L' art: revue hebdomadaire illustrée (2.1876 (Teil 2))

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L'ART.

commandé par le duc de Westminster est l'honneur de la galerie
du noble lord.

Le faire reste toujours bien français comme dans les portraits
modelés à Londres par Carpeaux ; je n'en veux de meilleure
preuve que ce buste charmant de Mlle Heseltine d'une originalité
si piquante, d'une ressemblance criante, mais d'une ressemblance
essentiellement britannique. Vous souvient-il de ces vers de Chénier
qu'un soir, au Théâtre Français, Alfred de Musset se rappela
soudain ?

Un vers d'André Chénier chanta dans ma mémoire,
Un vers presque inconnu, refrain inachevé,
Frais comme le hasard, moins écrit que révé.

...........Je murmurais tout bas,

■Regardant cette enfant qui ne s'en doutait guère :
« Sous votre aimable tête un cou blanc, délicat,
« Se plie, et de la neige effacerait l'éclat. »

. Je n'ai jamais regardé le buste de Mlle Heseltine sans qu'ils
me revinssent immédiatement en mémoire. C'est qu'elle est ado-
rable cette belle enfant d'Albion et que M. Dalou en a fait une
adorable chose.

Elève de Duret et de Carpeaux, le jeune statuaire exposa au
Salon de 1869 Daphnis et Chlaê, groupe en plâtre dont le mo-
dèle fut acheté par le ministère et qui devait être exécuté en
marbre. L'année suivante il obtenait une médaille pour sa statue
de la Brodeuse. J'ai sous les yeux une lettre de M. Dalou qui

Mademoiselle Heseltine.
Gravure de Smeeton et Tilly, d'après le buste de Jules Dalou.

s'exprime ainsi à propos de ses deux dessins : « L'un est la copie
de la Brodeuse, plâtre que j'exposai en 70 et pour lequel j'eus
une médaille, le marbre était commencé et devait être fini pour
l'année suivante quand éclata cette fameuse guerre qui interrom-
pit tout ; puis les événements de la Commune m'ayant forcé à
quitter Paris, la chose en est restée là, et je ne l'exécuterais
pas maintenant sans y apporter des modifications, ce que je me
propose de faire un jour.

« Pour l'autre groupe exposé en 69, le modèle était acheté
par le ministère et devait également être exécuté en marbre, mais
peu satisfait de l'exécution et trouvant qu'il y avait trop à faire
dans le marbre, j'avais pris le parti de recommencer le modèle à
nouveau ; c'était en train ; pendant le siège ce nouveau modèle
gela, alors que je gelais de mon côté dans les tranchées de Bondy

à la bataille du 21 décembre, où j'assistais comme volontaire dans
un bataillon de marche. Ce groupe, je vais le recommencer de
nouveau sans rien changer à la composition, et j'espère cette fois
le mener à bonne fin; où l'exposerai-je quand il sera en marbre ?
C'est ce qu'alors je prierai qu'on veuille bien décider. »

Le ciel me préserve de m'occuper ici de politique. J'ignore
absolument quelle a pu être la participation de M. Dalou aux
événements de la Commune. La seule chose que je sache,
l'unique que je tienne à savoir, c'est que cet exilé honore la
France par son talent et la dignité de sa vie exclusivement con-
sacrée à son art. Ce qu'il est de mon devoir de faire connaître,
c'est qu'il jouit en Angleterre de l'estime générale, que les plus
grands seigneurs le recherchent et se disputent ses œuvres, que
tous ceux qui le connaissent désirent vivement, dans un intérêt