Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 3.1877 (Teil 2)

DOI Artikel:
Notre bibliothèque
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.16905#0285

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
NOTRE BIBLIOTHÈQUE

LXXIX

CATALOGUE D'UNE PETITE COLLECTION DE LIVRES
RARES, MANUSCRITS ET IMPRIMÉS. Paris, 1877, impri-
merie de D. Jouaust, rue Saint-Honoré, 338. In-18 de 106 p.

Soyez sans crainte ; il ne s'agit pas d'un catalogue de vente
publique, mais bien d'une de ces publications amicales fami-
lières aux Anglais, et re'servées par eux, comme l'est celle-ci,
for private circulation. Le bibliophile passionné et très-artiste
qui vient d'avoir la tout aimable pensée de faire partager en
quelque sorte ses joies érudites à ses intimes en fanatisme de
belles éditions, de manuscrits précieux et de reliures idéales,
n'est autre que M. le marquis de Ganay, dont le savoir exempt
de tout pédantisme et le goût si sûr n'ont d'égale que l'exquise
courtoisie; je n'ai jamais oublié, et ne saurais oublier, tout ce
que M. de Ganay, bien que fort souffrant alors, a mis, il y a
quelques années, d'extrême empressement et de patiente bonne
grâce à me montrer les inestimables trésors de sa bibliothèque,
où la quantité est si intelligemment remplacée par la qualité. Je
n'ai pas eu l'honneur de revoir le savant propriétaire de tant de
merveilles, dont j'ai trouvé le catalogue sur les rayons d'une
bibliothèque amie; en le parcourant, que de charmants souve-
nirs se sont éveillés en moi ! Il m'a semblé que je me retrouvais
dans ce milieu hospitalier, recueilli et toujours aimable dans son
sérieux même, où j'avais pu admirer à loisir les principales
raretés décrites dans le petit volume que maître Jouaust n'a pas
imprimé avec le raffinement de soins dont il eût dû cependant,
cette fois, faire plus que jamais preuve. Tout en ayant à cœur de
m'acquitter d'une dette de reconnaissance pour un accueil
auquel je n'avais aucun titre, je fais acte d'égoïsme bien entendu
en signalant la bibliothèque de M. de Ganay aux lecteurs de
l'Art; je renouvelle, en les y initiant, des jouissances chères aux
amants des belles choses, surtout à ces trop nombreux curieux
réduits, comme moi, à l'illusion de leur possession, et qui,
cependant, en sont un tantinet propriétaires, parce qu'ils sont
les seuls à les bien comprendre ; propriété idéale, répondra-t-on
en persiflant; propriété beaucoup plus sérieuse, beaucoup plus
effective qu'elle n'en a l'air, répliqueront en chœur tous ceux
qui n'ont pas la fortune matérielle, mais.qui sentent, s'émeuvent,
se troublent à la vue d'un objet d'art, l'étudient, l'analysent, le
fixent dans leur mémoire, et n'ont point de repos qu'ils ne
l'aient en quelque sorte absorbé en eux. Ceux-là vivent double ;
ce sont les vrais Crésus de ce monde.

Ouvrez le catalogue delà bibliothèque du marquis de Ganay,
il ne comprend que 269 numéros1, et c'est beaucoup pour un
choix rarissime. Rien que l'indication de quelques provenances
suffira à émerveiller les connaisseurs. Henri II, Henri III, Marie
de Médicis, Anne d'Autriche, 'Marie-Antoinette, le cardinal de
Retz, J. B. Colbert, M'"" de Maintenon, Grolier, le comte
d'Hoym, Mmo de Chamillart, le cardinal de Lorraine, le duc de
La Vallière, Crozat, le marquis de Morante, J. A. De Thou,
F. Didot, le comte de Vergennes, Girardot de Préfond, Solar,
Mac Carthy, Bossuet, Racine, le prince Eugène de Savoie,
Saint-Mauris, Renouard, G. de Pixérécourt, Charles Nodier,
Mirabeau, De Bure, La Bédoyère, la comtesse de Verrue, Bru-
net-Denon, M">° de Pompadour, Randon de Boisset, etc., etc., je
cite au hasard une partie des anciens possesseurs de ces beaux
livres auxquels des relieurs illustres ont ajouté de nouveaux

