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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 4)

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Desnoiresterres, Gustave: Essai d'iconographie voltairienne, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.16692#0070

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6o

L'ART.

trop grossière pour en être une reproduction fidèle ; les éditeurs durent renoncer à en enrichir leur
texte, et se borner à donner les inscriptions. On lisait autour du portrait :

Erroris tenebras hic quanta luce fugavil.

au revers :

Vollario et Denisce Fernesii fundatoribus ;
coloni quos fecit amor milites, si, suas arles,
ipsamque vitam devovent.

et amour :

Omnibus hoc unum votum est : o vivat uterque!
J. L. W.
' 1778'-

Ne quittons pas ce chapitre des médailles sans parler d'un petit et charmant ouvrage de l'orfèvre
Dupuis, une tête en or, d'un pouce de hauteur, enchâssée dans un médaillon dont le revers présentait
toutes les lettres des noms de Voltaire, tracées en filigrane. La tête était fort ressemblante, et le poëte,
qu'on ne satisfaisait pas aisément à cet égard, en était dans le ravissement. Il avait installé Dupuis à
Ferney et il lui dépêchait tous ses visiteurs. Il fallait bien s'exécuter et l'on ne s'en retournait pas sans
avoir emporté .un Voltaire. C'était autant de louis que Dupuis ajoutait à ses appointé ments, car Vol-
taire, qui l'avait soufflé au roi de Sardaigne, l'avait à ses gages.

L'année 1770, à laquelle nous arrivons, fut incontestablement la plus glorieuse pour Voltaire. La
souscription de la statue confiée à Pigalle était bien faite pour passer l'éponge sur les maussades incidents
auxquels avait donné lieu la médaille de Waechter. Nous nous sommes étendu, ici même % avec trop
de détail sur tout cela pour ne pas nous borner à rappeler à sa date cette grande manifestation de
l'opinion que ne devait pas toutefois consacrer et fixer une oeuvre digne et de l'artiste et du modèle.
Mais c'était encore un triomphe qu'il allait falloir expier ; car personne autant que Voltaire ne sera
astreint à cette dure nécessité infligée à quiconque s'élève au-dessus du commun des hommes. Tout le
monde d'ailleurs n'avait pas pris son parti sur cette souscription couverte avec tant d'enthousiasme
et d'élan par ce que la France et l'Europe renfermaient de gens distingués soit par la naissance, soit
par l'intelligence. C'était là un scandale qu'on avait sur le cœur et contre lequel on se devait de pro-
tester. Dans le courant de mai 1774, paraissait une estampe intitulée la Vengeance divine. Le sujet était
la Religion appelant la foudre sur la statue du poëte (la statue de Pigalle). L'un des bras, atteint, se
détache du tronc, une plume que tenait le poëte s'est échappée de sa main inerte. La Sottise, à la
tête des philosophes, est consternée de cet événement, auquel applaudissent les prêtres et leur trou-
peau. Il faut savoir gré à l'artiste de l'intention, car tout cela ne vaut guère. Le but était-il atteint?
Nous en doutons, et le seul résultat apparent fut l'éclosion d'une seconde gravure, contre-partie de
celle-là, comme son titre seul l'indique, la Vengeance humaine. Là l'Imagination a remplacé la Religion;
elle présente au poëte le flambeau du Génie. L'Envie, la Sottise, plongées dans la fange, insultent à
sa gloire qu'elles sont impuissantes à ternir3. Bjœrnstoehl, que nous avons déjà cité et auquel on doit
de curieux détails sur l'auteur de la Henriade, parle de son côté d'une caricature au gros sel, qu'il
eut occasion de voir à Berne, dans le cabinet de M. d'Erlac. « Je ne puis, dit-il, passer sous silence
un dessin satirique que possède Son Excellence. 11 représente Voltaire sous les traits d'un pécheur
repentant, pieds nus, dans l'attitude la plus humble. Derrière lui, Pégase avec ses ailes et des oreilles
d'âne. Tout ce que Pégase laisse aller, l'imprimeur Cramer, qui le suit, a grand soin de le ramasser,
pour s'enrichir avec cette grosse fiente (grosso slerco). Sous le dessin on lit ce fragment d'Horace :

Pulchra Laverna.
Du mihi Jaltère} da iustuirt sanctumque viderik.

4

Gustave Desnoiresterres.

1. Longchamp et Wagnière, Mémoires sur Voltaire (Paris, André, 1826, t. I, p. 64). Additions au Commentaire historique.

2. Voir l'Art. 1" année, t. I, p. 127.

3. Mémoires secrets pour servir à l'histoire de la répuhlique des lettres (Londres, John Adamson), t. vii, p. 173; 2 avril 1774.

4. Bjœrnstcehl, Lettere ne' suoi Viaggi stranieri (Peschiavo, 1785), t. iv, p. 230, lettre xii. Berne, 20 d'ottobere 1773. La citation
d'Horace est empruntée à l'épître xvi du livre ier, vers 60, 61.
 
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