LE COMMERCE DES OBJETS D'ART
et
LES VENTES PUBLIQUES
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émontrer que le moyen âge était collectionneur n'est pas difficile,
bien qu'on ait prétendu le contraire. Dans un temps où le numé-
raire était rare et les institutions financières presque nulles, cha-
cun convertissait sa richesse mobilière en objets précieux, comme
le font encore les Orientaux. L'orfèvrerie, les bijoux, les manus-
crits, les tapisseries, les armes, les meubles rares devenaient
ainsi des valeurs de placement, facilement négociables, et les
capitaux, déguisés sous une enveloppe artistique, s'étalaient sur
le dressoir et dans la salle, voyageaient dans les coffres; au besoin
on pouvait les aliéner, les mettre en gage, ou les envoyer à
Lettre .lu XTI ' siècle. Collection DOtuUtte. •» . f« p. _ ■ j 11 1 1
l atelier monétaire. La main-d œuvre représentait une plus-value
que chacun savait apprécier, et souvent cette plus-value était plus apparente que réelle. Pour
peu qu'il possédât une certaine fortune, le seigneur avait à ses gages un orfèvre, un enlumineur,
un imagier faisant partie de la maison et ne travaillant que pour lui ; son soldat en temps de
guerre, son ouvrier en temps de paix. La châtelaine et ses femmes se chargeaient de tisser et
de broder les étoffes précieuses. Dans ces conditions, le prix de fabrique était réduit à sa plus
simple expression, chacun pouvait transformer son avoir à peu de frais, sans s'exposer à une
dépréciation trop onéreuse.
Ainsi la curiosité en France n'est pas, comme bien des gens le pensent, une maladie
moderne. Au moyen âge, et surtout dans les premiers siècles, les trésors des églises, des princes,
des seigneurs, des riches bourgeois, sont de véritables collections; bien mieux, leur curiosité est
une opération financière, un placement, — nous n'avons pas même inventé ce perfectionnement.
i. Voir l'Art, )' année, tome III, pages 7) et 14;.
Tome X.
2)
et
LES VENTES PUBLIQUES
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émontrer que le moyen âge était collectionneur n'est pas difficile,
bien qu'on ait prétendu le contraire. Dans un temps où le numé-
raire était rare et les institutions financières presque nulles, cha-
cun convertissait sa richesse mobilière en objets précieux, comme
le font encore les Orientaux. L'orfèvrerie, les bijoux, les manus-
crits, les tapisseries, les armes, les meubles rares devenaient
ainsi des valeurs de placement, facilement négociables, et les
capitaux, déguisés sous une enveloppe artistique, s'étalaient sur
le dressoir et dans la salle, voyageaient dans les coffres; au besoin
on pouvait les aliéner, les mettre en gage, ou les envoyer à
Lettre .lu XTI ' siècle. Collection DOtuUtte. •» . f« p. _ ■ j 11 1 1
l atelier monétaire. La main-d œuvre représentait une plus-value
que chacun savait apprécier, et souvent cette plus-value était plus apparente que réelle. Pour
peu qu'il possédât une certaine fortune, le seigneur avait à ses gages un orfèvre, un enlumineur,
un imagier faisant partie de la maison et ne travaillant que pour lui ; son soldat en temps de
guerre, son ouvrier en temps de paix. La châtelaine et ses femmes se chargeaient de tisser et
de broder les étoffes précieuses. Dans ces conditions, le prix de fabrique était réduit à sa plus
simple expression, chacun pouvait transformer son avoir à peu de frais, sans s'exposer à une
dépréciation trop onéreuse.
Ainsi la curiosité en France n'est pas, comme bien des gens le pensent, une maladie
moderne. Au moyen âge, et surtout dans les premiers siècles, les trésors des églises, des princes,
des seigneurs, des riches bourgeois, sont de véritables collections; bien mieux, leur curiosité est
une opération financière, un placement, — nous n'avons pas même inventé ce perfectionnement.
i. Voir l'Art, )' année, tome III, pages 7) et 14;.
Tome X.
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