titres de noblesse. Chez M. de Ganay les reliures sont signées
Du Seuil, Derome, Le Gascon, Trautz-Bauzonnet, Padeloup,
Thouvenin, Niedrée, Thompson, Bradel, Bozerian, Duru, Boyet,
Simier, etc. Si pour les bibliophiles la fête est complète, elle ne
l'est pas moins pour les artistes. Gendre d'un curieux célèbre,—
de M. le comte de Pourtalès-Gorgier, le type des grands collec-
tionneurs de notre temps, des véritables amateurs, — M. de
Ganay ne pouvait oublier de faire à l'art une large place dans sa
bibliothèque ; c'est par les manuscrits qu'il lui en a ouvert les
portes à deux battants. Aussi trouve-t-on chez lui le Livre de
Prières de la dernière comtesse de Flandres, Marguerite de
Masle (épouse du duc de Bourgogne, Philippe le Hardy), orné
de vingt-huit miniatures dont quatorze grandes et quatorze
moyennes, toutes « d'une composition bien entendue, d'un des-
sin d'une correction peu ordinaire pour le temps (xv° siècle),
d'une finesse d'exécution et d'un coloris des plus remarquables » ;

— des Horce in-8 sur vélin, —■ fin du xiv° siècle, — « avec
bordures de feuilles de houx à chaque page, douze miniatures
sur fonds quadrillés, nombreuses initiales et grandes lettres en
or et couleur » ; — des Horce in-8 « sur vélin très-fin et très-
pur ». — commencement du xvi° siècle, —■ avec treize grandes
miniatures, « d'un fini précieux et d'un brillant coloris », et se
recommandant aussi, « tant sous le rapport de la composition,
toute pleine d'esprit et en môme temps de naïveté, que par
l'expression des figures » ; — le Petit Office de la Vierge, « très-
joli manuscrit sur vélin, exécuté par Nicolas Jarry », et orné de
cinq miniatures, « d'une beauté remarquable, par Louis Du-
guerrier, dit le jeune, né en 1614, et mort en 1655 ; il excellait
à peindre les portraits et était un habile miniaturiste ; il fut l'un
des fondateurs de l'Académie de peinture, qui le nomma profes-
seur en 1655 » ; — la Vision de Lame de Guy de Thurno, sur
vélin, à deux colonnes, avec « belles bordures de fleurs dans les-
quelles se trouvent les chiffres en or de Charles le Téméraire et
de Marguerite d'York, sa femme, ainsi que leur devise : Bien en
adviendgne, et une très-belle miniature, placée en tète du ma-
nuscrit, ayant en largeur 150 millimètres, et en hauteur 120;
elle représente une chambre dans laquelle se trouvent, avec plu-
sieurs clercs, la veuve de Guy de Thurno et le prieur qui inter-
roge l'esprit resté invisible à tous les assistants, sauf à la veuve » ;

— la Vision de Tondal, « manuscrit du xve siècle, sur vélin,
écrit à deux colonnes en caractères gothiques », orné de « vingt
miniatures des plus remarquables », pour lesquelles « le talent
de l'artiste s'est inspiré de la sombre imagination de l'écri-
vain pour reproduire les scènes infernales décrites dans le
livre »; — etc., etc. Je m'arrête, je ne puis tout citer, si forte
qu'en soit mon envie, mais je ne saurais terminer sans signaler
ïÉvangéliaire dit de Charlemagnc, provenant de la cathédrale
de Sion; le chapitre commit en 1851 le vandalisme de vendre
ce manuscrit, dont la reliure artistique « fait en grande partie le
mérite ».

Je cède la parole à M. le marquis de Ganay qu'on aura tout
profit à écouter : « La reliure est formée de deux ais en bois re-
couverts sur le plat recto d'un travail d'orfèvrerie des plus pré-
cieux, et sur le plat verso d'un simple cuir rougeàtre semé de
clous dorés disposés en forme de O C majuscules adossés.

« Les ornements qui recouvrent le plat recto sont attachés
par des clous sur le bois. Au centre de la composition se pré-
sente le sujet principal, exécuté au repoussé dans une plaque
d'or fin. C'est le Christ assis sur son trône, la tète entourée d'un
nimbe crucifère bordé d'un rang de perles, bénissant de la main

1. En comptant les n°' 212 Bis et 267 bis.
Tome IX.
 
Annotationen