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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 3.1877 (Teil 2)

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Bergerat, Emile: Théophile Gautier peintre, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.16905#0035

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Frise de J. B. Huet. — Fac-similé d'une de ses eaux-fortes.

THÉOPHILE GAUTIER PEINTRE

« En ce temps-là, je n'avais aucune idée de me faire littérateur,

« mon goût me portait plutôt vers la peinture, et avant d'avoir fini

« ma philosophie j'étais entré chez Rioult, qui avait son atelier rue

« Saint-Antoine, près du temple protestant, à proximité de Charle-

« magne, ce qui me permettait d'aller à la classe après la séance.

- « Rioult était un homme d'une laideur bizarre et spirituelle, qu'une

' ■• « paralysie forçait, comme Jouvenet, à peindre de la main gauche,

• ' ■ « et qui n'en était pas moins adroit. A ma première étude, il me

Portrait.

dcss;., de Théophile Gautier. « trouva plein de chic, accusation au moins prématurée.

Photogravure directe de MM. Yves et Barret. , • 1 • ri r> a rr • y~» / •

« La scène si bien racontée dans / Affaire Clemenceau se joua
« aussi pour moi sur la table de pose, et le premier modèle de femme ne me parut pas beau et
« me désappointa singulièrement, tant l'art ajoute à la nature la plus parfaite. C'était cependant
« une très-jolie fille, dont j'appréciai plus tard, par comparaison, les lignes élégantes et pures;
« mais, d'après cette impression, j'ai toujours préféré la statue à la femme et le marbre à la
« chair. Mes études de peinture me firent apercevoir d'un défaut que j'ignorais, c'est que j'avais
« la vue basse. Quand j'étais au premier rang, cela allait bien, mais quand le tirage des places
« reléguait mon chevalet au fond de la salle, je n'ébauchais plus que des masses confuses. »
(Autobiographie de Théophile Gautier, Portraits contemporains, Paris, Charpentier, 1874.)

Ces quelques lignes, écrites par le poëte lui-même en 186y, pour le Panthéon des Illustra-
tions françaises au xix° siècle, publié par M. Victor Frond et édité par Abel Pilon, constituent
tout ce que nous avons de documents sur Théophile Gautier peintre.

Ce n'est pas qu'il se refusât, dans les causeries intimes, à parler de cette vocation avortée et
de la période de sa vie qu'elle embrasse. Il aimait au contraire à nous en entretenir, et môme il
se flattait de me faire partager les illusions et les regrets qu'elle lui avait laissés au cœur. Quand
il tenait ce paradoxe, il le poussait jusqu'à la plus amère éloquence; il accusait les hommes et les
dieux de l'avoir dévoyé lâchement! Il jurait qu'il n'était point né pour « l'écriture », — c'était
son mot pour désigner l'art de l'écrivain, — et que le livre lui avait volé tous ses sujets de
tableaux! Puis, sur la trouvaille d'un trait comique ou d'une invective pittoresque, sa fureur
tarissait tout à coup et il se prenait à rire.

Grâce à quelques-unes de ces amusantes explosions, j'ai pu recueillir nombre de renseigne-
ments sur la production picturale de mon maître. Plusieurs fois même il m'a été donné de le
voir peindre. J'avais un moyen infaillible pour obtenir ce dernier résultat. Je laissais traîner une

Tome IX. 4
 
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