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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 2)

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Chronique française
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https://doi.org/10.11588/diglit.16690#0083

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CHRONIQUE

FRANÇAISE

— Le 6 avril le jury d'architecture s'est réuni à une heure
sous la présidence de M. Lesueur pour juger le rendu de
irc classe. Le programme était: Une maison de traiteur. Onze
projets étaient exposés. Dans une première délibération et après
vote, le jury a prononcé la mise hors concours des numéros i, 9
et 10.

Dans une nouvelle délibération et après vote, le jury a décerné
les récompenses suivantes : irc médaille à M. Cléret, élève de
M. André; 2""' médaille à M. Mengin, élève de M. Vau-
dremer; 1" mention à M. Hennequin, élève de M. André.

On a jugé ensuite le concours de l'esquisse dont le sujet était
la Décoration d'une salle de festin. Quarante-cinq projets étaient
exposés. Le jury a décerné deux secondes médailles à MM. Chan-
cel et Larche, trois premières mentions à MM. Cléret, Bunel et
Schuler, et quatre secondes mentions à MM. Girault, Chancel
(Abel), Catenacci et Surreau.

— Les membres de l'Institut (section de sculpture) ont jugé,
dans la séance du 8 avril, le premier.essai des concurrents pour
le prix de sculpture. Sont admis au deuxième essai MM. Ful-
conis, Mengin, Quinton, Fossé, Boutellié, Caniez, Cammas,
Labatut, Carlier, Grasset, Berson, Peene, Steinier, Houssolle,
Darbefeuille, Pezreuse, Gourlat, Mombur, Cirasse, Bruneau.

— L'Académie des Beaux-Arts, dans sa séance du 8 avril, a
rendu son verdict sur le concours d'architecture pour le prix de
4,000 francs de la fondation Duc. Trois projets avaient été ac-
ceptés : l'hôtel de Camondo, de M. Destors; un projet de col-
lège à la campagne, de M. Degeorge; une gare de chemin de
fer, de M. Formigé. C'est ce dernier qui a obtenu le prix. Le
jeune lauréat s'était déjà fait remarquer de ses professeurs par
plusieurs monuments construits en province.

— Il n'est bruit maintenant à l'Hôtel Drouot que des ventes
de tableaux. C'est un amateur qui est las de sa collection et qui,
au feu des enchères, met à l'épreuve les œuvres de son choix, —
moyen d'estimer son propre goût au poids de l'or ; — ou bien
c'est une famille qui se partage la fortune d'un père et qui ne se
soucie pas de laisser ainsi dans un salon dormir l'argent sous la
forme d'oeuvres d'art. On se connaît aux affaires ou on ne s'y
connaît pas.

Il est certain en effet que depuis quelques années il n'y a pas
pour l'argent de placement meilleur que dans l'acquisition d'œu-
vres d'art. Il viendra sans doute un jour où, au lieu d'acheter
une obligation de la ville de Paris, les cuisinières préféreront
aller à l'Hôtel Drouot choisir un tableau de maître. Pour ma
part je sais un valet de chambre à qui la chose a si bien réussi
qu'il a quitté le service pour prendre boutique : c'est, à l'heure
qu'il est, un de nos plus riches marchands d'antiquités.

On ne peut toutefois, en voyant à quelles enchères fabuleuses
montent certaines peintures, s'empêcher de songer à la modicité du
prix dont se sont contentés les maîtres qui les ont faites. Que
diraient Rembrandt, Teniers, Véronèse, Ruisdael, s'ils voyaient
payer leurs chefs-d'œuvre des centaines de mille francs, eux qui se
contentaient de les vendre quelques centaines de francs et souvent
même se les faisaient payer en nature ? Michel-Ange ne toucha
que 3,000 ducats pour le magnifique plafond de la chapelle Six-
tine, et l'ornementation de la chapelle des Médicis, dans l'église
Saint-Laurent, à Florence, ne lui fut payée qu'à raison de un
florin d'or par jour. Paul Véronèse reçut environ 1,000 francs
pour son fameux tableau des Noces de Cana, aujourd'hui au
Louvre. Nous avons vu à la Bibliothèque nationale une lettre de
ce peintre dans laquelle il porte en compte les blancs d'ceufs et
l'outremer qu'il acheta pour le fond. Ce document est fort curieux
parce qu'en outre du prix modique payé à l'artiste, il nous apprend
que cette toile fut commencée à la détrempe et achevée à l'huile.

