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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 3)

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Yriarte, Charles: Lettres de Milan, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18879#0129

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LETTRES DE MILAN

i

La part de l'art à l'exposition de Milan. — L'exposition devant
le Parlement. — Impression générale. — Milan pendant
l'exposition. ■— Ouverture du nouveau Musée Poldi-Pej^oli.
— Conditions spéciales du legs fait à la ville de Milan. —
Inconvénients qui en résultent. — Les collections, etc.

Monsieur le directeur,

La direction du journal l'Art a bien voulu me demander, au
moment de mon départ pour l'Italie, de lui adresser quelques
lettres de Milan ; l'exposition des beaux-arts rentrait seule dans
le cadre de cette publication, je n'ai pas cru cependant qu'elle
comportât véritablement une étude, pour bien des raisons
auxquelles se rendent les Italiens et les Milanais eux-mêmes,
les plus prévenus en faveur d'une manifestation qui honore
leur ville.

Quand une exposition des beaux-arts fait appel à un pays
tout entier, quand on y convoque les artistes de toutes les
régions, depuis Venise jusqu'à Rome, Naples et Palerme,
il faut que chacun de ces centres de production donne sa
formule exacte, sa mesure vraie, rassemble toutes ses forces,
appelle toutes ses personnalités, et présente, en un mot, sous
son jour le plus complet et le plus favorable, les efforts de
chaque centre d'art dont l'ensemble constitue l'art national
avec toutes ses tendances diverses. Si quelques-uns des artistes
les plus marquants de ce même pays, par suite de circons-
tances particulières, se sont fixés à l'étranger et s'y sont fait
une place honorable, y représentant avec honneur le caractère
qui leur est propre, il faut que le pays les réclame pour cette
démonstration solennelle; et tous ceux qui combattent pour le
pays doivent, ce jour-là, prendre place sous la Bandiera
nationale.

Or, cet effort considérable, l'Italie l'avait fait il y a quelques
mois à peine, et la ville de Turin, dans une exposition qui sera
pour elle le point de départ d'un progrès réel, avait présenté
l'art italien sous son jour le plus favorable. L'Art s'est longue-
ment étendu sur cette exposition et il n'y a point à y revenir.
On comprend facilement qu'à une échéance aussi rapprochée
il était impossible d'exiger des artistes italiens les mêmes
efforts et les mêmes sacrifices, et, s'il était difficile, dans une
exposition nationale, de ne pas faire une place aux arts libéraux,
il était impossible, étant données ces conditions, d'obtenir un
résultat frappant qu'on pût considérer comme l'expression
réelle de la valeur de la nation dans le champ de la produc-
tion artistique. Je renonce donc à vous parler des beaux-arts
à l'exposition ; une telle étude n'aurait d'intérêt que pour la
localité elle-même, on le sent bien ; je me bornerai à signaler
l'impression générale qu'un étranger rapporte de son séjour à
Milan au moment de cette manifestation.

Tout d'abord, le succès est réel et il est incontestable.
Même au point de vue des intérêts immédiats, la ville en
a recueilli de brillants résultats. On ne demande point à une
cité de faire une spéculation en pareilles circonstances; il y
a des sacrifices nécessaires et qui s'imposent comme des
devoirs; on peut dire dès aujourd'hui que le résultat financier
est tout à fait inattendu. Toutes les expositions ont constitué
des sacrifices, celle-ci, pour parler net, est une bonne affaire.

Le Parlement italien avait accordé une subvention inscrite
au budget du ministère de l'agriculture et du commerce. Dès
aujourd'hui, après avoir examiné les chiffres des entrées,
M. Merzario, président de la commission générale du budget
Tome XXVI.

du Parlement, a fait un rapport des plus favorables sur les
résultats obtenus et annoncé à la Chambre qu'elle devait se
féliciter d'avoir coopéré à cette œuvre locale, devenue, par le
fait du concours de tout le pays, une manifestation nationale.

Les étrangers habitués aux grandes expositions univer-
selles sont blasés sur ces immenses concours des quatre parties
du monde; ils ont, s'ils sont un peu cosmopolites, assisté en
l'espace de quelques années aux expositions de Paris, de Lon-
dres, de Vienne, de Philadelphie, gigantesques entreprises dont
le souvenir ne peut que rendre indifférent à ces petites mani-
festations partielles. Comment oublier, en face des efforts
honorables, mais restreints, des Milanais, cette extraordinaire
galerie du travail de l'exposition de 1878, ce jardin mouve-
menté et inattendu de celle qui l'avait précédée, où toutes les
nations du monde avaient planté leur tente, enfin cette
prodigieuse galerie des machines de Philadelphie ? Malgré
cela, toute proportion gardée, Milan avait encore un cachet
spécial, quelque chose d'élégant, de propret, de gracieux, un
côté aimable et plein d'aménité , on ne sait quoi d'un salon de
bon ton, où malgré le mot national on se trouvait un peu en
famille (et famille de clocher, où le dialecte milanais était en
honneur), surtout de quatre à six heures, à cette fameuse galerie
de la céramique où l'on pouvait en une charmante réunion
dont l'exposition n'était que le prétexte, saluer tous ses amis
du club, présenter ses respects à toutes les belles dames du
lac de Côme, des villas de la Brianza ou du lac Majeur,
arranger les divertissements de la soirée , se donner rendez-
vous au cirque Renz, organiser l'excursion du lendemain ou
commenter la partie de la veille.

M. Merzario, le rapporteur du budget, constatera officielle-
ment que l'Italie, le jour de l'ouverture de cette exposition
de Milan, s'est trouvée à la tête d'industries nationales dont
elle n'avait jamais soupçonné l'existence, industries nées et
développées en quelques années dans un pays jusque-là tribu-
taire de l'étranger, et qui, désormais, produira à meilleur
compte ce qu'il demandait à prix d'or à ses voisins. C'est le
point capital, le résultat flagrant, le seul que je veuille constater
ici. De ce côté-là, les progrès effectués viennent, on peut le
dire hardiment, de ces grands concours nationaux dont on a
souvent contesté la réelle utilité. Le rapporteur pourra dire
aussi que, borné jusque-là à certaines industries absolument
italiennes, qui avoisinent l'art, — industries où l'imagination,
l'intuition, l'esthétique et le sentiment du mouvement, de la
vie, de la fantaisie et de la couleur, ont une plus grande place
que le calcul, que l'attention, l'exactitude et la science positive,
telles que la mosaïque, le verre filé, Yintarsiatura, la sculpture
des meubles, —le pays est devenu véritablement industriel par
la production des machines agricoles, de la carrosserie, de
l'acier, de la fonte, de la mécanique appliquée sous toutes ses
formes, etc., et qu'on a retrouvé aussi nombre de ressources,
dont la tradition s'était perdue, telles que la fusion du bronze
et autres. Nous nous bornerons à dire que l'installation était
ingénieuse, très pratique et que, malgré l'influence évidente
des plans adoptés précédemment ailleurs, elle présentait encore
quelques côtés neufs.

Au milieu de cet admirable jardin, avec de superbes
ombrages et de fraîches eaux, par une saison d'une ardeur
tropicale, l'œil, à chaque point de la perspective, se repose sui-
des fonds verts et sur des dômes de feuillage, et le visiteur,
fatigué de parcourir ces galeries closes, s'échappe sous les
arbres, où des bandes de musiciens, des Birreric, des glaciers,
des restaurants, des pavillons d'exposition intelligemment

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