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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 3)

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Heulhard, Arthur: Art dramatique, [3]: Théatre du gymnase: le Duel de Pierrot; théatre de campagne
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Fouqué, Octave: Art musical, [2]: concours annuels du conservatoire
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https://doi.org/10.11588/diglit.18879#0156

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L'ART.

140

de campagne est approvisionné par tout ce que Paris compte
de plus expert en l'art d'écrire la comédie de salon : art dis-
cret, fait de délicatesses et de nuances, composé pour de petits
cadres, et destiné à noble compagnie. Les fournisseurs ordi-
naires de cette scène choisie sont de votre connaissance. Qui
citerai-je? Legouvé, Henri de Bornier, Meilhac, Halévy, Gon-
dinet, d'Hervilly, Abraham Dreyfus, Labiche, Deroulède,
Jacques Normand, et j'en passe pour ne pas grossir la liste.
C'est dans cette série de volumes, paraissant presque à date
rixe, que nous lisons le texte exact des monologues à la mode.
Quelques savnettes insérées dans le septième volume ont été
entendues déjà soit à des soirées aristocratiques, soit au cercle.
D'autres, qui ne sont pas toujours les meilleures, étaient igno-
rées, et l'impression nous les révèle. M. Charles Cros, le
monologiste à outrance, y est représenté par quatre morceaux :
l'Ami de la maison, l'Homme propre, le Pendu et l'Homme qui
a trouvé. Je suis loin d'anathématiser le monologue et de le
proscrire absolument comme genre. Quand il est ennuyeux ou
qu'il passe les bornes, c'est la pire chose que je sache, mais
s'il relève d'une pointe d'observation humouristique, s'il
dénonce avec un goût prononcé de fantaisie anglaise une
extravagance poussée dans quelque couche ridicule de notre
société, je n'y vois rien à reprendre. Il n'y a pas à craindre qu'il
s'empare de la scène, à l'exclusion des genres adoptés ; ne le
repoussons donc pas en bloc, et pardonnons-lui une partie de
ses exagérations, à la condition que le fond en soit vrai. Cette
réflexion me vient à propos des quatre monologues de M. Cros
que je rencontre dans la nouvelle série du Théâtre de cam-
pagne. Il y en a deux qui confinent à l'imagination apoca-
lyptique, le Pendu et l'Homme qui a trouvé. Dans le premier,
il s'agit d'un individu qui se prend le cou, de minute en
minute, pendant son soliloque, en faisant la grimace, parce
qu'il a tenté de se pendre pour avoir de la corde de pendu
dans sa poche. Si c'est là du comique, je veux bien qu'on me
pende à mon tour. Dans le second cas, le Monsieur qui a
trouvé, un monsieur a découvert que tout ce qui est rayé va
vite, et voici ce qu'il raconte : « J'entre au Jardin des Plantes
et j'arrive devant le zèbre. Il était fou, ce zèbre, il courait dans