Il faudrait remonter presque jusqu'aux temps héroïques pour
voir les œuvres d'art payées comme elles le sont de nos jours. Je

ne plaisante point. Oui, les Grecs payaient au poids de l'or les
œuvres des artistes. En veut-on des exemples? Apelles reçut
20 talents en or (125,000 fr.) pour un portrait d'Alexandre. Le
roi Attale donna au peintre Aristide 100 talents (725,000 fr.)
pour une seule figure. Mnason, tyran d'Elatée, offrit au même
artiste de lui payer un petit tableau représentant une bataille à
raison de 10 mines (1,000 fr.) par figure, ce qui,' attendu qu'il y
avait une centaine de personnages, faisait 100,000 fr. pour tout
le tableau. Plutarque nous apprend qu'Aratus ayant envoyé à
Ptolémée quelques tableaux de Melanthus et de Pamphilus, le roi
lui fit remettre en retour 150 talents (environ 950,000 fr.).

Les Romains furent peut-être plus prodigues encore. L'empe-
reur Tibère avait payé 600,000 sesterces un tableau de Parrha-
sius représentant Atalante et Alèle'agre. Le successeur d'Auguste
légua par testament à un chevalier romain une peinture estimée
à un million de sesterces. Elle représentait... Comment dire
cela?... Voyez Suétone, il vous l'apprendra tout au long.

Pline rapporte des faits véritablement extraordinaires, des
monceaux d'or donnés pour des faïences, poteries diverses, tapis-
series et autres menus objets d'art. Enfin, pour terminer, sachez
que le fameux colosse de Rhodes coûta 300 talents ; que le colosse
du Soleil, au Capitole de Rome, fut payé 500 talents. Et cela
n'est rien auprès de la somme qui fut donnée à Zénodore pour
une statue colossale (les anciens aimaient les colosses) faite pour
la peuplade gauloise des Arvernes : quelque chose comme huit
millions de francs. Que sont les prix de l'Hôtel Drouot à côté de
ceux-là !

— La Comédie-Française vient d'acheter un autographe de
M"« Mars ; elle l'a payé deux cents francs. C'est une des plus cu-
rieuses et des plus piquantes lettres écrites par la spirituelle actrice
qui savait exprimer l'ironie aussi bien avec sa plume que sur les
planches. Elle est adressée à son amie, M.m Desbordes-Valmore,
momentanément a Lyon où son mari, qui était acteur, donnait
des représentations. M"*' Mars y parle de la rivalité entre les
classiques et les romantiques. Les journaux ont beau se pâmer sur
le succès des auteurs classiques, le public ne vient pas. Elle est
décidée à quitter lè Théâtre-Français « à moins que le gouverne-
ment, dit-elle, ne nous traite comme l'Opéra- en nous donnant
un maître. Nous n'avons plus les vertus voulues pour notre
république. »

Cette dernière phrase est dirigée contre ses camarades avec
lesquels elle se trouvait en désaccord pour une malheureuse ques-
tion d'argent. Comme la plupart des femmes, Mlle Mars n'avait
guère de mesure dans ses petites colères.

Voici quelques extraits de cette lettre qui n'a jusqu'à présent
été reproduite nulle part et dont nous devons communication à
l'obligeance toujours inépuisable de M. Guillard, l'archiviste du
Théâtre-Français.

« Ma chère Marceline, je commence d'abord par vous deman-
der pardon à deux genoux de n'avoir pas répondu à vos aima-
bles et bonnes lettres ; vous m'excuseriez si vous saviez à quel
point ma vie est tourmentée ! Je ne crois pas que le ministre le
plus occupé le soit autant que moi et d'une manière plus en-
nuyeuse ! Quand je vous dirai que mes journées se partagent,
sans en excepter une, entre le théâtre et les gens de loi ; que je
passe des tracasseries cabotines aux chicanes de la justice; que
dans ce moment j'ai deux procès sur les bras pour tâcher de sauver
un débris de fortune que mes amis n'ont pas eu le temps de
dévorer ! J'ai pour surcroît de chagrins mon pauvre Valville
bien malade. J'ai cru que nous allions le perdre car il y a ici
une mortalité sur les vieillards ; cet effroyable froid éteint en eux
la force et la vie ! Depuis deux jours pourtant j'ai l'espérance de
le sauver mais reprendra-t-il ses forces c'est ce que je n'ose
espérer: Julienne ne le quitte pas, elle a une patience d'ange
car il n'est pas bon malade, vous savez qu'en bonne santé il a des
 
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