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L'ART.
sans résultat appréciable pour l'art moderne. Parmi les réformes qu'aurait à subir le règlement,
il serait fort à désirer également de voir figurer une disposition qui imposerait au jury l'obli-
gation de distinguer dans ses récompenses celles accordées à des compositions de celles" décernées
à des restaurations d'édifices anciens ou à des relevés ; on conçoit en effet, quelle que soit la
valeur qu'on puisse accorder à une restauration sur le papier, qu'on ne saurait la comparer au
mérite que peut présenter une composition ; les œuvres de ce genre sont rares, très-rares de nos
jours, nous ne le savons que trop, mais aussi y a-t-il dans cette pénurie une raison de plus
pour faire ressortir davantage un projet lorsqu'il le mérite, et la récompense à laquelle peut
prétendre une œuvre originale ne devrait-elle être jamais accordée à un travail d'un ordre en
définitive moins élevé. Si le règlement avait prévu le cas, nous n'aurions pas vu encore cette
année décerner la seule première médaille dont dispose le jury d'architecture à un projet de
restauration qui, nous en convenons volontiers, est plein de qualités, mais qui n'est pas suffisant
pour entraîner la suprême récompense à laquelle les architectes puissent de fait prétendre au
Salon. Certes M. Simil a déjà fait ses preuves, et dans cette importante étude des Thermes
antiques de Nîmes, il montre du savoir et du goût; son travail, grâce à la façon analytique dont
il est présenté, peut servir à l'instruction de ses confrères ; mais nous aurions, pour le principe,
désiré voir remplacer cette médaille de première classe par deux médailles de deuxième classe, si
le jury avait la conviction qu'aucune composition ne méritait la première distinction. Est-il bien
certain du reste que pas un projet ne pouvait y prétendre et n'y avait-il pas lieu de s'arrêter
sérieusement au projet de théâtre étudié pour la ville de Rouen, par M. Sauvageot qui en est
l'architecte ? Cette étude ne brille peut-être pas par une originalité très-grande, mais quelle est
l'œuvre contemporaine qui ait sous ce rapport une valeur exceptionnelle? En tout cas, il y a dans
ce travail des qualités tout à fait remarquables sous le rapport de l'étude précise et de la connais-
sance des besoins d'un théâtre, les dispositions adoptées sont excellentes, et le tout est présenté
sous une forme claire et avec une netteté qu'on ne rencontre pas assez souvent dans les projets
d'architectes. Aussi ce projet est-il de beaucoup supérieur à tous ceux qui avaient été exposés
au concours ouvert par la ville de Rouen à ce propos et dont quelques-uns figurent même au
Salon. Dans la plupart de ces études, faites nous a-t-il semblé par des artistes négligeant trop
le côté pratique, on trouvait certainement des dispositions qui eussent été heureuses si le terrain
avait été plus étendu et si les ressources n'étaient pas limitées à un chiffre déterminé, mais qui
devenaient inexécutables dans le cas présent; aussi la ville de Rouen, voulant éviter des déboires
et des suppléments de dépenses, a-t-elle préféré le projet si exécutable et étudié jusque dans
ses moindres détails par M. Sauvageot qui, du reste, a su donner à son œuvre une valeur archi-
tectonique très-honorable et supportant très-favorablement la comparaison.
Mais revenons au Salon, et constatons que le jury s'est, du reste en général, montré peu
sympathique aux projets et a réservé la plupart de ses faveurs aux restaurations et aux dessins ;
c'est ainsi qu'il a accordé des médailles de seconde classe à MM. Emile Ulmann, Bénouville,
Gout, qui certainement méritaient une récompense, mais qui n'étaient pas les seuls dans ce cas,
et auraient pu passer en seconde ligne. Nous ferons peut-être une exception en faveur de
M. Bénouville dont l'étude sur la maison dite de Diomède est faite avec esprit et donne une idée
assez juste de ce qu'est actuellement une construction de Pompéi; la restauration est également
sérieuse, sobre et dans un bon esprit. Quant à M. Ulmann, nous ne saurions le féliciter de ses
dessins très-bien faits, irréprochablement lavés, mais d'un aspect froid qui rappelle les modèles
tristes et fastidieux qu'on copiait, il y a vingt-cinq ans, dans tous les ateliers d'architecture ; on
ne nous fera jamais croire que ces reproductions, éternellement les mêmes, servent à l'instruction
des jeunes architectes et puissent aider en quoi que ce soit à la solution des problèmes posés
actuellement ; et nous ne pouvons nous empêcher de dire qu'il y aurait bien d'autres moyens
d'utiliser l'ardeur et le talent des lauréats de l'École des beaux-arts.
