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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 2)

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Bonnin, A.: Salon de 1876: peinture, [3]
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https://doi.org/10.11588/diglit.16690#0216

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182

L'ART.

où paissent des moutons, Geneviève enfant, priant agenouillée devant une petite croix que ses mains
pieuses ont fixée au tronc d'un arbre. Des laboureurs, un homme et une femme qui porte à son cou un
enfant endormi, sont arrêtés au premier plan et la regardent avec une attitude qui exprime bien, ainsi
que l'indique la légende écrite au livret, « la surprise et l'admiration». Au troisième plan, un berger,
appuyé du coude contre un arbre et la tête inclinée sur son bras, observe pensif la ferveur de la jeune
fille. — Cette scène est très-expressive et elle est rendue à l'aide de moyens dont on ne saurait trop
louer la sobriété. Les acteurs qui la composent suffisent à en indiquer le sens et se font comprendre
sans que leur mimique ait rien d'exagéré.

La conception de l'œuvre est donc en accord parfait avec le sentiment qui l'a inspirée et qu'elle
devait produire, et à ce point de vue on ne peut adresser à l'auteur que de légitimes éloges. Mais si l'on
va plus avant dans l'examen de son tableau, si l'on veut en aborder l'analyse, on peut relever, à côté
de ces qualités évidentes, des défauts non moins frappants. Tout d'abord la perspective du paysage
semble un peu trop montante, et cet effet est produit par la disproportion du berger placé au troisième
plan. Cette figure est gigantesque, et sa grande taille, qui contredit l'idée de l'éloignement, rapproche
le plan sur lequel elle est posée et le fait subitement remonter vers le haut du cadre. — La figure
agenouillée de la sainte offre un mouvement de ferveur plein d'élan, mais qui est indiqué avec une
simplicité de lignes excessive. Il faut également reprocher au peintre de l'avoir revêtue d'un costume
un peu trop sommaire. Cette robe de lin blanc, qui l'enveloppe du cou aux talons, est absolument rudi-
mentaire et fait songer à la draperie de la triste Espérance dont M. Puvis de Chavannes exposait la
maigre image au Salon de 1872.

Le groupe du premier plan est la meilleure partie du tableau. Dessiné avec la simplicité habi-
tuelle à l'auteur, il présente une certaine largeur de contours, empreinte de naïveté et de force, et un
caractère rustique très-heureusement accentué. Quant à la couleur, elle est atténuée, sourde et
étendue par grandes teintes plates, dans le goût de certaines fresques anciennes que le temps n'a guère
respectées et selon la manière ordinaire de M. Puvis de Chavannes. Cependant, si elle est peu sédui-
sante à l'œil, du moins elle ne le heurte pas, et elle peut convenir à une peinture dont la destination
est de compléter un ensemble de décoration architecturale et qui ne doit pas, par sa vivacité, attirer
à elle toute l'attention. Avant de trop accentuer un blâme sur ce point, il faut encore considérer que
cet ouvrage est fait pour prendre place dans un monument dont l'intérieur très-peu orné ne comporte
pas des peintures décoratives aux couleurs trop brillantes. Il ne s'agit pas ici pour le peintre de rivali-
ser avec l'éclat des dorures et des marbres précieux; nous ne sommes plus à l'Opéra, mais au Pan-
théon, où le cadre est de pierre froide et nue. Cette considération doit, cette fois, rendre plus accep-
table le procédé d'effacement auquel M. Puvis de Chavannes demande l'harmonie de la coloration de
ses toiles.

Le grand carton, qui occupe tout un côté de la plate-forme du grand escalier, représente saint
Germain d'Auxerre traversant Nanterre en compagnie de saint Loup, et distinguant parmi la foule
accourue à leur rencontre, « une enfant marquée pour lui du sceau divin. » « Il l'interroge, ajoute le
« livret, et prédit à ses parents les hautes destinées auxquelles elle est appelée. Cette enfant fut sainte
u Geneviève, patronne de Paris. » — On retrouve dans cette scène les mêmes qualités de simplicité et
de justesse d'expression que dans la précédente. Le dessin offre un très-heureux mélange de noblesse
et de caractère rustique. Le sentiment de la vérité, de la nature, est très-frappant et il concourt à créer
un style qui n'a rien de convenu ni de banal, en un mot rien d'appris par cœur, et qui résulte d'une
interprétation bien personnelle du modèle. Et l'on doit préférer cette expression individuelle même
quand elle n'arrive pas à se manifester dans une forme parfaite, aux imitations les plus habiles,
aux leçons les mieux sues des trop dociles élèves de la tradition. — J'ajouterai que ce carton me plaît
plus que la peinture. Quelle est la cause de cette préférence, puisque je viens de louer dans ces deux
ouvrages les mêmes mérites ? Au risque de me départir un peu de ce que j'ai dit plus haut, en thèse
générale, des conditions de la peinture murale, j'avouerai que la raison de ce choix pourrait bien être
que le carton se trouve encore vierge de couleurs, et qu'il conserve ainsi, dans l'accent intact de son
dessin, la franchise de la conception première de l'artiste.

A côté de ces grandes compositions est exposée une petite esquisse de peintures destinées à décorer
 
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