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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 3.1877 (Teil 2)

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Levasseur, E.: De l'influence générale de l'art sur l'industrie
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https://doi.org/10.11588/diglit.16905#0226

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DE L'INFLUENCE GÉNÉRALE DE L'ART SUR L'INDUSTRIE

Lettre du xvi; siècle

IIP

es guerres d'Italie, qui remplirent la fin du xve et la première moitié
du xvi" siècle, ont renouvelé l'art français. L'art ogival s'était raffiné en
vieillissant, et il avait dégénéré en se raffinant; il était temps qu'un
autre souffle vînt animer nos artistes.

Déjà, avant que la chevalerie française eût franchi les Alpes,
des sculpteurs et des peintres semblaient pressentir une ère nou-
velle : témoin Michel Colombe, l'auteur du tombeau du duc
François II, qui est dans la cathédrale de Nantes, et le peintre
Jean Fouquet.

Quand les gentilshommes de la brillante armée que le jeune
et aventureux Charles VIII conduisait gaiement à la conquête du
royaume de Naples, furent descendus dans la plaine du Pô et
eurent poussé leur marche triomphale jusqu'à Florence et à Naples, ils furent surpris de trouver
par delà les monts des mœurs plus élégantes dans leur corruption même que les moeurs fran-
çaises, un luxe plus général et plus savant, des arts portés à une exquise perfection, et une civili-
sation presque inconnue dans le Nord : leur entrée en Italie fut pour eux la découverte d'un
nouveau monde.

Charles VIII partait pour prendre possession d'un royaume et rêvait même une croisade et
une couronne impériale. Il n'eut jamais les dernières, ne sut pas conserver le premier, et ne fit
qu'allumer une guerre de plus d'un demi-siècle dans laquelle la France allait, contrairement à sa
vraie politique nationale, consommer beaucoup d'hommes et beaucoup d'argent, pour établir, sur
les ruines de l'indépendance italienne, la grandeur de la maison d'Autriche. Mais il allait devenir
le promoteur involontaire de la Renaissance en France. Ce n'est pas le seul exemple qu'offre
l'histoire de résultats moraux et inattendus rachetant des fautes commises dans l'ordre des faits
matériels, et de guerres qui ont ouvert aux vaincus ou aux vainqueurs des horizons nouveaux sur
la civilisation. Il ne faut pas juger sur de tels résultats ceux qui ont eu la direction des événe-
ments; les nations en profitent; les maîtres du monde ne restent responsables que du bien ou du
mal qu'ils ont sciemment ou directement accompli.

Charles VIII savait bien que l'Italie était un beau pays, digne d'envie. Il ne savait pas encore
quelles ressources elle pouvait fournir au génie français. Il commença à le comprendre quand il
eut le spectacle de ses chefs-d'œuvre sous les yeux. Un mois après son entrée à Naples, il écri-
vait à son beau-frère, Pierre de Bourbon3 : « Au surplus, vous ne pourriez croire les beaux
jardins que j'ay en ceste ville... et avecques ce, j'ay trouvé en ce pays les meilleurs paintres
pour faire aussi beaux plainchiers qu'il est possible, et ne sont des plainchiers de Bauxe, de
Lyon et d'autres lieux de France en rien approchans de beauté et richesse ceux d'icy; pourquoi
je m'en fourniray et les meneray avec moi pour en faire à Amboise. »

L'Italie, en effet, était alors la plus belle et la plus riche contrée de l'Europe. La terre,
échauffée par un soleil généreux et cultivée par des hommes libres, était d'une fécondité remar-
quable, surtout dans le Milanais et dans la campagne de Naples. La Maremme n'était pas encore

1. Voir l'Art, j« année, tome Ier, pages ijo et 169.

2. Tirée d'un traité de calligraphie, par le Frate Vespasiano Amphiareo de Ferrare.
j. L'entrée à Naples est du 28 février 1495; la lettre est du 18 mars 1495.

Tome IX. 26
 
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