Au surplus, dans le cas présent, il était, à notre avis, plus juste de récompenser M. Bruneau
pour son travail sur le château de Coucy, étude très-utile faite avec soin et intelligence, et donnant
une idée très-exacte des combinaisons si ingénieuses et des systèmes de constructions qui distin-
L'ART.
sans résultat appréciable pour l'art moderne. Parmi les réformes qu'aurait à subir le règlement,
il serait fort à désirer également de voir figurer une disposition qui imposerait au jury l'obli-
gation de distinguer dans ses récompenses celles accordées à des compositions de celles" décernées
à des restaurations d'édifices anciens ou à des relevés ; on conçoit en effet, quelle que soit la
valeur qu'on puisse accorder à une restauration sur le papier, qu'on ne saurait la comparer au
mérite que peut présenter une composition ; les œuvres de ce genre sont rares, très-rares de nos
jours, nous ne le savons que trop, mais aussi y a-t-il dans cette pénurie une raison de plus
pour faire ressortir davantage un projet lorsqu'il le mérite, et la récompense à laquelle peut
prétendre une œuvre originale ne devrait-elle être jamais accordée à un travail d'un ordre en
définitive moins élevé. Si le règlement avait prévu le cas, nous n'aurions pas vu encore cette
année décerner la seule première médaille dont dispose le jury d'architecture à un projet de
restauration qui, nous en convenons volontiers, est plein de qualités, mais qui n'est pas suffisant
pour entraîner la suprême récompense à laquelle les architectes puissent de fait prétendre au
Salon. Certes M. Simil a déjà fait ses preuves, et dans cette importante étude des Thermes
antiques de Nîmes, il montre du savoir et du goût; son travail, grâce à la façon analytique dont
il est présenté, peut servir à l'instruction de ses confrères ; mais nous aurions, pour le principe,
désiré voir remplacer cette médaille de première classe par deux médailles de deuxième classe, si
le jury avait la conviction qu'aucune composition ne méritait la première distinction. Est-il bien
certain du reste que pas un projet ne pouvait y prétendre et n'y avait-il pas lieu de s'arrêter
sérieusement au projet de théâtre étudié pour la ville de Rouen, par M. Sauvageot qui en est
l'architecte ? Cette étude ne brille peut-être pas par une originalité très-grande, mais quelle est
l'œuvre contemporaine qui ait sous ce rapport une valeur exceptionnelle? En tout cas, il y a dans
ce travail des qualités tout à fait remarquables sous le rapport de l'étude précise et de la connais-
sance des besoins d'un théâtre, les dispositions adoptées sont excellentes, et le tout est présenté
sous une forme claire et avec une netteté qu'on ne rencontre pas assez souvent dans les projets
d'architectes. Aussi ce projet est-il de beaucoup supérieur à tous ceux qui avaient été exposés
au concours ouvert par la ville de Rouen à ce propos et dont quelques-uns figurent même au
Salon. Dans la plupart de ces études, faites nous a-t-il semblé par des artistes négligeant trop
le côté pratique, on trouvait certainement des dispositions qui eussent été heureuses si le terrain
avait été plus étendu et si les ressources n'étaient pas limitées à un chiffre déterminé, mais qui
devenaient inexécutables dans le cas présent; aussi la ville de Rouen, voulant éviter des déboires
et des suppléments de dépenses, a-t-elle préféré le projet si exécutable et étudié jusque dans
ses moindres détails par M. Sauvageot qui, du reste, a su donner à son œuvre une valeur archi-
tectonique très-honorable et supportant très-favorablement la comparaison.
Mais revenons au Salon, et constatons que le jury s'est, du reste en général, montré peu
sympathique aux projets et a réservé la plupart de ses faveurs aux restaurations et aux dessins ;
c'est ainsi qu'il a accordé des médailles de seconde classe à MM. Emile Ulmann, Bénouville,
Gout, qui certainement méritaient une récompense, mais qui n'étaient pas les seuls dans ce cas,
et auraient pu passer en seconde ligne. Nous ferons peut-être une exception en faveur de
M. Bénouville dont l'étude sur la maison dite de Diomède est faite avec esprit et donne une idée
assez juste de ce qu'est actuellement une construction de Pompéi; la restauration est également
sérieuse, sobre et dans un bon esprit. Quant à M. Ulmann, nous ne saurions le féliciter de ses
dessins très-bien faits, irréprochablement lavés, mais d'un aspect froid qui rappelle les modèles
tristes et fastidieux qu'on copiait, il y a vingt-cinq ans, dans tous les ateliers d'architecture ; on
ne nous fera jamais croire que ces reproductions, éternellement les mêmes, servent à l'instruction
des jeunes architectes et puissent aider en quoi que ce soit à la solution des problèmes posés
actuellement ; et nous ne pouvons nous empêcher de dire qu'il y aurait bien d'autres moyens
d'utiliser l'ardeur et le talent des lauréats de l'École des beaux-arts.
Au surplus, dans le cas présent, il était, à notre avis, plus juste de récompenser M. Bruneau
pour son travail sur le château de Coucy, étude très-utile faite avec soin et intelligence, et donnant
une idée très-exacte des combinaisons si ingénieuses et des systèmes de constructions qui distin-