ANTONIO ALLEGRI
DIT LE
Æorrèjje.
a peinture qui avait atteint le sublime de l’expres-
sion et de la grâce avec Raphaël, de la grandeur
et de la majesté avec Michel-Ange, du coloris avec
le Titien, reçut du Corrège, maître souverain dans
la distribution de la lumière et de l’ombre, dans la
dégradation des couleurs, dans l’élégance des po-
ses, dans la science des raccourcis, les rares qualités
qui lui manquaient. Aussi a-t-on dit de lui que si
ÿ ( Raphaël exprimait merveilleusement les effets de l’âme,
personne n’avait pu rendre les effets des corps comme
ce contemplateur assidu de la Nature, qui lui révéla des
beautés dont le secret se perdit après lui.
Antoine Allegri naquit à Correggio, terre des États
d’Este, en 1594. Les détails qu’on a recueillis sur sa vie sont
en petit nombre et incertains. Quelques auteurs le font
f naître de parents aisés et d’une condition honorable ; au con-
traire, Vasari assure qu’il fut «misérable autant qu’on peut
l’être. » La vérité est qu’il était père de quatre enfants, et que la répu-
tation qu’il avait acquise dans son art n’était pas assez grande alors
pour le faire riche à l’exemple de Raphaël et du Titien. « Je pleure au
dedans de moi, écrivait Annibal à Louis Carrache, au seul penser de
l’infortune du pauvre Antoine : un si grand homme (s’il est un homme
et non pas un ange), être perdu ici dans un pays où il n’est pas connu,
DIT LE
Æorrèjje.
a peinture qui avait atteint le sublime de l’expres-
sion et de la grâce avec Raphaël, de la grandeur
et de la majesté avec Michel-Ange, du coloris avec
le Titien, reçut du Corrège, maître souverain dans
la distribution de la lumière et de l’ombre, dans la
dégradation des couleurs, dans l’élégance des po-
ses, dans la science des raccourcis, les rares qualités
qui lui manquaient. Aussi a-t-on dit de lui que si
ÿ ( Raphaël exprimait merveilleusement les effets de l’âme,
personne n’avait pu rendre les effets des corps comme
ce contemplateur assidu de la Nature, qui lui révéla des
beautés dont le secret se perdit après lui.
Antoine Allegri naquit à Correggio, terre des États
d’Este, en 1594. Les détails qu’on a recueillis sur sa vie sont
en petit nombre et incertains. Quelques auteurs le font
f naître de parents aisés et d’une condition honorable ; au con-
traire, Vasari assure qu’il fut «misérable autant qu’on peut
l’être. » La vérité est qu’il était père de quatre enfants, et que la répu-
tation qu’il avait acquise dans son art n’était pas assez grande alors
pour le faire riche à l’exemple de Raphaël et du Titien. « Je pleure au
dedans de moi, écrivait Annibal à Louis Carrache, au seul penser de
l’infortune du pauvre Antoine : un si grand homme (s’il est un homme
et non pas un ange), être perdu ici dans un pays où il n’est pas connu,