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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 2)

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Pougin, Arthur: Théatre de l'Opéra
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https://doi.org/10.11588/diglit.16690#0108

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PREMIÈRE REPRÉSENTATION DE JEANNE D'ARC.

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joint à la réimpression du livret, donne une idée des divertisse-
ments de toute nature que l'on avait imaginés pour attirer le
public dans un établissement dont nos cafés-concerts ne peuvent
donner aucune idée.

Cette collection, qui réunit sous un format commode les
livrets des cinquante expositions de peinture et de sculpture du
xviii0 siècle a sa place marquée dans toutes les bibliothèques des
amateurs qui s'intéressent à Fart du xviip siècle.

Les tables qui accompagnent chaque série, les notices biblio-
graphiques placées en tête de chaque livret la rendent indispen-

Le premier ouvrage inédit qu'aura vu naître la nouvelle salle
de l'Opéra ne paraît pas destiné à fournir une longue carrière,
et ne semble même pas appelé à obtenir ce qu'on nomme un
succès d'estime. L'impression en effet a été plus que médiocre
sur les spectateurs de la première soirée. « Pauvre Jeanne d'Arc,
disait quelqu'un au sortir de la représentation, avoir été brûlée
vive d'abord, et être massacrée de nouveau, à plus de quatre
siècles de distance ! C'est dur ! » Le jugement était exact. Enten-
dons-nous cependant : exact, en ce qui concerne l'auteur; car
pour ce qui est du reste, interprétation ou mise en scène, on
n'eût pu souhaiter mieux. Mais que faire d'une œuvre si débile, si
faible, si incolore, si nulle à tous les points de vue, qui ne donne
absolument prise qu'au blâme, et pour laquelle on ne saurait
trouver un seul mot d'éloge ?

Lorsqu'il y a douze ans, l'Opéra donna Roland à Roncevaux,
tout le monde fut surpris du succès, et les musiciens tout les pre-
miers, tout en constatant les qualités relatives qui expliquaient
ce succès : un certain souffle héroïque, une sorte d'entraînement
chevaleresque, un caractère de grandeur assez remarquable qui
distinguait divers épisodes de la partition. Il est certain que le
duo de Turpin et de Roland, le trio de Durandal, ce qu'on a
appelé la Marseillaise de Roland, n'étaient dénués ni d'accent,
ni de grandeur, ni parfois d'un sentiment vraiment viril. Et
pourtant, chose singulière, rien de tout cela n'était véritablement
musical, et l'on sentait que l'artiste qui avait créé cette œuvre man-
quait absolument d'instruction première. Nulle part on ne trouvait
trace de style, les harmonies étaient lâchées, les phrases mélo-
diques étaient mal construites, mal attachées, et l'instrumentation,
où dominaient partout les cuivres, était traitée d'une manière
enfantine. Mais le poëme de Rolland était assez bien fait, il ren-
fermait quelques vers bien venus, et les passages que je viens de
signaler donnaient le change sur la valeur générale de l'œuvre.
Et puis, il faut bien le dire, Roland était une œuvre chauvine, et
nous n'avions pas encore, à cette époque, perdu le droit d'être
chauvins. L'auteur bénéficia de cette situation. Néanmoins, et
pour exprimer nettement ma pensée, je dirai que la partition de
Roland me fit l'effet d'un poeme qui contiendrait quelques beaux
sentiments et quelques grandes pensées, mais qui serait écrit en
vers faux et sans orthographe.

Aussi le premier moment passé, la réflexion venue, le feu
de l'enthousiasme s'éteignit graduellement. Après un bon nombre
de représentations fructueuses, Roland disparut de l'affiche, et la
valeur intrinsèque de l'œuvre était si faible que l'on peut affirmer
aujourd'hui, sans crainte de se tromper, que jamais elle ne
reverra le jour. Ce succès, en somme, fut un accident ; mais
M. Mermet ne l'a pas compris ainsi, et il a cru possible de renou-
veler cet accident. Sans donc se donner la peine d'apprendre ce

sable même à ceux qui possèdent une partie de l'édition originale.

Ajoutons que le soin et le goût qui ont présidé à cette pu-
blication, le choix des caractères et du papier, la reproduction
des plus jolis fleurons des livrets originaux, sont de nature à
contenter les exigences des bibliophiles les plus difficiles. Il a été
tiré pour les raffinés quelques exemplaires sur papier de Hollande
et sur papier de Chine, presque complètement épuisés aujour-
d'hui, et qui ne tarderont pas à faire prime dans les ventes de la
salle Sylvestre.

XX.

D: ARC

qui lui manquait, il s'est remis bravement au travail, et n'a pas
hésité à écrire une Jeanne d'Arc à l'aide des mêmes procédés trop
sommaires — et trop élémentaires. Malheureusement son poëme

— on sait que M. Mermet est son propre librettiste — est loin
de valoir celui de Roland; les vers n'en sont plus seulement bour-
souflés, mais absolument burlesques, et comme, musicalement, il
n'a retrouvé aucun des quelques élans qui avaient fait la fortune
de son précédent ouvrage, il est resté avec tous ses défauts sans
mettre en avant une seule de ses rares qualités.

Je viens de parler des vers de Jeanne d'Arc. Il faut donner
au moins quelques échantillons de leur valeur. Ici, c'est Jeanne
qui dit au roi :

Et si l'Anglais prend Orléans,
Que vous restcra-t-il céans ?

ce qui me semble d'un lyrisme absolument malséant. Là c'est
encore elle qui, voulant faire entendre que son secours sera
aussi rapide qu'efficace, s'écrie :

Orléans me devra, de bref, sa délivrance

ce qui, même au xv° siècle, devait être d'un français vi-
cieux. Ailleurs, et lorsqu'elle est hantée par ses visions, Jeanne
est illuminée à ce point qu'elle en 'perd toute espèce de sens
commun et qu'elle n'hésite pas à parler ainsi de son rêve :

Ce rêve audacieux, auquel mon âme aspire,
Se dresse menaçant !!!...

Plus loin, un seigneur répudie toute noblesse dans les vers
que voici :

Le roi n'a plus ni sou ni maille;
Dans !es bombances de la cour,
Le merle a remplacé la caille.

Enfin des ménestrels — ces gens-là ne respectent rien ! — en
arrivent à parler nègre, et s'écrient sans rire :

Gais ménestrels, aux accords de la lyre,
Chantons louange à toi, gentil Dauphin.

On n'en finirait pas si l'on voulait relever toutes les incar-
tades de ce livret qu'on pourrait justement qualifier de licencieux

— au point de vue poétique. Le malheur, c'est que la musique
ne lui cède en rien. On chercherait en vain dans toute la par-
tition de Jeanne d'Arc une page écrite correctement, un morceau
dont le plan soit tracé, une formule musicale (je ne dis pas une
idée, et pour cause), dont l'accompagnement soit supportable.

THEATRE DE L'OPERA

PREMIÈRE REPRESENTATION DE JEANNE
Opéra eu quatre actes et six tableaux
paroles et musique de m. A. mermet
 
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