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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 2)

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Bonnin, A.: Salon de 1876: peinture, [6]
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https://doi.org/10.11588/diglit.16690#0282

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SALON DE 1876

PEINTURE'

(suite )

t

III

portrait s

'exposition d'un portrait flatte la vanité de la personne représentée
et sert les intérêts du peintre. Ce double motif explique pourquoi les pein-
tures de ce genre sont toujours si nombreuses au Salon. Elles y portent
en quelque sorte l'enseigne de l'artiste, et son client, tout fier de la
publicité reçue par son image, conservera précieusement sur la toile le
numéro qui atteste la présence dans sa demeure d'une œuvre inscrite
aux catalogues officiels. -— Avoir son portrait au Salon, comme M. Émile
Augier, comme M. de Girardin, n'est-ce pas commencer à être quel-
qu'un? L/avoir une demi-douzaine de fois comme M110 Sarah Bernhardt,
ce serait de la célébrité ! Mais ce privilège est réservé aux souverains ou aux jolies femmes.
Que d'émotions résultent pour certaines gens de l'admission de leur image au palais des Champs-
Élysées! Chaque jour l'on va se revoir, se contempler d'un air qui signifie : « C'est moi qui
ai donné au peintre, en lui prêtant mes traits, l'occasion de produire cette page magistrale. » Et l'on
se promène sans affectation aux environs du tableau, épiant les regards des visiteurs, heureux si l'on
croit deviner à leur expression qu'ils vous ont reconnu. Malgré soi l'on se redresse, on reprend la
pose retracée par le peintre, et le triomphe est complet s'il arrive qu'une famille de provinciaux,
arrêtés devant la toile et tout aises de la subtilité avec laquelle ils ont distingué l'original, cherche
en chuchotant, dans le livret, votre nom qui ne peut être que celui d'un personnage considérable...

Je ne troublerai pas par d'importunes critiques ces innocentes joies, mais je ne ferai pas non plus
le jeu de ces petites satisfactions de vanité, en donnant une longue énumération des portraits exposés.
Je n'en désignerai que quelques-uns seulement, qui intéressent l'art, qui sont des œuvres supérieures,
ou des tentatives originales, hardies, ou bien encore des erreurs d'artistes en renom. Et sur ceux-ci
même, mon appréciation sera courte, car il est bien difficile d'exprimer certaines critiques sans
paraître atteindre avec le peintre la personne représentée. Pour éviter cet écueil, je me suis fait une
règle de la plus prudente réserve. — Comment dire, en effet, d'un portrait qu'il manque de distinction
ou de toute autre qualité plastique, sans risquer d'éveiller la susceptibilité du modèle? Dieu sait cepen-
dant s'il est pour rien dans l'affaire ! Tel peintre ne fera d'un Lauzun ou d'un duc de Richelieu qu'un
type vulgaire d'homme à bonnes fortunes, tel autre donnera d'un portefaix une image qui n'aura rien
de trivial ; tout cela dépend du sentiment de l'artiste et de la supériorité de son interprétation. Ce
n'est donc qu'à l'artiste que le reproche peut s'adresser. — Ainsi, bien que je m'observe, s'il m'échap-
pait d'écrire, monsieur, que votre portrait est dépourvu de distinction, ou que dans le vôtre, madame,
on voit des bras d'une forme déplorable, ne me soupçonnez pas un seul instant d'avoir pensé que vous
n'aviez pas, monsieur, l'air d'un parfait gentleman, ni que vous soyez affligée, madame, de vilains bras.

2. Voir l'Art; 2e année, tome V, pages 121, 162, 181, 193 et 227.
 
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