Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 4)

DOI Artikel:
Chronique étrangère
DOI Artikel:
Nécrologie
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.16692#0083

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
72

L'ART.

l'opinion exprimée en ces termes par Richard Wagner, dans un
mémoire relatif à l'érection d'un conservatoire à Munich : « La
vraie esthétique et la vraie histoire s'apprennent de la meilleure
manière par l'exécution belle et correcte des œuvres classiques,
par des auditions dont les éléments sont choisis dans le trésor de
la littérature musicale de tous les temps et de tous les pays.
C'est là le point culminant de l'enseignement musical. » Mais il
combat comme trop absolue l'exclusion de l'harmonie, du contre-
point et de l'instrumentation,' et revendique pour les conserva-
toires l'enseignement de ces connaissances « indispensables même
au musicien dénué de la faculté créatrice s'il veut arriver à une
réelle compréhension des grandes œuvres et en jouir d'une ma-
nière consciente. » Citons encore ce passage excellent qui résume
le paragraphe que l'orateur a consacré au programme des con-
servatoires : « ... Une institution publique d'enseignement mu-
sical ne doit pas préconiser une tendance exclusive de l'art;
mais elle doit favoriser le libre développement des facultés
créatrices — ou reproductrices — du disciple. Imposer une
sorte d'orthodoxie artistique, c'est fermer l'issue à tout progrès;
en prétendant révéler la vérité absolue, on supprime toute spon-
tanéité de l'esprit.. Les arts' hiératiques seuls ont connu un canon
de cette espèce, et l'on sait à quoi ils ont invariablement abouti.
Une telle unité factice ne s'obtient d'ailleurs qu'en supprimant
toute initiative chez le professeur, en :1e réduisant à l'état de
machine, condition funeste pour le haut enseignement, et qui
entraîne comme conséquence la nécessité de ' recruter le corps
professoral parmi les talents secondaires. En somme, progressiste
en matière de science, conservatrice en matière d'art, telle doit
être, selon moi, là tendance d'un conservatoire. Tout en se gar-
dant de cet esprit de négation systématique auquel les corps
enseignants inclinent si aisément, un établissement de cette sorte
doit observer, devant les tentatives d'innovation une certaine
réserve, mais une. réserve sympathique lorsqu'elles offrent un
caractère sérieux. En aucun cas.il n'est'tenu de prendre publi-
quement parti dans les opinions controversées; car, étant des- j
tiné à' durer, il a le devoir de ne pas compromettre son prestige j
et son autorité en se condamnant d'avance à des réactions inévi-
tables, en s'arrogeant un monopole d'infaillibilité que l'avenir se
refuserait peut-être à sanctionner. A mon sens, la direction
générale à imprimer aux études musicales se résume dans les j
points suivants : nourrir l'esprit et la mémoire de l'élève sans les j
surcharger et les accabler; provoquer et entretenir chez le jeune
artiste une activité — je dirais même une inquiétude — du sen-
timent ; s'attacher à lui inculquer, non pas des aphorismes scien-
tifiques, mais des vérités pratiques, et avant tout celle-ci : que
rien ne profitera à l'artiste et ne portera le cachet de son indi-
vidualité que ce qu'il aura conquis par ses propres efforts, ce
qu'il aura reconnu, senti et vécu lui-même; et enfin, qu'aucun
procédé d'école ne tient lieu du labeur obstiné et patient, de la |
recherche toujours inassouvie. »

L'orateur examine ensuite jusqu'à quel point les établisse-
ments publics consacrés à l'enseignement musical répondent à

leur destination, quels sont les principaux obstacles auxquels ils
se heurtent, et quels sont les points où des améliorations sont
désirables. Il souhaiterait que la tâche imposée aux conservatoires
fût répartie entre deux espèces d'établissements; « les uns voués
à l'enseignement technique proprement dit et n'ayant à produire
leurs élèves que dans des exercices scolastiques, les autres se
consacrant à l'éducation supérieure de l'artiste et à la culture du
public au moyen d'exécutions musicales, concerts, représentations
dramatiques. Il voudrait surtout que l'exemple donné par quel-
ques grandes villes de Belgique devînt la règle, et que la lecture
musicale à son degré élémentaire fût inscrite parmi les matières
obligatoires de l'enseignement primaire. Ce qui libérerait les con-
servatoires d'une besogne qui n'est pas la leur : celle d'enseigner
aux enfants à connaître les notes. » Le discours de M. Gcvaert
se termine par quelques considérations élevées sur la mission
dévolue aux grandes institutions musicales, sur leur avenir, sur
les résultats qu'elles amèneront pour les progrès de l'art. Res-
ponsabilité de l'école devant l'individu : création du milieu le
plus favorable au développement des facultés de l'artiste. Res-
ponsabilité de l'école devant l'art: conserver et perpétuer la tra-
dition pour l'exécution caractéristique des grandes œuvres clas-
siques ; lorsqu'une telle tradition existe, la créer, et la fixer lors-
qu'elle n'existe pas. Enfin « la plus belle mission d'une école
digne de ce nom est de répandre, dans le rayon que peut
atteindre son action, l'amour de l'art élevé, le respect de sa
dignité, et de propager la religion des grands hommes par les-
quels le Beau s'est réalisé. C'est en vain que ces principes seront
inculqués aux générations nouvelles, s'ils ne trouvent pas d'air
ambiant pour vivre et prospérer, un sol pour prendre racine. On
ne bâtit pas d'école au milieu d'un désert. A toute époque l'art
reflète les côtés faibles de la société qui le patronne ; au temps
où les cours italiennes et allemandes donnaient le ton, l'écueilde
l'art était le maniéré; aujourd'hui que le public se compose de
couches sociales nouvelles, c'est le violent et le vulgaire ; il faut
donc que les institutions pénétrées du sentiment de leur mission
agissent dans la mesure de leur pouvoir sur les tendances du
public, par l'exemple et par l'action. En assumant cette sorte de
direction esthétique, l'école remplit une fonction élevée ; et c'est
ici que commence sa responsabilité devant la société. » La der-
nière phrase de l'orateur exprime sa foi profonde dans les desti-
nées glorieuses de l'art musical : « Quel que soit le jugement
définitif que la postérité aura à porter sur la musique moderne,
elle ne pourra lui refuser l'honneur d'avoir osé explorer le monde
de l'âme à des profondeurs que les âges précédents n'avaient ni
entrevues, ni même soupçonnées. Tant d'efforts, tant de génie,
un tel trésor d'action désintéressée n'auront pas été dépensés en
pure perte pour le perfectionnement moral et idéal de l'huma-
nité. » Ce discours dont nous ne pouvons qu'indiquer les traits
principaux a obtenu un grand et légitime succès. Il sera lu avec
fruit par toutes les personnes qui s'intéressent au développement
de l'enseignement musical et aux progrès de l'art.

NECROLOGIE

— Les journaux anglais annoncent la mort de M. Jo-
seph Marryat, auteur d'une History of Pottery and Porce-
lain, considérée comme le meilleur ouvrage qui ait été
publié en Angleterre sur la céramique. M. Marryat est
mort, le 24 septembre, dans sa quatre-vingt-sixième année.

— Le sculpteur allemand, Ernest von Bandel, auteur
du monument d'Arminius, inauguré l'année dernière dans la
forêt de Teutobourg, est mort, il y a quelques jours, à
Donauwerth, dans un âge très-avancé.

Le Directtur-Gèrunt, EUGÈNE VÉRON,
 
Annotationen