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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 1)

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i44

L'ART.

les monuments égyptiens,- une quantité'de mémoires qui, pour la
plupart, ont paru dans la Revue archéologique et VAthenœum
français. ■ •

Lors de l'Exposition de [878, M. Mariette e'tait revenu en
France pour organiser l'exposition égyptienne. C'est à cette
époque qu'il fut reçu, en grande pompe, membre de l'Acadé-
mie des inscriptions. Des obsèques solennelles ont été faites
au Caire au savant égyptologue.

— Le 19 janvier est mort, à l'âge de quatre-vingt-deux ans,
dans la propriété qu'il possédait dans un des faubourgs de
Bruxelles, à Schaerbeek, Eugène Verboeckhoeven, qui a joui
d'une immense renommée comme peintre d'animaux Cette célé-
brité ne laisse pas aujourd'hui que de surprendre. S'il suffisait
pour la justifier d'un gigantesque labeur, elle serait à jamais
indiscutable. La vérité est que Verboeckhoeven, homme des
plus honorables, a bien moins été un artiste qu'un producteur
de peinture sans relâche. Jamais il n'exista de plus infatigable
travailleur, et l'âge n'avait en aucune façon ralenti ce piocheur
obstiné. En toutes saisons, le jour le trouvait invariablement à
son chevalet, que l'heure du dîner en famille le décidait, seule,
à quitter. Le repas à peine terminé, il retournait à l'atelier,
peindre s'il faisait encore jour, sinon, dessiner à la lampe jus-
qu'à minuit. Au dernier coup de minuit, il plongeait les deux
mains dans la glaise et s'occupait à modeler jusqu'à une heure
du matin. La sculpture était sa marotte favorite, une passion
intime à laquelle il s'adonnait pour lui seul. Il faisait rond et ne
s'en apercevait nullement; aussi s'est-il immolé lui-même de la
meilleure foi du monde, en produisant son propre buste, dont
il offrit le premier exemplaire à son ami, M. Gallait.

On a le droit de dire, sans crainte d'être taxé d'exagération,
que quiconque a vu un tableau de Verboeckhoeven, les a vus
tous. C'est toujours le même tableau lisse, propre, fade, porce-
laineux et bien dessiné d'un dessin sans trace d'accent. Cela a
l'air d'être invariablement fabriqué au procédé, mécaniquement.

Le nombre de ses tableaux de chevalet est incalculable; il ne
serait pas surprenant cependant qu'il en eût laissé le compte,
car il était l'ordre même.

Sa manière de travailler, qui paraîtra peut-être incroyable,
mais qui est indéniable, éclaire d'un jour significatif la valeur
artistique de son œuvre : ses dessins nocturnes, en général, du
reste, très supérieurs â ses tableaux, lui servaient à faire ou à
faire faire un choix, — car il était toujours surchargé de com-
mandes, — pour plusieurs tableaux. Il tenait à en entreprendre
un certain nombre à la fois, disposait dans son vaste atelier
autant de chevalets, et passait régulièrement de l'un à l'autre
jusqu'à ce qu'il eût peint le ciel de chaque composition; il
revenait aussitôt après à sa première toile, y exécutait un bout
de paysage, puis passait à la seconde pour en faire autant, et
ainsi de suite jusqu'au complet achèvement de la série.

Il apportait la conscience la plus méticuleuse h ce que
toutes ses productions fussent d'égal mérite, et il y a pleinement
réussi. Cette conscience était poussée si loin qu'il lui arrivait
bien rarement de signer ses œuvres, si ce n'est en présence de
son acheteur, se réservant de faire une retouche si celui-ci lui
adressait quelque observation. Une fois la signature apposée, il
avait dit son tout dernier mot. Il ne restait qu'à livrer la com-
mande.

Verboeckhoeven s'est senti, tout au moins à deux reprises,
de plus hautes visées que son éternel panneau de chevalet.
L'Italie l'attira, mais il n'en comprit pas le premier mot, et se
hâta de revenir au pays natal qui lui rendit le service de le débar-
rasser d'un colossal Souvenir de. la campagne de Rome. Cela se
voit au Musée de Bruxelles, — que cela embellit peu, — en com-
pagnie d'un autre tableau de sa manière habituelle, mais de
vastes proportions aussi. Il s'agit d'un Troupeau surpris par
l'orage et d'un bon berger portant un petit agneau dans ses

bras. Cela a tout à fait l'air d'être en bois. C'est, du reste, un
de ses ouvrages les plus célèbres.

