Frise tirée de
l' « Orthographia » de Joh. Daniel
publiée par Joh. Christoph Weigel.
Preisler,
L'OEUVRE DE RUBENS EN BELGIQUE'
l y a quatre ans, l'art célébrait à Florence
l'anniversaire de Michel-Ange2 et la foule émue
se pressait à la chapelle des Médicis, autour
de cette Nuit palpitante et de cette belle
Aurore qui semble toujours prête à tressaillir;
pareille émotion nous attend en l'église Notre-
Dame d'Anvers, devant les œuvres de Rubens.
Chefs d'école tous les deux, quoique bien
différents par leurs tendances, Michel-Ange et
Rubens ont eu l'insigne honneur de formuler
un idéal et de réaliser en eux les aspirations,
les efforts d'une longue génération d'artistes.
Longtemps les deux écoles avaient marché
de pair comme deux sœurs jumelles, qui s'en-
richissent mutuellement. Tandis que Giotto, à
Florence, Masaccio, Angelico da Fiesole ani-
Le««e urée de i'. Orthographia » de joh. D.niei Preisier, niaient les figures byzantines, à Bruges c'étaient
publiée par joi, christoph weigei. les frères yan Ejck qui dégageaient l'art du
symbole, étudiaient l'organisme dans toutes ses manifestations, et trouvaient un moyen technique
qui devait féconder la Renaissance; Memling cherchait la grâce et l'élégance, Quentin Metsys
avait trouvé le drame. Puis les guerres religieuses entravèrent le courant, qui s'épancha vers
l'Italie. L'art flamand devint stationnaire, s'étiola. Pour aviver la séve, on allait à Venise, à
Rome, on empruntait à toutes les gloires, et la simplicité rigide et minutieuse des disciples des
Van Eyck se prêtait mal aux élégances de ces fils de la Grèce : Léonard de Vinci, Raphaël,
Michel-Ange et tant d'autres. On imitait la forme sans comprendre l'esprit. Il n'en sortit que
des hybrides, œuvres factices ou emphatiques.
Rubens aussi suivit le flot, mais il était mieux préparé, quoique peut-être on exagère les
influences contradictoires de ses deux maîtres, Adam Van Noort et Otto Vœnius. Le premier,
vrai Flamand, peintre du sang et de la chair, aurait cultivé ses facultés toutes objectives ; l'autre,
pseudo-Corrége et éclectique, aurait discipliné ses emportements juvéniles. Mais audacieux comme
l'était l'élève, vaillant, plein de cette assurance que donne l'équilibre de toutes les facultés, il ne
1. Voir dans l'Art, 5* année, tome iii, pages 202, 217 et 241, l'étude biographique de M. Alphonse Wautcrs sur Pierre-Paul Rubens, et
page 224, l'article de M. Henri Hymans sur les Graveurs de Rubens.
2. Pour le centenaire de Michel-Ange, voir l'Art, 1" année, tome iii.
Tome X. 34
l' « Orthographia » de Joh. Daniel
publiée par Joh. Christoph Weigel.
Preisler,
L'OEUVRE DE RUBENS EN BELGIQUE'
l y a quatre ans, l'art célébrait à Florence
l'anniversaire de Michel-Ange2 et la foule émue
se pressait à la chapelle des Médicis, autour
de cette Nuit palpitante et de cette belle
Aurore qui semble toujours prête à tressaillir;
pareille émotion nous attend en l'église Notre-
Dame d'Anvers, devant les œuvres de Rubens.
Chefs d'école tous les deux, quoique bien
différents par leurs tendances, Michel-Ange et
Rubens ont eu l'insigne honneur de formuler
un idéal et de réaliser en eux les aspirations,
les efforts d'une longue génération d'artistes.
Longtemps les deux écoles avaient marché
de pair comme deux sœurs jumelles, qui s'en-
richissent mutuellement. Tandis que Giotto, à
Florence, Masaccio, Angelico da Fiesole ani-
Le««e urée de i'. Orthographia » de joh. D.niei Preisier, niaient les figures byzantines, à Bruges c'étaient
publiée par joi, christoph weigei. les frères yan Ejck qui dégageaient l'art du
symbole, étudiaient l'organisme dans toutes ses manifestations, et trouvaient un moyen technique
qui devait féconder la Renaissance; Memling cherchait la grâce et l'élégance, Quentin Metsys
avait trouvé le drame. Puis les guerres religieuses entravèrent le courant, qui s'épancha vers
l'Italie. L'art flamand devint stationnaire, s'étiola. Pour aviver la séve, on allait à Venise, à
Rome, on empruntait à toutes les gloires, et la simplicité rigide et minutieuse des disciples des
Van Eyck se prêtait mal aux élégances de ces fils de la Grèce : Léonard de Vinci, Raphaël,
Michel-Ange et tant d'autres. On imitait la forme sans comprendre l'esprit. Il n'en sortit que
des hybrides, œuvres factices ou emphatiques.
Rubens aussi suivit le flot, mais il était mieux préparé, quoique peut-être on exagère les
influences contradictoires de ses deux maîtres, Adam Van Noort et Otto Vœnius. Le premier,
vrai Flamand, peintre du sang et de la chair, aurait cultivé ses facultés toutes objectives ; l'autre,
pseudo-Corrége et éclectique, aurait discipliné ses emportements juvéniles. Mais audacieux comme
l'était l'élève, vaillant, plein de cette assurance que donne l'équilibre de toutes les facultés, il ne
1. Voir dans l'Art, 5* année, tome iii, pages 202, 217 et 241, l'étude biographique de M. Alphonse Wautcrs sur Pierre-Paul Rubens, et
page 224, l'article de M. Henri Hymans sur les Graveurs de Rubens.
2. Pour le centenaire de Michel-Ange, voir l'Art, 1" année, tome iii.
Tome X. 34