Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 4)

DOI article:
Visconti, P. H.: Le Musée Torlonia, [1], Ariadne abandonnée par Thésée dans l'ile de Naxos
DOI Page / Citation link: 
https://doi.org/10.11588/diglit.16692#0061

DWork-Logo
Overview
loading ...
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
LE MUSÉE TORLONIA. ^

Winckelmann le premier reconnut le caractère idéal de cette sculpture, et il proposa d'en faire
une Naïade endormie sur le bord de quelque rivière. Il était réservé à
Ennius Quirinus Visconti de déterminer le véritable sujet de cet ouvrage
tant admiré de l'art antique1. Fondée sur des observations d'une profonde
critique, son opinion est maintenant devenue celle de tous les savants,
et l'on reconnaît dans cette statue Ariadne abandonnée par Thésée sur le
rocher de Naxos, pendant que ses yeux étaient « enchaînes par un triste
sommeil1 », ainsi que les poètes de l'antiquité nous l'ont représentée. Plus
tard des comparaisons de toute espèce vinrent à l'appui du jugement pro-
noncé par le grand archéologue romain. Le savant allemand Frédéric Jacobs

rapprocha le marbre du Vatican d'une médaille de Périnthe, portant la figure de l'empereur
Alexandre Sévère, et au revers de laquelle on voit Ariadne abandonnée dans l'île de Naxos, et
retrouvée par Bacchus. La figure d'Ariadne y est parfaitement semblable à la statue du Vatican % ce
qui justifie l'opinion que j'ai émise dans mon dernier article, que cette statue dut faire partie

d'une plus vaste composition. Le bas-relief que le pape Grégoire XVI,
sur mes représentations, fit placer près de la statue d'Ariadne au
Musée du Vatican et que nous donnons ici, nous montre Ariadne
dans une attitude semblable, au moment où elle est délaissée par
Thésée.

La médaille nous la montre à peu près dans la même pose4.
Mais elle est déjà sous les yeux de Bacchus, qui la contemple,
soutenu par son fidèle nourricier. La malheureuse fille de Minos
touche au terme de ses angoisses, et va trouver dans l'amour d'un
dieu la réparation de son triste abandon. C'est à l'ensemble d'une
telle composition que doit se rapporter le groupe que nous
avons publié dans notre étude précédente, ainsi que la statue qui forme le sujet de celle-ci. La
proportion des deux statues est colossale; l'art s'y montre également grandiose et puissant; le
marbre et la provenance sont les mômes. La médaille que nous reproduisons confirme cette hypo-
thèse. Si l'on compare la sculpture du Musée Torlonia avec celle du Vatican, il faudra conclure
qu'elle appartient à un type d'art bien plus ancien et bien plus élevé. La tête est d'une finesse d'ex-
pression vraiment saisissante. Les traits du visage, pleins de beauté et de noblesse, se montrent encore
agités par la violence des angoisses qui ont précédé un repos et un calme imposés seulement par
l'excès de la souffrance. Le sommeil vient à peine d'interrompre les cris du désespoir. La bouche est
encore entr'ouverte. Les yeux sont gros des larmes qui coulaient tout à 1'heiife. Les cheveux sont
encore en désordre. L'ample couverture qui enveloppe la partie inférieure du corps en laisse tout le haut
entièrement nu. La fraîcheur de la taille du ciseau, parfaitement conservée, nous permet d'en appré-
cier tout le mérite. La disposition des bras n'a rien de recherché, et présente dans la pose et dans
les contours un abandon qui suit l'épuisement des forces. Rien n'est plus expressif, rien n'est ])his
beau, rien n'est plus vrai. La draperie qui couvre les genoux et les jambes d'Ariadne enveloppe cette
partie du corps avec grâce et noblesse. A tous égards cette statue est un des plus beaux modèles de
l'art antique, et des plus propres à l'étude, pour qui veut s'inspirer des principes de l'École grecque
dans sa plus florissante époque.

Baron P. H. Visconti.

(La suite prochainement.) 9

1. Musée Pio-Clementin.} tome ii, pl. 44. Monuments du Musée français, pl. 24.

2. Tristi devinctam lumina somno. Catulle, Argonaut., v. 122.

3. Ueber die Bildsaeule der Schlafenden Ariadne, sonst Cleopatra genaimt auf einer seltenen M'ùnze, Act,, Ak. d. Wiss, zu Mùnchen,
aimo 1814.

4. J'ai parlé de cette médaille et de Y Ariadne du Vatican, dans le discours prononcé à l'Académie archéologique romaine, le 19 dé-
cembre 1845. Voir le vol. xiii des Atti dell' Academia d'archeologia, pag. 177 et suiv. l'on peut voir dans le même vol., page 203, un
mémoire de M. Jobris sur le bas-relief du Vatican, dont j'ai fait mention dans le texte, et qui représente Ariadne au moment même de
l'abandon de Thésée.
 
Annotationen