pour qu'on
leur donne une attribution certaine, et si la manifattura e dipintura des pilastres autour de la
chapelle de Saint-Sébastien ont été payées, le 10 février, 20 livres 10 sous à Gozzoli, ne
peuvent-elles être attribuées aux élèves qu'il avait amenés avec lui ? Ne venait-il pas de recevoir
une tâche d'une tout autre importance, et ne devait-il pas avoir hâte de l'entreprendre ?
Il s'agissait de la décoration du chœur de Sant' Agostino. Un augustin gimignanais, Domenico
Strambi, qui avait enseigné l'éloquence sacrée à Paris et à Oxford, en y acquérant de la
Fresque de Benozzo Gozzoli, a San Gimignano.
Augustin professe dans une école de Rome la rhétorique et la philosophie.
(Fragment de gauche.) — Dessin de David-Riquier.