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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 3.1877 (Teil 3)

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Champier, Victor: Le congrès des architectes: visite à l'exposition universelle de 1878-Voyage à Amiens
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https://doi.org/10.11588/diglit.16906#0033

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LE CONGRÈS DES ARCHITECTES

VISITE A L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1878 — VOYAGE A AMIENS

On sait que chaque année les deux sociétés d'architectes des
départements et de Paris se réunissent en congrès pour discuter
les questions spéciales, visiter les monuments nouveaux, et, après
examen, décerner des récompenses aux lauréats de leurs con-
cours.

Cette année, on avait inscrit au programme, outre la lec-
ture de quelques mémoires, plusieurs visites à l'hôtel Carnavalet,
à l'Exposition universelle de 1878, aux nouvelles mairies des
XIIe, XIII", XVe et XXe arrondissements, à l'hôtel et au musée
des Archives, au musée égyptien du Louvre, enfin un voyage à
Amiens, où les deux constructions du musée et du palais de
justice ainsi que la cathédrale devaient être d'excellents sujets
d'études.

La visite aux chantiers de l'Exposition a été extrêmement
intéressante; c'est le mardi 12 juin, lendemain de l'ouverture du
Congrès, qu'elle a eu lieu. Rendez-vous avait été donné à neuf
heures du matin, avenue de La Bourdonnaye ; l'assemblée était
brillante.

Nous partîmes cinquante et, par un prompt renfort,
Nous nous vîmes trots cents en arrivant au port.

Le commissaire général de l'Exposition, M, Krantz, ainsi
que ses collaborateurs M. Du val, directeur des travaux,
MM. Hardy, Davioud et Bourdais, architectes, se mirent gracieu-
sement à la disposition du Congrès et, marchant en tète de la
petite troupe, ayant sous le bras leurs cartes qu'ils étalaient de
temps à autre, ils donnèrent avec la plus grande obligeance les
renseignements nécessaires.

Les travaux sont dans un état marqué d'avancement et les
lignes principales du vaste parallélogramme du Champ-de-Mars
s'accusent déjà avec netteté. Les maçonneries sortent du sol et
les galeries métalliques s'élèvent comme par enchantement. Les
chantiers des constructions de fer sont en pleine activité. L'usine
Cail a presque terminé les charpentes du vestibule faisant face
a l'Ecole militaire, et d'ici quelques jours les zingueurs et les
peintres-vitriers commenceront les travaux de toiture des sections
terminées. Déjà on procède au chevronnage des grandes pièces,
au fur et à mesure de leur assemblage. Toutes ces pièces sont
préparées à l'usine et sont dressées sur place au moyen de mo-
teurs mécaniques installés sur des échafaudages fixes ou roulants.
L'opération du montage se fait avec une précision mathématique
et une rapidité merveilleuse.

Tout en marchant péniblement à travers les matériaux on
arrive au pont de l'Aima, et M. Krantz explique que ce pont sera
bientôt complètement couvert et que sur son tablier passeront
les gros tuyaux qui amèneront les eaux du bassin de la cascade
dans le palais du Champ-de-Mars. Ce pont provisoire sera beau-
coup plus large que l'autre.

Nous voilà au Trocadéro où la galerie des beaux-arts est à
Peu près terminée pour ce qui concerne le gros œuvre des ma-
çonneries. C'est M. Davioud qui pilote maintenant les visiteurs
en leur expliquant les détails de cette partie dont il a la charge.
Le palais des beaux-arts consiste dans une longue galerie qui a
la forme d'une demi-ellipse dont le côté concave regarde le Champ-
de-Mars. De ce côté règne une colonnade ou une série de hautes
arcades qui formeront un magnifique promenoir. La vue s'étend
sur la Seine, découvrant les ponts, les quais et les monuments
dont les profils perdus dans le lointain font une décoration
sp'endide.

Au milieu de cette galerie s'élève la grande salle destinée aux
fêtes, aux distributions de récompenses, aux conférences et enfin
à l'exécution de grandes compositions musicales. Elle contiendra
sept mille personnes environ. Sa forme est ovoïdale; tout le fond
est un demi-cercle de 50 mètres de diamètre ; puis, à partir du
diamètre, les murs se rapprochent jusqu'à une grande conque ou
niche ronde de 50 mètres d'ouverture, où seront placés soit l'ora-
teur, soit l'orchestre et les chœurs. Un orgue monumental gar-
nira le fond de cette conque.

Depuis vingt ans, M. Davioud rêvait la salle qu'il construit
aujourd'hui. Je vous laisse à penser s'il est au comble de ses
vœux. Lui et M. Bourdais, son collègue, ont fait récemment
une conférence à la Société des compositeurs, dans laquelle ils
ont exposé le problème qu'ils avaient eu à résoudre relativement
à la sonorité d'un aussi vaste espace, et comment ils espèrent
l'avoir résolu. Puisque le palais du Trocadéro, d'après la con-
vention passée entre l'État et la ville de Paris, doit subsister après
l'Exposition, rien n'empêchera d'y donner de grandes auditions
musicales où les orphéons, les musiques militaires, les grands
orchestres, les chœurs, l'orgue pourront résonner devant une
assemblée nombreuse.

Et maintenant, à Amiens. —■ Le voyage est charmant; la
chaleur n'est pas très-forte, la route est belle: nous arrivons à
onze heures du matin.

C'est une curieuse ville, Amiens. On y voit des rues qui ont
conservé les noms les plus étranges : la rue de l'Araignée, rue
des Andouillettes, rue de l'Entonnoir, rue de la Queue-de-Vache,
du Gros-Navet, place de la Tuerie, de l'Écorcherie, etc. On y
rencontre à chaque pas de pittoresques débris qui attestent son
antiquité. La cathédrale, construite sur les plans de René de
Luzarches, est l'un des plus beaux monuments religieux que
possède la France, une des productions les plus parfaites de
l'architecture ogivale. C'est vers la cathédrale que se rend tout
d'abord le Congrès des architectes.

Un cri d'admiration retentit quand, par une rue latérale, le
cortège se trouve devant le magnifique monument. On ne sau-
rait rêver plus de légèreté et plus de majestueuse grandeur, plus
d'élégance et plus de force. La façade est une merveille de
richesse sculpturale, de goût décoratif. L'architecte diocésain,
M. Lisch, explique à ses confrères les derniers travaux qu'il a dû
faire à son cher monument dont il parle av^c une tendresse
amoureuse ; il montre les dégâts subis par le clocher dans le
terrible orage de mars 1876; il détaille les réparations que le
manque d'argent le force d'ajourner, et fait ressortir ce que
gagne en beauté la façade de l'église depuis que ie conseil mu-
nicipal d'Amiens a fait abattre les maisons qui en obstruaient la
vue.

Dans l'intérieur on admire beaucoup les stalles qui, de l'aveu
de tous, sont les plus belles de France. Qu'on s'imagine une
suite de cent dix sièges dont les miséricordes, les accoudoirs, les
panneaux, les hauts-dossiers, les dais, pendentifs et pyramides
sont historiés de trois mille six cent cinquante figures, et tout
cela formant un ensemble architectural dont la finesse, l'élé-
gance, la gravité sont relevées par une profusion décorative du
plus magnifique effet. Le haut de la boiserie est recouvert d'une
couche de poussière dont la couleur grise contraste, il est vrai, avec
la couleur d'ébène du bas. Mais en y réfléchissant on peut trou-
ver, là encore, une occasion d'admirer : ces sommets d'antiques
trônes ont je ne sais quel air de vieillards à la tète blanchissante.
 
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