son petit parc... il courait! Je me dis : le zèbre, célèbre par sa
vitesse, est rayé; donc ce qui est rayé va vite, et, réciproque-
ment tout ce qui va vite est rayé. Je vais vous le prouver. Il
était tard : je prends le tramway, ça va vite, c'est une sorte de
chemin de fer, ça a des rails, c'est rayé. En tramway, je réca-
pitulais : le cousin de ma femme... pantalon rayé, il marche
vite. Il commande une batterie de canons rayés. Qu'est-ce qui
va plus vite que les obus? J'étais sur l'impériale; il se met à
tomber des gouttes. C'était un orage; des éclairs! Voilà qui
est rapide ! ça raye le ciel ! C'est rayé, c'est comme les fils du
télégraphe, des raies dans la campagne où l'électricité passe
avec une vitesse! La pluie cesse; sur le boulevard Montmartre,
j'entends : « Il arrive! tout frais, il arrive! » C'était une mar-
chande de poissons. Ces poissons paraissaient tout frais, en
effet; ils sont donc arrivés bien vite... Parbleu! ils ont le dos
rayé ! Etc., etc. ! » Ces considérations sur les rayures se pour-
suivent obstinément pendant trois grandes pages, et le peu de
drôlerie qu'elles dégagent pour le présent va même au-delà de
la charge d'atelier. Mais avec quelle stupeur ne les relirons-
nous pas dans dix ans! Et que serait-ce si nous avions le pou-
voir de les relire dans cent ans ! Je n'ose songer à la déchéance
profonde qui attend le genre de soliloque représenté par le Pendu
et par l'Homme qui a trouvé. Si j'insiste sur le sort qui menace
les monologues sans base, les monologues dans l'espace, c'est
que je voudrais voir le genre servir au redressement des petits
ridicules, puisque la comédie a la charge des grands. A cette
famille utile appartiennent l'Ami de la maison et l'Homme
propre, du même Charles Cros. L'un abuse de l'hospitalité
d'un ami et crie à l'ingratitude le jour où on met un terme à
ses exigences; l'autre se rend insupportable à tous par excès
d'ablutions et devient grossier envers autrui à force de menus
soins de toilette. Les deux types sont gais, ils existent en chair
et en os, on les a vus et on s'en amuse. M. Cros a été bien
avisé en les accrochant à son mur, et ces pochades,'avec
Adélaïde et Vermouth de Ch. Verconsin, sont ce qu'il y a de
plus agréable dans le Théâtre de campagne pour 1S81.

Arthur Heui.hard.

ART MUSICAL

CONCOURS ANNUELS DU CONSERVATOIRE







c











0











E Conservatoire est une institution fort attaquée
et qui donne lieu à une polémique sans cesse
renaissante. Plus d'une fois il a vu ceux qui
devaient prendre sa défense tourner les armes
contre lui, et ses propres enfants se mettre des
premiers à saper sa vieille autorité. Les artistes qui, quoi qu'on
pense, ont le sens critique très développé, sinon toujours d'une
parfaite justesse, ont crié si fort contre l'enseignement du
Conservatoire, que leurs clameurs ont été entendues dans le
camp politique, et quelque chose de leurs plaintes a passé
dans les documents officiels. « L'enseignement du Conserva-
toire, dit M. Lockroy, rapporteur du budget des beaux-arts à
la Chambre des députés pour 1882, a donné lieu à de nom-
breuses critiques. Les concours de chant, il est vrai, ne sont
pas inférieurs à ceux d'autrefois, mais dit-on, on connaît long-
temps à l'avance au Conservatoire les élèves qui obtiendront
le premier prix. Le concours n'a lieu, en réalité, qu'entre une
dizaine de sujets. » Hélas! pouvons-nous citer une école où il
en soit autrement? Du haut en bas de l'échelle universitaire, à

l'école primaire comme à l'École normale supérieure, il y a des
élèves plus forts et des élèves moins forts. La tendance du
maître —• et ici le reproche devient grave — est de négliger
les seconds pour s'appliquer à faire briller les premiers. Au
lycée, le professeur d'humanités réserve tous ses soins pour sa
tête de classe, pour les sujets qui doivent lui faire honneur au
concours général. Partout où il y aura des enseignants, des
enseignés et des concours, on verra se produire des faits
analogues, tant que l'humanité ne sera pas changée.

C'est donc en réalité l'institution des concours qu'on
incrimine, c'est elle qu'il faudrait arracher, comme une mau-
vaise herbe, du sol de l'instruction publique. On a proposé en
effet de substituer aux concours publics qui clôturent au
Conservatoire chaque exercice annuel, des examens également
annuels et publics, à la suite desquels des diplômes seraient
délivrés aux candidats méritants. Mais s'il est une branche de
l'activité intellectuelle où les concours aient leur raison d'être,
n'est-ce pas justement ici? Voici des postulants qui ne briguent
pas un poste plus ou moins rétribué, mais sûr; ils visent
 
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