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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 3)

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Genevay, Antoine: Sir Thomas Lawrence, P. R. A. (1769-1830)
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https://doi.org/10.11588/diglit.16676#0427

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SIR THOMAS LAWRENCE, P. R. A.

( i769-18 3o)

ous sommes en 1675, veuillez nous suivre à Devizes, petit bourg du
Wiltshire. Nous voici en face d'une auberge ayant pour enseigne un
ours noir dont, au gré du vent, la grossière image se balance au bout
d'un portant en fer. Entrons, s'il vous plaît, nous assisterons à un spec-
tacle curieux, et nous nous trouverons en présence d'un personnage que
nous ne nous attendions guère à rencontrer en si modeste lieu.

La vaste salle dans laquelle nous pénétrons sert à la fois de parloir,
de cuisine et de salle à manger; sur une large grille, qui ne ressemble
en rien aux modernes appareils de chauffage, brûle de la houille; autour
de ce foyer s'étend en demi-cercle une légion de pots et de marmites ;
sur un dressoir de chêne s'étalent reluisants des brocs, des plats, des gobelets en métal. Une longue
table de bois solide s'allonge au milieu de ce « hall », et, à droite et à gauche, sur des bancs
grossiers sont assis des buveurs; mais, pour l'heure, ils ne boivent pas, ils écoutent. Dans un vieux
fauteuil, qui jadis avait orné quelque demeure seigneuriale, un homme richement vêtu, appartenant
aux classes fortunées, écoute aussi, et, sur ses traits fins et mobiles, il est facile de suivre les expres-
sions diverses de son étonnement et de sa satisfaction. Mais l'acteur principal de cette scène est un
délicieux enfant, aux yeux les plus beaux du monde, à la tête intelligente, aux longs cheveux bouclés
et flottants. D'une voix harmonieuse et avec une mémoire imperturbable, il déclame un de ces longs
monologues dont Shakespeare est prodigue. Les gestes du petit bonhomme ont une énergie enfantine,
et l'animation de ses traits prouve qu'il sent et comprend à merveille le génie du poète dont il récite
les vers.

Quand il a fini, le personnage du fauteuil l'enlève dans ses bras et le caresse. Ce gentilhomme
est Garrick, le plus grand comédien qu'ait peut-être possédé l'Angleterre; et le petit déclamateur
qu'il félicite s'appelle Thomas Lawrence, le peintre futur des beautés et des élégances de l'aristo-
cratie anglaise.

Dans une de ses tournées, le hasard avait amené Garrick à Devizes, il s'était arrêté à l'Ours-Noir,
et l'hôtelier, instruit du nom de son visiteur, s'était naturellement empressé de le faire juge des éton-
nantes aptitudes de son fils, car la déclamation n'était point son seul mérite. Comme le peintre West1,

1 Né à Springfield, eu Pensylvanie (Amérique), en 1738; mort à Londres, peintre du Roi, en 1820.

Tome III. 40
 
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