Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 3)

DOI Artikel:
Chennevières, Henry de: Les Slodtz: décorateurs de pompes funèbres et de fêtes de cour
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.18879#0302

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
2 66

L'ART.

les intendants des Menus-Plaisirs, les de Cindré, de Bonneval, de Curis, Papillon de la Ferté, le
renom d'organisateurs des divertissements officiels. Les catafalques qu'ils élevèrent n'étaient-ils pas
une fête pour les yeux, un spectacle à part ?

Les deux aînés débutent, en iy35, dans le service funèbre du maréchal de Villars. C'était un
grand capitaine : ils entourent son cénotaphe de canons, de mortiers, d'affûts, de cuirasses, toutes
armes au milieu desquelles un guerrier voudrait mourir. L'église Saint-Sulpice devient « un
champ de Mars », et l'ombre du vainqueur de Denain sourit à cet élogieux bout-de-l'an. Trois
mois après (avril ij35), autre pompe commémorative pour la reine de Sardaigne. Dédaignant les
inscriptions et emblèmes qui composaient les catafalques sous Louis XIV, nos deux sculpteurs
introduisirent des figures de ronde bosse de plusieurs mètres d'élévation. Le Temps, une faux à
la main, moissonne sceptres, mitres et tiares, casques, livres et houlettes. La Mort, assise, agite
sa torche que des enfants voudraient éteindre. Religion et Piété, Espérance, Libéralité, Pru-
dence, Charité, perfections de la royale défunte, témoignent par leurs attitudes symboliques qu'elles
seules défendent la mémoire de la princesse. Cochin, l'ami des Slcdtz1, le graveur du roi, nous a
conservé le souvenir illustré de ces pompes funèbres. Comme ses petits personnages, les princes du
grand deuil, sont coquettement distraits ! C'est merveille de les voir se chuchoter leurs impressions.
En 1741, la seconde femme du roi de Sardaigne meurt. Voilà qui embarrassera les Slocltz : même
pays, même rang princier, mêmes vertus officielles? — Point. Les deux frères recourent à l'allégorie,
cette figure que le siècle aimait si fort. Le vieil Océan, étendu sur un rocher entr'ouvert, « figure
l'abîme où les fleuves ainsi que les ruisseaux vont se perdre à la fin de leur course ». La Dore,
rivière du Piémont, belle nymphe couronnée, se précipite dans le gouffre fatal. Deux ruisseaux —
deux enfants — tout en pleurs, ainsi qu'une naïade « qui représente l'Amour et la Fidélité des
peuples de Sardaigne », s'efforcent de la retenir. Au-dessus du catafalque, la Mort, une couronne
au front et armée de sa faux, plane de ses noires ailes sur sa victime et semble la garder. Quelles
caillettes que ces tètes de nymphes , et qu'elles devaient ravir d'aise avec leurs grâces mignardes
les admirateurs de cour! C'était aimable, cela trouvait grâce'-. Les funérailles et le service de la
Dauphine (1746) fournissent une double occasion aux Slodtz : Saint-Denis et Notre-Dame leur
prêtent encore leurs vastes nefs. Les estampes de Cochin montrent s'ils réussirent"'. En cette
occasion, ils eurent tout l'honneur. Le peintre des Menus-Plaisirs, Perrot, les avait secondés
jusqu'alors dans les détails où la couleur seyait bien. Cette année-là, ils demeurèrent seuls. Seuls
aussi, le i5 décembre du même an de grâce 1746, pour organiser la pompe funèbre de Philippe V
d'Espagne. « De grandes Renommées, dont l'attitude semble exprimer qu'elles vont annoncer aux
quatre parties du monde la perte de ce grand Prince », couronnaient la chapelle ardente « d'archi-
tecture rustique » clans laquelle se trouvait le cénotaphe du souverain. La reine de Pologne
succombe en 1747, et les Slodtz conduisent encore ce deuil, commandé comme les autres par
l'étiquette française;'.

Voici venir leur frère cadet Michel-Ange. 11 a travaillé près d'eux et sait son art funèbre.
« Au premier catafalque qu'il fit du roi et de la reyne d'Espagne (1760), il se leva un applau-
dissement général par la surprise agréable que causèrent la noblesse et la simplicité de son goust
et cela faillit lui mériter la croix de Saint-Michel ■'. »

directeur de l'Académie de France, le tombeau du curé de Saint-Sulpice, celui du cardinal d'Auvergne à Vienne (Dauphiné), la décoration du
chœur de Saint-Germain-l'Auxerrois. (Voir pour la biographie des trois frères : Mariette, tome V, page 223 et suivantes; Mémoires inédits
de Cochin, pages io6-i36 et 1G2-173; Galette littéraire de l'Europe, tome IV, page 267 et suivantes ; Mercure de France, janvier 1766, tome II,
page 1C7 et suivantes; Correspondance de Grimm, septembre 1757; Dictionnaire critique de Jal; Lettre à un partisan du Bon Goût sur l'expo-
sition des tableaux faite dans le grand salon du Louvre le 2H août Jj55, page j8 et suivantes; Lettre sur le Salon de 1/55, adressée à ceux
qui la liront, Amsterdam, iy55, page 78; Almanach des Beaux-Arts, Paris, 1762, passim.

1. Cars grava d'après Cochin trois portraits en médaillon des frères Slodtz (Salon de 1737; n" i5a).

2. « Menues Fournitures de la Chambre du Roy en 1741 : Au S. Cochin fils graveur payé la somme de 5oo livres pour le dessein en
petit qu'il a fait pour la gravure de la décoration de la pompe funèbre de la Reyne de Sardaigne à Notre-Dame. — Au S. Cochin la somme de
2,5oo livres pour avoir gravé sur une planche de cuivre le dessein de la décoration cy dessus dite. » (Archives nationales, o'3263.) Cette
estampe que possède la Chalcographie du Louvre figura au Salon de 1742.

3. Numéros 4o5i et 4052 de la Chalcographie Nationale.

4. Numéros 453 et 4054 de la Chalcographie Nationale.

5. Voir, dans les Mémoires inédits de Cccliin, l'histoire de cette décoration, page 108 et suivantes. — M. de Marigny n'y parait pas sous
un jour favorable.
 
Annotationen