Une autre fois, Verboeckhoeven, le moins coloriste des
humains, s'avisa d'aborder le portrait historique équestre, gran-
deur nature, et il s'attaqua .ni plus ni moins qu'à Rubens.
Ce Rubens est demeuré légendaire.

L'excellent homme avait — il y a fort longtemps de cela —
mis la main à diverses restaurations de tableaux anciens. Un
membre de l'aristocratie belge, qui vient de mourir, possédait
un Paul Potter qui était en grande partie un Verboeckhoeven;

— en conséquence, l'administration des Beaux-Arts fut con-
vaincue que Verboeckhoeven possédait les maîtres anciens

— grands et petits — comme personne, et, l'amitié du président
de cette commission aidant, elle le choisit pour en faire un
Membre de la Commission directrice des Musées royaux de Bel-
gique. Il y apporta des lumières spéciales; deux exemples suffi-
ront à les faire dignement apprécier : pour son début dans ses
nouvelles fonctions, il accompagna ses collègues chez le pro-
priétaire de deux tableaux, l'un d'Adriaan van de Velde, l'autre
de Pieter van der Leeuw. Le Musée ne possédait, pas plus alors
qu'aujourd'hui du reste. la moindre œuvre du maître, ni du
disciple. Les deux tableaux occupaient des petits chevalets posés
sur des meubles à hauteur d'appui. Verboeckhoeven les approcha
de la croisée, les mit en belle lumière, s'absorba dans leur examen,
puis proclama le van der Leeuw, « une perle de van de Velde », et
le van de Velde, « une peinture molle, à l'aspect de porcelaine ».

Il s'agissait simplement d'un des chefs-d'œuvre de l'illustre
frère du grand mariniste hollandais.

Quelques jours après, réminent expert du Musée, que la
Commission se gardait de consulter, sans doute depuis l'adjonc-
tion des lumières nouvelles dont elle se trouvait ainsi inondée,
le savant Etienne Le Roy, le juge compétent entre tous, deman-
dait à acheter ce précieux Adriaan pour la collection de M. Ruhl,
de Cologne ; il était trop tard, le tableau faisait depuis vingt-
quatre heures partie du riche cabinet de M. le baron Albert de
Rothschild, à Vienne.

Plus tard, comme s'il eût tenu à donner une preuve
éclatante de plus de l'ignorance sans bornes, comme le disait si
bien Etienne Le Roy, de la plupart des artistes en matière de
maîtres anciens, Verboeckhoeven vota avec enthousiasme l'achat
des restes déplorables d'un Hobbema proposés à la Commission,
par un spéculateur très fort, plus à même que personne d'être
fixé et sur cette horrible croûte, et sur la sauce monstrueuse à
laquelle elle avait été accommodée, et sur le savoir de la majorité
à qui il osait présenter pareil rebut, et à qui il devait un jour
servir, face à face, « qu'elle n'y entendait rien, absolument rien ».

Ce jour ne tarda guère à venir, grâce au gouvernement.
Plumé en cette occasion comme en pleine foret de Bondy, il
découvrit qu'un si habile homme méritait récompense, et il le
nomma, lui aussi, de la Commission!

Verboeckhoeven, à qui la dure responsabilité de l'Hobbema
de contrebande du Musée belge incombe en très large compagnie
d'artistes d'égale science, Verboeckhoeven a fait un petit nombre
d'eaux-fortes et beaucoup de dessins à la plume. Ceux-ci seront
toujours préférés par les connaisseurs à tous ses tableaux aux-
quels est réservé le sort que l'avenir s'est chargé d'assurer aux
œuvres, jadis si haut prisées, du chevalier van der Werff.

Excellent patriote, Eugène Verboeckhoeven prit très vail-
lamment part à la Révolution de 1830. Aussi est-ce en toute
justice que Wappers lui à donné une place d'honneur dans son
tableau reproduisant un des épisodes du soulèvement populaire
à Bruxelles, la plus vaste composition historique et la meilleure
toile qu'ait produite l'école belge.

Commandeur de l'ordre de Léopold, chevalier de la Légion
d'honneur, Verboeckhoeven était en outre décoré d'une foule
d'autres ordres.

Le Directeur-Gérant : EUGÈNE VÉRON.
 
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