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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 4)

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Champfleury: Une petite découverte au Musée de Sèvres
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https://doi.org/10.11588/diglit.16692#0361

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UNE PETITE

DÉCOUVERTE AU MUSÉE DE SÈVRES

endant l'année qui précéda le déménagement de l'ancienne Manufacture, divers
classements préliminaires furent faits en vue de la translation prochaine d'un grand
nombre de pièces qui, perdues dans l'ombre de l'ancien Musée, étaient recou-
vertes d'une poussière légendaire. C'est ainsi que fut trouvé sur le haut d'une
armoire un pot de fleurs dont le décor sommaire consistait en un médaillon pendu à
un nœud de rubans, des fleurs formant cadre aux initiales entrelacées A. M. Ce
Gmure de Bomon, vase ne paraissait pas avoir jamais attiré l'attention; son ornementation simple

d'après des types elzéviriens.

rendait difficile toute attache à un des grands centres d'anciennes fabriques fran-
çaises ; fendu, le pot de fleurs avait été relégué en haut de la vitrine, plutôt comme débarras que
comme digne de figurer dans les vitrines du Musée et dans le catalogue; du moins la pièce ne portait
pas de numéro d'entrée.

Cependant, si abandonné que fût l'objet, il était utile de commencer une enquête relative
aux initiales, quel qu'en dût être le résultat. Cet A, cet M, étaient un indice et donnèrent lieu à
quelques explications que voici : si le pot de fleurs, comme tout le portait à croire, avait servi à un
jardin, on pouvait lire à travers les initiales : Arroser-moi ; cette légende rentrait dans la tournure
d'esprit habituelle des potiers du xvuic siècle. Un érudit qui vit le pot dit qu'il pouvait avoir servi à la
décoration d'un autel et qu'il serait permis de lire Ave Maria, ce qui était moins admissible que la
première interprétation, le décor du vase étant bien sommaire pour l'ornementation d'un autel. Quel-
qu'un émit l'opinion que l'entrelacement du chiffre ne rejetait pas absolument Y M derrière VA, et que
cette disposition, si elle était admise, permettrait de reconnaître les initiales de Marie-Antoinette ; mais
il n'y avait pas, suivant l'habitude, de couronne royale au-dessus du cartouche, et le nœud de rubans
paraissait s'appliquer plutôt à une bergère qu'à une reine. Ce fut l'avis de mon ami E. Soulié, con-
servateur du Musée de Versailles, fort versé dans l'étude des choses du xvnr siècle : « Je ne saurais,
pas plus que vous, m'écrivait-il, affirmer au premier abord que le chiffre que vous me soumettez soit
bien celui de Marie-Antoinette. La simplicité et l'absence de couronne royale permettent d'en douter,
il serait possible cependant qu'au Petit-Trianon il y eût un certain nombre d'objets et d'ustensiles plus
simples de forme et de décoration. »

Quoi qu'il en fût et malgré que tout d'abord les recherches parussent arrêtées presque au début, le
pot de fleurs fut laissé en vue dans les bureaux du service des collections, afin qu'on ne pût oublier
ce détail, quelque minime qu'il fût. La science est un composé de patience, et le chef de bureau qui
disait qu'une affaire se faisait dans les cartons montrait une juste connaissance de la lenteur de temps
qu'entraîne toute recherche.

Alors que le pot de fleurs aux initiales énigmatiques attendait dans le cabinet des consultations,
• survint par hasard l'archiviste de Versailles qui avait affaire au Musée. M. Desjardins était un des plus
éclairés archivistes de province, et il a changé actuellement de poste. Ses yeux se portèrent vers le
pot ; nos doutes lui furent soumis et il n'hésita pas à attribuer les initiales à Marie-Antoinette, alors
qu'elle avait souci du mobilier et de l'aménagement du Petit-Trianon.

En effet des pièces manuscrites des archives de Seine-et-Oise constatent que 1,232 pots de fleurs
« en faïence, à fleurs, avec le chiffre de la reine », furent livrés, le 2 avril 1785, par le sieur Mon-
 
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