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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 1)

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Véron, Eugène: Exposition de tableaux dans les galeries de "L'Art"
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Fouqué, Octave: Art musical, [6]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18877#0176

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164

L'ART.

tage, mais il tombe volontiers dans l'excès contraire. Il est
probable que la patine du temps atténuera ce défaut, mais il
n'en paraît pas moins réel pour le moment, et il est à craindre
que plus tard le noir qu'il affectionne trop ne finisse par tout
envahir. On ne peut pas lui demander des finesses qui sont
manifestement incompatibles avec la fougue de son tempéra-
ment. Cependant nous avons remarqué un petit tableau qui
représente des filets étendus sur des perches et dont la gamme
atténuée est d'une harmonie plus douce, qui prouve que
M. Haquette pourrait, s'il le voulait, modérer ses emportements.

On a beaucoup remarqué au dernier Salon l'Intérieur
d'atelier de M. Dantan. Il se présente aujourd'hui sous un aspect
tout différent. Il expose surtout des études de tètes dont plusieurs
sont d'un modelé bien remarquable. Je citerai particulièrement
le Portrait de M'"a M. G. Le relief en est si accentué qu'on
croirait voir des médaillons. On se rappelle avec quelle vérité,
dans l'Intérieur d'atelier, les objets superposés se détachaient
les uns des autres et gardaient leur plan. On aurait pu en faire
le tour et l'air circulait partout ; c'était le triomphe de la per-
spective aérienne et du modelé. La même qualité se retrouve
dans ses portraits et plus encore peut-être dans le petit tableau
où il représente un effet de neige à Saint-Cloud. Ce caractère
est ici d'autant plus remarquable que tout est blanc, la terre,
les arbres, les maisons, le ciel, et que cependant rien ne se mêle
ni ne se confond. Cette petite toile, sans prétention, est vraiment j
curieuse à étudier. Je regrette de ne pas trouver les mêmes
qualités dans la Gare de chemin de fer.

Tout le monde connaît les paysages de M. Edmond Yon, et
ces fonds lointains et vaporeux qu'il affectionne. Il y met des
finesses d'une douceur charmante, qui réjouissent d'autant plus
l'œil que ses premiers plans sont d'ordinaire un peu durs. On
serait tenté de croire qu'il y a là un contraste cherché et voulu.
Peut-être n'est-il pas bien nécessaire. En tout cas il est certain
que l'effet est obtenu, et qu'il s'en dégage un sentiment de
nature, un peu coquette si l'on veut, mais des plus agréables.

Le Château de Lignières à Trilbardou, les Fleurs sauvages, le
Lever de soleil au bord de la Marne, présentent le même
caractère et sont remplis de détails ravissants. La Moulière,
à Villerville, est d'une couleur plus chaude et fait penser à
Jules Dupré. Le Bachot marque une préoccupation différente.
On dirait un vieux tableau, qui a déjà reçu la patine du temps.
On sent que M. Yon s'applique à varier sa manière et tient à ne
pas trop se répéter. Il a raison de se défier de la tentation,
à laquelle ne résistent pas assez nombre de peintres, de recom-
mencer toujours le tableau qui leur a réussi une fois. Rien ne
tue l'art plus sûrement que la monotonie. Ajoutons que M. Yon
est un des paysagistes qui comprennent le mieux la nécessité
d'harmoniser les ciels avec le reste du tableau.

Le Chemin de la mer à Saint-Vaast-la-Hougue, de M. Aug.
Flameng, est d'un caractère tout différent. L'aspect en est sévère,
presque austère, comme il convient au sujet. Ce n'est plus le
paysage parisien de M. Yon; c'est moins fin et moins joli, mais
cette simplicité un peu nue, un peu triste, a une certaine gran-
deur qui attache. L'œil est saisi par l'accent de nature qui s'en
dégage; il y a là un véritable sentiment qui sauve du réalisme
banal ; cette toile est d'ailleurs pleine d'air et de lumière.

