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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 4)

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Wauters, Alphonse: Les tapisseries de Bruxelles et leurs marques, [3]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18880#0246

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LES TAPISSERIES DE BRUXELLES ET LEURS MARQUES.

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Ainsi les Dcrmoyen n'hésitent pas à envoyer l'architecte Pierre Coecke étudier l'art et les pro-
cédés de l'Orient. Tant d'efforts ne restent pas stériles. A l'époque de la mort de l'infante Isabelle,
la teinturerie de Bruxelles et celle d'Anvers étaient considérées comme les plus parfaites de
l'Europe, et Daniel Leyniers, de la première de ces villes, comme le meilleur des teinturiers.
Pendant plusieurs générations, la famille Leyniers s'occupa sans relâche du perfectionnement de
Fart de la teinture, sans abandonner la fabrication des tapis.

Mais le travail intellectuel et industriel n'est pas sans danger et sans écueil. Le grand mou-
vement de la réforme religieuse nait à peine que les fabricants bruxellois s'y trouvent impliqués,
avec Bernard Van Orley. Les guerres du xviu siècle éclatent, et à leur suite surviennent les
proscriptions, les exécutions, les exils. Le calme et l'activité ne renaissent que dans les premières
années du xvnc siècle. Le métier compte alors un grand nombre de maîtres et maintient en activité
jusqu'à r,3op ou 1,400 ouvriers. L'immense talent de Rubens seconde l'énergie et la persévérance
des Raes et des Van den Hecke, et le grand maître d'Anvers ajoute à toutes ses gloires celle d'être,
l'âme d'une de nos grandes industries.

Après lui la décadence arrive insensiblement. En vain on essaye de nouvelles mesures, en
vain on crée à Bruxelles, en 1655, sous le nom de Tapissiers pant ou Galerie des Tapissiers, une
sorte d'exposition permanente des tentures; en vain les industriels adoptent des sujets nouveaux
et de nature à plaire davantage, comme les bergerades à la Téniers, les Ténières pour nous
servir d'une locution consacrée, tout contribue à ruiner la fabrication des tapisseries. Après
Rubens, Van Dyck, Jordaens, le grand art ne compte plus aux Pays-Bas que de rares repré-
sentants. L'école flamande leur survécut pourtant : elle produit encore David Téniers d'habiles
paysagistes, des peintres de vues de ville; mais ce n'était pas à des talents de ce genre que l'on
pouvait demander de vastes compositions destinées à couvrir les parois de salles immenses. Les
fabricants de Bruxelles furent souvent obligés de reproduire les cartons des peintres français et,
entre autres, de Le Brun, auquel la faveur de Louis XIV et la fondation de l'établissement des
Gobelins assurèrent une réputation colossale. Dès lors, imitateurs d'un art étranger, ils perdirent
ce cachet qui donnait à leurs productions une valeur exceptionnelle. Cessant d'être soutenus par le
souffle vivifiant qui les avait élevés si haut, ils eurent à lutter contre des difficultés qui se multi-
pliaient sans cesse, tandis que la renommée de la fabrique des Gobelins ne cessait de grandir.

Depuis le xvic siècle, des allocations annuelles ou des exemptions d'offices avaient été
consenties en faveur des peintres qui travaillaient pour les tapissiers. Ce moyen fut employé
jusqu'à la fin du xvin5 siècle, mais on n'eut alors que des artistes d'un rang inférieur, comme les
derniers Van Orley. Ce n'était pas. assez pour lutter contre des artistes vivant dans une grande
capitale, au centre d'une nation puissante, sous la protection d'un monarque aimant le faste et les
beaux-arts. Au temps de Louis XIV et de Colbert, les Flamands n'avaient pour les soutenir que
les sympathies de gouverneurs généraux dont les pouvoirs étaient limités et qui changeaient à
chaque instant, et les tapissiers de Bruxelles ne trouvaient qu'un appui douteux, quand leurs rivaux
pouvaient compter sur les libéralités d'un grand prince et de son premier ministre. La Belgique,
entourée d'ennemis, attaquée sans cesse et de plus en plus amoindrie, se débattait dans les
douleurs de l'agonie, tandis que la France s'agrandissait. Et cependant la lutte continua. La
situation s'empira enfin; mais, on peut le proclamer, ce fut malgré des efforts considérables et
parce que tout y contribua : la décadence de l'école de peinture, l'état déplorable des affaires
publiques, l'appauvrissement des particuliers, l'émigration d'un grand nombre de maîtres et
d'ouvriers et surtout le changement de la mode, qui substitua aux vieilles tentures de laine et
de soie le cuir doré et le papier à meubler.

1. Le célèbre David Téniers a déployé un grand talent dans une série de huit compositions qui ont été peintes pour servir de modèles
à des tapisseries, ainsi que onze autres tableaux du même genre dus à Primo Gentil, Vander Meulen et Van Herp. Ces œuvres d'art, qui toutes
sont garnies de splendides bordures, dues à Jean Van Kessel, ont été exécutées en i663 et 1664, puis reproduites en tentures, pour
rappeler les services rendus par les Moncade aux souverains de la Sicile et de l'Aragon. A la suite du mariage de don Fernando d'Aragon et
Moncada, duc de Montalto, et de dona Maria Teresa Fajardo et Rivero, marquise de Los Vêlez, mariage qui fut célébré en 1664, ces tabieaux
et ces tapisseries échurent à leur tille, dona Catalina, qui les comprit dans le majorât de la famille et les porta, par alliance, aux de Tolède
Osorio, marquis de Villafranca. Il en a été publié une description, rédigée par Théophile Gautier, en 1X70, lorsque les vingt tableaux et les
six tapisseries furent mis en vente à l'hôtel Drouot. Les photographies des huit tableaux de Téniers accompagnent le catalogue.
 
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