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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 1)

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Véron, Eugène: Exposition de tableaux dans les galeries de "L'Art"
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https://doi.org/10.11588/diglit.18877#0174

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Fac-similé d'une eau-forte de Jaillot.

MM. Joseph-Edouard Dantan, Auguste Flameng, Victor
Gilbert, Norbert Goeneutte, G. Haquette et Edm. Yon, exposent
en ce moment dans les Galeries de l'Art des études et des tableaux
qui attirent et me'ritent l'attention des personnes qu'intéresse
l'art contemporain. Cette exposition ajoute en effet au charme
de la variété résultant de la diversité des talents l'attrait qu'exerce
toujours un caractère bien tranché de modernité. Ces six jeunes
gens sont de ceux qui croient avec raison, selon nous, que, s'il
n'est pas défendu à l'art de tenter des résurrections en puisant
ses inspirations dans le passé, c'est surtout dans l'interprétation
des faits de la vie contemporaine qu'il a le plus de chance de
trouver la vérité et la vie. Pour oser faire revivre l'histoire des
générations antérieures il faut un ensemble de qualités bien
rares. On ne saurait trop condamner les témérités irréfléchies
et inconscientes des artistes qui s'en vont chercher leurs sujets
dans des temps et dans des civilisations dont ils ne connaissent
ni l'histoire ni l'esprit, et dont ils remplacent fatalement les
caractères propres par les conventions d'un enseignement sans
sincérité.

Les exposants de l'Avenue de l'Opéra n'ont pas de ces
audaces. Ils se contentent de regarder autour d'eux et de choisir
parmi ces spectacles ceux qui parlent à leur imagination. Ils ne
peignent que ce qui leur plaît, ce qui est en conformité avec la
tournure de leur esprit, ce qui convient à leur tempérament.
Là est tout le secret de leur succès. Tandis que les académiques
s'ennuient à un labeur de manœuvre qui consiste à mettre sur
pied de grandes machines solennelles et vides, banales et pré-
tentieuses, sans idée et sans charme, parce qu'elles sont faites
sans amour, ces jeunes gens animés d'une ambition en apparence
plus modeste, en réalité plus sérieuse, mettent à ce qu'ils font
leur cœur et leur esprit, et si leurs œuvres ne sont pas toujours
parfaites, du moins sont-elles vivantes et sincères. Cela peut ne
pas suffire aux amateurs du «grand art», à ceux du moins qui
le mesurent aux prétentions du sujet et à la grandeur du cadre,
sans s'inquiéter de la manière dont ces prétentions sont justifiées

et dont le cadre est rempli ; mais cela réjouit ceux qui cherchent
l'art vrai, indépendamment des étiquettes, et qui ne se croient
pas tenus de rabaisser Watteau et Chardin au-dessous de Jou-
venet et de Vanloo, uniquement parce que les premiers n'ont
pas fabriqué d'aussi grandes machines que les seconds.

Cette exposition comprend des paysages, des scènes fami-
lières, des portraits et surtout des études prises sur le vif de
la vie de Paris et des environs, qui seront pour l'avenir des
documents « humains » des plus intéressants. Nous citerons
particulièrement dans cette dernière catégorie les Marchés de
M. V. Gilbert, la Gare de chemin de fer de M. Dantan, l'Appel
des balayeurs de M. N. Goeneutte. Il est à remarquer du reste
que cette prédilection pour Paris n'a rien d'extraordinaire de la
part des artistes qui ont organisé cette exposition, car tous, sauf
M. A. Flameng, sont Parisiens de naissance et d'esprit.

Sur les vingt toiles qu'expose M. Victor Gilbert il y en a au
moins quinze qui se rapportent à Paris. Personne ne connaît
mieux que lui la population qu'il met en scène. Aussi en rend-il
l'allure, le geste, les physionomies avec une vérité remarquable.
Le Marchand des quatre saisons, l'Intérieur de cuisine, les
Ustensiles de ménage, la Marchande de volailles et de gibier, la
Halle aux poissons le matin, la Fleuriste du marché de Mau-
beuge, la Marchande de soupe à la Halle, ne laissent rien à
désirer à ce point de vue. Nous devons ajouter que M. Gilbert
a un talent particulier pour la nature morte. Les objets dont
il meuble ses toiles sont rendus avec un sentiment de la réalité,
de l'apparence visible, de la substance môme, qu'il est difficile de
trouver en défaut. Voyez particulièrement ses ustensiles de
ménage, chacun a sou grain, son caractère, sa physionomie, sa
lumière propres, et l'ensemble est fort habilement composé.
Il est bien regrettable que tout cela soit un peu alourdi par
l'abus du noir, qui peut un jour dévorer les finesses de la touche
et rendre imperceptibles ces délicatesses. Espérons toutefois
que M. Gilbert finira par se rendre compte de ce danger. Nous
trouvons dans son exposition quelques toiles qui semblent justi-
 
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