Cette exposition est la première en France où paraisse une
œuvre d'un jeune peintre espagnol encore inconnu ici, mais qui
ne le sera pas longtemps, M. Baldomero Galoffre. Ce tableautin
s'intitule la Course à âne. La scène se passe sur une plage de
l'Italie, avec le soleil et la lumière du pays. M. Galoffre est un
impressionniste qui a la couleur, le dessin, le modelé, le mou-
vement et l'esprit. 11 a peut-être tort de cercler ses figures
d'un trait noir qui en fait paraître les contours un peu durs,
même sous un ciel d'Italie, mais tout cela est d'un relief
ctohnant, d'une harmonie splendide et d'une vérité d'attitudes,
aussi vivante que possible. Cette petite toile est un vrai bijou;
il ne lui manque que d'être un peu plus remplie dans les
premiers plans.

Eugène Véron.

ART MUSICAL

Théâtre de la Renaissance : Janot, opéra-comique en trois
actes. — Société des concerts du Conservatoire : La Mer,
ode symphonique.

Pas d'action théâtrale : quelques scènes d'une excentrique
fantaisie, traitées avec désinvolture et développées avec cet art
du détail qui a fait longtemps le charme de certains articles de
la Vie parisienne; des mots d'une observation piquante qui
expriment dans une langue bien française des pensées que leur
singularité n'empêche pas d'être justes et vraies, voilà ce que
MM. Meilhac et Halévy nous ont offert dans Janot. Est-ce assez
pour entretenir l'intérêt durant trois actes, et pour amener vers
le portique de la Renaissance les flots pressés des spectateurs?
C'est ce dont nous ne voudrions pas jurer.

Il est rare que MM. Meilhac et Halévy, qui ont tant pro-
duit et de si jolies choses, aient écrit une véritable pièce en trois
actes. Leur point de départ est toujours original, et le premier
acte de leur comédie amusant au possible. Mais l'amour de
l'épisode les entraîne; ils ne savent pas s'astreindre à cette
besogne un peu vulgaire qui consiste à suivre une idée, la polir,
la raboter et à charpenter une pièce comme un maître ouvrier
construit un escalier, par degrés et planche à planche. Aussi,
malgré beaucoup d'esprit répandu dans le dialogue, l'intérêt
s'envole et généralement le troisième acte de ces fantaisies s'agite
dans le vide. Le point de départ de Janot n'a même pas cette
originalité et cette distinction qu'on aime à retrouver chez

MM. Meilhac et Halévy. Janot, qu'il est inutile de présenter au
lecteur, fait la parade dans les foires avec son maître Latignasse,
et à ce propos on nous a régalés de facéties mille fois entendues
sur la place publique. Au point de vue de la vérité, de cette
terrible vérité qui ne permet plus qu'on l'habille, les auteurs
sont sans reproche ; pour notre goût, nous aurions autant aimé
les voir mettre un peu plus du leur dans cette longue scène.

Il semble que les auteurs de la Belle Hélène et de la Grande
Duchesse aient beaucoup perdu en perdant Offenbach, ou plutôt
en le délaissant, car depuis plusieurs années ils avaient aban-
donné la collaboration de leur ancien compagnon de succès.
Offenbach était un esprit de leur famille et de leur trempe :
très original par certains côtés, il sauvait le vide de la forme et
de l'idée par l'excentricité de l'allure et le pétillement du
rythme ; s'il était quelquefois vulgaire, il était rarement banal
ou plat. M. Charles Lecocq, le dieu actuel de l'opérette,
est un musicien recommandable qui sait son métier et l'exerce
dans les règles. L'excentricité n'est pas son fait; il n'a ni le
tempérament, ni même le goût de la charge spirituelle et artis-
tique. Sa muse, bonne grosse bourgeoise, égale d'humeur et
gaie sans nervosité, s'accommodait très bien des facéties bon
enfant de Clairville ; elle se trouvait encore à l'aise dans ces
livrets sans originalité, sans sel, sans esprit, que nous n'avons
pas à nommer et qui ont fait fortune grâce à ce charmant petit
démon qui s'appelle Jeanne Granier. Mais au milieu de fan-
taisies d'essence plus fine, telles que les conçoivent d'ordinaire
 
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