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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 3.1877 (Teil 2)

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Valabrègue, Antony: Le cabinet de Scudéry
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https://doi.org/10.11588/diglit.16905#0281

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LE CABINET DE SCUDÉRY

limitation du cavalier Marin, qui était venu en France, en 1617,
à une époque où l'influence italienne était toute-puissante, Scudéry
a décrit en vers un cabinet de tableaux imaginaire. Nous avons
sous les yeux l'édition originale de 1646, publiée par Auguste
Courbé, libraire et imprimeur de Monseigneur le duc d'Orléans,
dans la petite salle du Palais, à la Palme. « Puisque le cavalier
Marin, dit Scudéry dans sa préface, a bien fait une galerie, j'ai cru
qu'il n'était pas hors de mon pouvoir de faire aussi un cabinet.
Qu'on ne s'imagine pas toutefois que ce dernier soit orné des
mêmes raretés qu'on voit dans l'autre, et que je me sois paré de ce
qui n'était pas à moi. Au contraire, j'ai apporté tant de soin à éviter
un soupçon de cette espèce, que j'ai supprimé beaucoup d'ouvrages qui, peut-être, n'étaient pas
mauvais, parce que la conformité dans les pensées pouvait faire imaginer que je les avais prises
en ce lieu-là. » Scudéry se trouvait alors gouverneur de Notre-Dame de la Garde, en Provence.
Sa sœur, Magdeleine de Scudéry, lui avait fait obtenir ce gouvernement par l'entremise de
M"1" de Rambouillet Il avait emporté avec lui, pour lui tenir compagnie, les portraits de tous
les poètes, depuis Jean Marot, père de Clément, jusqu'à Colletet. C'était là d'ailleurs sa seule
galerie, car il ne possédait aucun tableau ; peut-être même cette série de portraits lui avait-elle
donné l'idée de son cabinet imaginaire. Il voulait aller plus loin, et faire un cabinet d'objets
curieux. « Comme les seuls tableaux, disait-il, ne composent pas un cabinet en entier, et qu'ils
ne servent simplement qu'à couvrir les murailles, sachez que j'ai de quoi orner les tablettes du
mien de choses qui ne sont pas très-communes. »

Le ton emphatique de cette préface, la fierté ridicule avec laquelle Scudéry parle de lui-
même, nous mettent en garde contre ses projets. L'intérêt de son livre est pourtant indéniable.
Il nous fait connaître l'opinion des contemporains sur un grand nombre de tableaux que le temps
a consacrés, avec lesquels nous sommes familiers aujourd'hui et qui à cette époque étaient des
œuvres récentes. Mauvais juge par lui-même, Scudéry garde le reflet des idées et des impressions
générales. Il fixe dans ses vers l'état des connaissances et des jugements artistiques, à la veille de
la transformation classique. Le moment était bien choisi, moment d'exubérance, de recherche
inquiète, de vie littéraire et artistique singulièrement active. Le groupe des peintres qui s'essayaient
de diverses façons était nombreux; les uns subissaient l'influence des écoles étrangères, les autres
cherchaient à ouvrir une voie nouvelle : notre art national se formait. Si l'idée de faire un livre
de vers sur des tableaux était fausse, au moins pour la réaliser la matière ne manquait pas.

Scudéry a-t-il bien tiré parti de son sujet ? On ne peut lui refuser d'avoir cité beaucoup
d'œuvres. 11 a connu le nom de tous les peintres italiens, flamands et français, qui ont vécu
de son temps. Il n'oublie ceux d'aucune école, et mentionne toutes les œuvres que son souvenir
lui représente.

Nous pouvons le suivre tout d'abord lorsqu'il s'occupe des peintres italiens. Ceux dont le nom
l'attire sont Guerchin, Dominiquin, Le Guide. Après avoir cité quelques peintures inspirées du
Tasse, comme Armide et Renaud, du Parmesan, des sujets mythologiques comme Narcisse, de

:. On se rappelle les vers de Chapelle et de Bachaumont :

Gouvernement commode et beau,
A qui suffit pour toute garde
Un suisse avec sa hallebarde
Peint sur la porte du château.
 
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